Chapitre 5. C'est pas un film

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"Qu'est-ce que tu crois, j'ai couru en crise comme à l'époque du cross
Priant le Christ que mes pêchés m'écrasent pas malgré mes crasses
Quand on devait du fric: qui pouvait protéger mes gars?
Les pneus qui crissent en bas de chez moi, la couleur grise du bâtiment
J'vais pas tir-men, j'étais en panique quand j'complotais chez Mekra
J'fais pas le voyou, je serais pas crédible
Plan séquence dans ma rétine, te raconter mon film voilà le triste but de ces lignes"

Un rapide bilan de ce que j'ai, un peu de shit, mon téléphone, mille balles en liquide. Bon, y'a pire. 

Mon premier réflexe, c'est de me débarrasser de la plus grosse partie de cet oseille, c'est plus dangereux qu'autre chose. J'envoie direct un message à Cheikh en lui disant qu'on doit se capter pour que je lui file sa partie. Il me donne aussitôt un rendez-vous pas trop loin du lycée, il commence à faire sombre. Je réfléchis vite fait à l'endroit où je peux passer la nuit. Je suis bien trop fier pour solliciter l'aide de qui que ce soit. Surtout la famille, surtout Nabil et Antho. 

Putain Cheick est en retard en plus, qu'est-ce qu'il fout ? 

C'est alors que je remarque un groupe de mecs un peu plus loin, je plisse les yeux en me demandant s'il fait pas partie du lot. C'est alors que je vois que Moussa est parmi eux. Bon. 

Je ne bouge pas, fumant tranquillement mon joint. C'est pas mon genre de fuir quand un mec qui me kiffe pas est dans les parages. 

Un des gars, que je reconnais parce qu'il est dans ma classe, me pointe du doigt, aussitôt Moussa relève la tête et ses yeux rencontrent les miens. Alors je comprends qu'à peine dehors, je vais devoir me taper avec un pauvre con. 

Ils sont cinq. 

Avec cinq pauvres cons. 

N'importe qui prendrait ses jambes à son cou et irait chouiner en demandant pardon devant la la porte de sa mère pour qu'elle lui ouvre. 

Mais moi je suis pas n'importe qui, je suis un Akrour, et je vais le prouver à mon père qui m'a sorti de la famille. 

Oui, je peux tenir dans la ur. 

— Qu'est-ce que tu veux ? je demande à Moussa, T'en as pas assez eu la dernière fois ?  

Le fait d'être à moitié foncedé doit m'aider à avoir aucun sens du danger que je suis en train de courir. J'ai pas peur. 

Toujours pas peur quand Moussa me traite de fils de pute. 

Toujours pas peur quand je me jette sur lui. 

Toujours pas peur quand les quatre autres me foncent dessus. 

Toujours cette adrénaline, toujours ce besoin d'en découdre. 

Sauf qu'évidemment, j'ai pas de pouvoirs magiques, et quand l'un d'eux me met une balayette et que je m'écroule par terre, je ne peux pas faire grand chose quand il se mettent à me rouer de coups de pieds dans les côtes. 

Je tente de me débattre et de protéger un minimum mon visage, mais rapidement Moussa tombe assis sur moi et m'attrape par les cheveux pour relever ma tête et ainsi permettre à ses gars de me frapper en pleine gueule. Je ne vois plus rien, aveuglé par le sang, assourdi par leurs cris, mes oreilles bourdonnent, les battements de mon coeur résonnent dans mon crâne. 

C'est quand ma tête est violemment cognée contre le trottoir que je perds complètement connaissance. 

*****

La douleur me réveille. Dans mon crâne surtout, j'ai tellement mal. Impossible d'ouvrir les yeux, mes paupières sont beaucoup trop douloureuses et mes cils collés par du sang séché. Je me passe la main sur le visage et constate qu'il est totalement boursouflé. Mon nez paraît cassé aussi. En tout cas le simple fait de l'effleurer me donne envie d'hurler. 

Ce qu'on laisse à nos mômesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant