Ce qu'on laisse à nos mômes

Chapitre 13. Bal Masqué

J'ai une boule au ventre pas possible depuis qu'Ilyes et Amir son partis au marché. J'ai proposé à Mamie de l'aider à faire des conserves mais je jette sans arrêt des regards furtifs à l'écran de mon portable.

— C'est gentil de la part des jumeaux d'être allés faire des courses pour moi. À Paris vous n'avez pas de bons légumes, tu pourras peut-être en porter à tes parents.

Dans deux minutes je vais avoir son chapitre habituel sur le fait que les parents devraient venir vivre en province. Elle insiste là dessus depuis des années. Je crois que Papa se laisserait bien tenter, mais pour l'instant avec le travail de Maman c'est compliqué.

— Vous pourriez avoir un jardin, une piscine. Léo a besoin de se dépenser, les jardins publics c'est juste bon pour attraper des maladies.

Les trois quarts de nos amis ont des maisons soit à la campagne, soit à la mer, soit à la montagne. Ils ne sont jamais à Paris pendant les vacances et on profite toujours des pieds à terre des uns et des autres. Nous vivons vraiment dans un milieu très privilégié, j'en suis parfaitement consciente.

— Tu sais avec le travail c'est compliqué Mamoune. Mais regarde, on peut venir ici tant qu'on veut. Et puis moi je crois que je ne veux pas vivre à Paris, j'aime bien ici.

Ses yeux bleus s'éclairent aussitôt.

— Tu viendras faire tes études à Marseille ou Aix, comme ça je t'aurai tous les week-end ici.

Oh je l'aime tellement.

Mon téléphone vibre et je me jette presque dessus, comme prévu Ilyes me tient au courant des avancées du plan.

"Cible repérée"

Je souris de son implication presque militaire dans sa mission. Reste le plus dur à faire : créer l'interaction.

Le plan prévu par Ilyes est simple, il lui rentre dedans bien encapuchonné et renverses ses paquets, tentant si possible de lui voler son sac. Amir arrive ensuite comme un sauveur, l'aide à ramasser ses affaires et lui propose de la raccompagner jusque chez elle. Après il se charge de créer une conversation et de poser des question indiscrètes.

Mon Dieu faites que ça fonctionne.

Manquerait qu'il y ait un gendarme ou un officier de police qui passe par là et qui attrape Ilyes au passage. Pitié non...

— Tu as l'air bien tendue ma nine ! Ça s'est mal passé hier à la plage ?

Oh non, c'était génial, l'eau était froide mais les jumeaux m'y ont jetée avant même que je n'aie eu le temps de la tester. Léonard a fait une grande partie de foot avec Ilyes et quelques gamins qui trainaient, avec Amir on a discuté au moins deux heures assis dans le sable avant de se joindre à eux. C'était une super journée de vacances qui m'a permis d'oublier un peu ce qui devait se jouer aujourd'hui.

Un nouveau message d'Ilyes me fait sursauter.

"Cible touchée, je fais les courses et je rentre."

Dois-je en déduire qu'Amir est occupé avec la mère de Nora ? J'espère. Si tout ceci n'a servi à rien je ne sais pas quelle autre piste exploiter. Je crois que je n'aurai pas d'autre choix que d'en parler à Mamie.

Quarante-cinq minutes plus tard Ilyes se pointe avec les bras chargés des courses commandées par ma grand-mère.

— Et ton frère ? Il est où ? demande-t-elle en le déchargeant.

— Il a aidé une vieille dame à ramener ses courses, répond-il en m'adressant un regard entendu.

Mamie s'extasie aussitôt sur la bonne éducation des jumeaux.