Chapitre 1. Goutte d'eau

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« Le respect, c'est coûteux comme la came, j'ai rêvé d'être footeux comme Beckham
N3el Sheitan, la vengeance est glacée et le casque est intégral
J'suis dans le placement, t'es dans la perte »

On vient de rentrer du bled, mes parents se disputent depuis qu'on a repris la voiture à l'aéroport.

— Haks, c'était pas seulement parce qu'elle était fatiguée, ta tante m'a manqué de respect une bonne quinzaine de fois et t'as rien dit.

Toujours pareil, dès qu'on va en Algérie c'est le bordel quand on rentre. Tout ça parce que du côté de ma famille paternelle, c'est jamais passé avec ma daronne. En vrai, je sais même pas pourquoi. Je pense que c'est parce qu'elle dit trop ce qu'elle pense tout le temps, et on peut pas dire qu'elle aime faire des concessions.

— Depuis quand t'as besoin de moi pour te défendre, grogne mon père.

— Tu te fous de ma gueule ? Si je parle mal à n'importe quelle personne de ta famille c'est limite si tu demandes pas le divorce dans la seconde.

Je jette un coup d'œil à mon reuf et voit sa mâchoire se serrer. On a l'habitude, ça a toujours été comme ça. Nej' dort complètement affalée sur moi. Comme si j'avais une gueule d'oreiller t'sais.

— Tu redis ça je m'arrête et je te laisse sur le bord de la route, tu te démerderas pour rentrer.

Parfois je me demande s'ils restent pas ensemble juste parce que personne d'autre pourrait les supporter.

— Essaie juste de faire ça, je rentre et je crève les pneus de ta bagnole de merde, lance ma mère.

J'ai grave envie de balancer mon portable au milieu du pare-brise. Quand ils se prennent la tête, ils oublient toujours complètement qu'on existe.

— Parle bien, après Nej' répète tout.

Ah non, en fait ils oublient pas, ils s'en branlent juste.

— C'est ça ! répond-elle, Fais-moi la morale sur ma façon de parler alors qu'à cause de toi, tes fils parlent comme des grosses racailles !

Dans deux secondes il va lui dire que si elle voulait des petits bourgeois, fallait épouser un gros bourgeois.

— T'avais qu'à te trouver un bon petit bourge si tu voulais que tes gosses parlent bien.

Qu'est-ce que je disais.

Amir pousse un soupir. Faut pas qu'il fasse trop le fou parce que, quand ça va lui retomber dessus, il va parler couramment mandarin.

— Naël parle très bien, pourtant gros scoop : son père a le même sang que toi.

S'il y a bien un truc que le daron déteste, c'est qu'on nous compare avec Naël. Je suis archi d'accord avec lui sur ce coup là.

— Dans ce cas, fallait que t'élève des gosses avec Lucie, parce que, gros scoop : l'intelligence de Naël vient pas d'Idriss !

Je crois que c'est la fin, parce que ma mère vient de réprimer un sourire. Ouf. En général quand il la fait rire après ça passe.

— C'est peut-être ce que j'aurais dû faire, dit-elle pour avoir le dernier mot, Ça nous aurait évité de nous coltiner des familles entières de Akrour.

Au même moment un type déboite juste devant la voiture et mon père se voit obligé de piler violemment.

Chacun des passagers est propulsé en avant, et une quantité astronomique que jurons s'échappent des lèvres de toute la famille. Même Nej' qui vient d'être réveillée, lâche un :

Ce qu'on laisse à nos mômesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant