33. Le bon choix

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Samaé veut aller vivre à Lyon. Je n'ai pas su quoi lui répondre hier. Evidemment que la réponse sera oui. Mais quand ? Comment ?

Même si elle m'a bien précisé que ce n'était pas moi, je dois quand même digérer l'information. C'est étrange de savoir que notre petit train train va être totalement modifié. Que je ne verrais plus ma fille une semaine sur deux...

Le trajet se fait long. La requête de Samaé tourne en boucle dans ma tête. Je ne sais pas quoi en penser. Je me sens coupable et triste en même temps. J'ai peur. J'appréhende. Est-ce que je vais vraiment vivre loin de ma fille ? Comment vais-je pouvoir l'annoncer à Asher ? Est-ce qu'il va totalement sombrer ? Arrêter ses bonnes résolutions ? Est-ce que lui aussi va se sentir coupable ? Est-ce qu'il va nous en vouloir ? J'ai trop de questions... Mais je dois d'abord en parler à Alia.

Je sais déjà ce qu'elle va me répondre...

Soudain je secoue la tête. Je suis en train de conduire, et être dans mes pensées est particulièrement dangereux. Je risque de sortir de route ou de ne pas regarder un danger. Je dois chasser ces interrogations de ma tête et me forcer à me concentrer sur la route.

Je monte un peu la musique, pas trop, pour ne pas réveiller Samaé et je fixe mon esprit sur la route, comme j'aurai du le faire dès le départ.

***

Quand j'arrête le moteur, mes questions et craintes qui m'avaient gentiment laisser tranquilles sur le chemin m'assaillissent. Mon coeur bat beaucoup trop fort. Je détache Samaé mécaniquement et ne l'entends pas quand elle s'adresse à moi. Je redoute. Je redoute quelque chose mais je ne sais pas quoi. J'essaie de contrôler ma respiration et mes larmes. ça ne va pas.

Mais je ne veux pas que Samaé pense que ma réaction ait une quelconque incidence sur son envie et sa réalisation. Je redoute quelque chose mais ce n'est pas sa faute. Et je prendrais sur moi pour que mon enfant puisse grandir et se sentir au mieux dans le meilleur des environnements. Déjà que sa situation familiale est compliquée...

Nous sonnons et Alia nous ouvre. Samaé saute dans les bras de sa mère qui l'accueille avec la même joie. Quant à moi, je me force à afficher un sourire, le plus vraie possible. Il faut que je lui parle, mais je ne veux pas le faire tout de suite. J'ai besoin de me préparer... Mais Alia en décide autrement.

« Dis ma chérie tu vas ranger tes affaires dans ta chambre ? » demande-t-elle à notre enfant.

Samaé attrape sa petite valise et court jusqu'à sa chambre située au premier étage. Dès que l'on entend la porte claquer, Alia se tourne vers moi, plante son regard dans le mien, déterminée. Nous ne parlons, j'essaie de sourire, mais plus je me force et plus ça se voit. Plus je me force et plus mes yeux indiquent mon mal-être.

« Qu'est-ce qu'il se passe ?

— Rien. » je mens.

Elle m'inspecte, me sonde. Je pense qu'elle a compris dès la seconde où elle m'a vu.

«Arrête Emma, je sais parfaitement que tu ne vas pas bien. Tu baisses la tête. Ton sourire est plat. Tu gigotes. Il y a quelque chose qui te tracasses et comme tu as essayé de fuir mon regard donc je suppose que ça a un rapport de près ou de loin avec moi. »

Je la regarde. Silencieuse. Je n'ai plus le choix. Je prends de grandes respirations. Je n'arrive pas. Les mots ne sortent pas, et elle, elle attend. J'ai l'impression que je vais mourir. J'ai chaud. Mon coeur chercher à s'enfuir de ma poitrine. J'aimerais pouvoir m'enfoncer dans le sol et disparaître.

« Viens t'asseoir. Peut-être que bien installée tu arriveras à me sortir quelques mots. »

Je hoche la tête. Les mots restent coincés, ma gorge se serre.

Des Cendres sous les CieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant