Bonus #3 Iris

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Je suis à Paris depuis trois jours, d'habitude quand je débarque tout le monde m'envoie un message pour que je passe à droite et à gauche.

Là c'est comme s'ils avaient tous la gueule de bois.

Ilyes et Jade se sont séparés, on dirait réellement que la terre a arrêté de tourner. Hakim et Maya font la gueule, Deen et Violette sont inconsolables, surtout Deen, mes parents sont extrêmement déçus aussi.

À croire que personne ne s'intéresse à ce que ressentent les principaux concernés. Jade s'est enfuie dans le Sud et je la comprends, l'atmosphère pesante qui règne dans nos familles est à donner envie de se jeter dans la Seine.

Moi aussi je suis déçue, évidemment, j'aimais beaucoup leur couple. Mais depuis quelques temps je sentais que ça allait arriver, Ilyes n'était plus aussi heureux, ils s'embrouillaient sans cesse.

Mais quand même, il faudrait plutôt les aider à penser à autre chose et aller de l'avant.

Pour l'instant je n'ai toujours pas vu Ilyes, j'avoue que j'ai un peu peur que son état m'affecte plus que ce que je ne voudrais. La tristesse des personnes que j'aime a toujours tendance à m'imprégner et j'ai peur de finir dans le même état.

Maman est au téléphone avec Maya depuis vingt minutes et j'attends qu'elle raccroche pour qu'on puisse en discuter. Il est clair que je ne peux pas laisser mon meilleur ami se morfondre, mais j'attends d'en savoir plus.

Quand enfin elle lâche le téléphone, je lui jette un regard interrogateur et elle pousse un soupir.

— Il est méchant avec tout le monde, boit trop et refuse de parler de tout ce qui touche au sujet « Jade ». Maya se fait du souci mais bon tu connais Ilyes, quand elle l'appelle il décroche pas, quand elle passe chez lui il n'ouvre pas et fait comme s'il n'y avait personne, elle est même allée au garage et il a envoyé la secrétaire dire qu'il était débordé. 

Je grimace, c'est un comportement typique d'Ilyes. Une tour fortifiée de laquelle il est quasiment impossible de s'approcher.

Vu le dispositif de sécurité autour de lui, il est évident qu'il souffre beaucoup.

— Je peux essayer de le voir, dis-je, faut que j'arrive à me blinder pour ne pas être blessée par ce qu'il risque de me balancer.

Ma mère hoche la tête, l'air un peu inquiète.

— Garde bien à l'esprit que quoi qu'il dise, il ne le pense pas et que c'est simplement un mécanisme de défense. Et si c'est trop dur tu laisses tomber. Il ira mieux avec le temps, c'est tout frais encore.

Après avoir acquiescé et pris note de ses conseils, je me rappelle que j'ai rendez-vous avec Naël dans un café. Ça fait longtemps que je ne l'ai pas vu, depuis le mariage d'Amir et Ilham. J'irai voir Ilyes après.

Naël est penché sur un livre quand je le repère sur la terrasse, je souris en me rendant compte qu'il est vraiment le stéréotype du jeune professeur d'université en lettres modernes. Sa veste de costume est posée sur la chaise derrière lui, il a desserré sa cravate et mordille la branche de ses lunettes en écaille.

— Coucou, dis-je en arrivant à sa hauteur.

Mes yeux se posent avec un peu de mélancolie sur son alliance. Je ne sais si c'est parce qu'au fond j'aimerais qu'il soit toujours un peu libre, ou bien si c'est parce que je sens bien que je ne porterai jamais un tel anneau.

— Iris, dit-il en se levant.

Comme toujours ses cheveux lui tombent devant les yeux et il ramène ses boucles brunes sur son crâne avant d'hésiter un peu pour me prendre dans ses bras.

Ce qu'on laisse à nos mômesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant