Chapitre 2

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— Mademoiselle, présentez-vous.

Elle s'agitait nerveusement sur sa chaise, et les regards de toutes les personnes présentes braqués sur elle n'arrangeaient rien.

— Je ne sais pas pourquoi je suis venue, bafouilla-t-elle avant de se lever.

Elle se dirigea d'un pas rapide vers la sortie.

— Attends !

Elle se retourna, le jeune homme qui était assis à la droite du responsable du groupe de parole s'était levé et l'avait suivie. Sans vraiment savoir pourquoi, elle interrompit sa fuite.

— Pourquoi t'es venue ? demanda-t-il quand il fut arrivé à sa hauteur.

— J'ai le Sida, répondit-elle.

Il sourit malgré lui.

— Moi aussi, comment tu t'appelles ?

— Charlotte.

Il hocha la tête. La jeune femme blonde en face de lui avait vraiment l'air à bout de nerfs.

— Si t'es venue c'est que t'as besoin de parler, tenta-t-il.

Elle hocha silencieusement la tête.

— Viens, dit-il en la ramenant dans la salle.

Ils s'installèrent sur des chaises, un peu à l'écart du reste du groupe. Il voyait qu'elle luttait tant bien que mal contre ses larmes.

— Ça fait combien de temps que tu sais que tu es malade ? demanda-t-il doucement.

— Un mois, répondit-elle.

Il hocha silencieusement la tête, rien d'étonnant a ce qu'elle soit dans cet état, se dit-il, l'annonce d'une telle maladie aurait été un choc pour n'importe qui.

— T'as quel âge ?

— Dix-huit ans, répondit-elle.

Vivre dix huit en parfaite santé mais devoir faire avec cette maladie pour le reste de sa vie...

— Tu sais, commença-t-il, moi ça fait vingt-deux ans que je suis séropositif, alors oui, parfois c'est dur mais avec les traitements qui existent aujourd'hui on peut vivre, et même plutôt bien.

Elle lui adressa un pâle sourire.

— Je comprends que ça te fasse peur, continua-t-il, mais je peux te garantir que tu ne vas pas mourir plus tôt que n'importe qui d'autre et que même si parfois tu seras pas bien ou fatiguée, t'auras pleins de bons moments.

Une larme coula sur la joue de Charlotte. Il remarqua alors les grands yeux bleus de la jeune femme.

— Tes parents sont au courant ? demanda-t-il à nouveau.

Il la sentit tressaillir. Après un effort pour se reprendre, elle lança.

— Mon père m'a mis une gifle en me traitant de trainée.

— Moi je suis sûr que t'es loin d'être une trainée.

La réunion avait pris fin. Ils se retrouvèrent tous les deux sur le trottoir. Il faisait beau en ce mois de juillet. Il hésitait à lui demander comment elle rentrait chez elle, il n'avait pas très envie de la laisser seule dans la rue, dans cet état.

— Tu rentres chez toi ? demanda-t-il finalement.

Charlotte eut un sourire passé, comme délavé par les larmes qui coulaient sans discontinuer de ses grands yeux bleus.

— Tu veux qu'on aille diner ? proposa-t-il.

— Diner ?

— Oui, répondit-il, manger le soir.

La Race du Pouvoir [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant