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Si Dwight était venu à Trenwith, ce n'était pas par simple courtoisie

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Si Dwight était venu à Trenwith, ce n'était pas par simple courtoisie. Bien qu'Elizabeth soit une hôtesse charmante et attentionnée, c'était pour Phèdre qu'il avait fait le déplacement.

- Dwight ! s'exclama la concernée en le voyant entrer dans le salon. Que nous vaut cet honneur ? Francis et Elizabeth sont dans les champs, et James est en ville...
- Je ne suis pas là pour eux.
- Oh, fit la jeune femme d'une petite voix. Vous voulez boire un verre ?

Le médecin accepta et c'est dans le plus grand des silences que Phèdre lui versa une coupe de vin. Ils s'assirent à chaque bout du fauteuil et Dwight tenta de continuer la conversation.

- Vous semblez bien seule, n'avez-vous pas de dame de compagnie ?
- J'en ai une, elle arrive bientôt, sourit Phèdre en se souvenant de la lettre de Camille. Ma mère voulait qu'elle vienne avec moi, mais mon père préférait qu'elle reste avec mes sœurs.
- Quels âges ont-elles ?
- Ma demoiselle de compagnie, Camille, à dix-neuf ans, Isabeau à sept ans et Charlotte cinq.
- Vous et vos sœurs avez une assez grande différence d'âge, remarqua Dwight.
- Oui, mais ça m'a permis de pouvoir m'occuper d'elles. Elles sont tellement adorables, de vrais anges...

Le sourire de Phèdre s'estompa quelque peu.

- Elles me manquent. La joie d'être à Trenwith n'est pas assez forte pour combler la tristesse de les savoir loin de moi, dans une situation aussi tendue...
- Vos parents ne veulent pas retourner en Angleterre ?
- Mon père refuse pour l'instant. Avec un peu de chance, ma mère et mes lettres pourront le faire changer d'avis.
- Unir vos forces pour le bien commun, plaisanta Dwight en buvant une gorgée de vin.
- C'est ça.
- Puis-je vous poser une question... personnelle ?

Dwight vit un éclat de terreur briller dans les yeux de sa compagne, qui s'efforça de répondre avec sang-froid :

- Quel genre de question ?

Tout son corps était tendu, prêt à fuir si la situation l'en obligeait. Elle détestait cette sensation, celle de se sentir acculée, sur le point d'être brisée en quatre.

- Après cette soirée à Bodwin, qu'avez-vous dit à votre cousin ?
- Pardon ?
- Je vous ai donné son arme. Lorsque je me suis réveillé le lendemain, il l'avait de nouveau. Vous le lui avez rendu, vrai ?
- Oui.
- Pourquoi ?
- Je... J'ai parlé avec lui. Je lui ai donné toutes les raisons pour continuer de vivre. Mais vous savez, annonça gravement Phèdre, personne ne peut faire ce choix pour vous. Enlevez lui le revolver, s'il veut mourir, il prendra la corde.
- Vos paroles sont très noires pour une jeune fille comme vous.
- Am I lying thought ? Quand je lui ai rendu son arme, je savais qu'il ne se tuerait pas. Du moins, pas cette nuit. Il avait encore besoin de réfléchir. Et il semblerait que tout va mieux maintenant.
- Vous en êtes sûre ?
- Non. Je continue de garder un œil sur lui.

Dwight hocha la tête, impressionné par le tact et le sang-froid que possédait la jeune femme. Il décida de changer de sujet de conversation, pour trouver un thème un peu plus mondain.

- Êtes-vous prête pour le bal de ce soir ?
- Celui des Penvennen ? Bien sûr ! J'ai passé toute ma semaine à préparer ma robe, et celle d'Elizabeth. Ça va être mon premier bal en Angleterre, je dois être parfaite, s'amusa Phèdre. Avec un peu de chance, je trouverai l'homme de ma vie.
- Vous semblez bien pressée.
- À vrai dire, si ce n'était pour l'honneur de ma famille, me marier ne serait pas ma priorité... ou même un de mes objectifs.
- Laissez-moi deviner, vous voulez être une femme indépendante...
- Je peux toujours être une femme indépendante en étant mariée, remarqua Phèdre. Le problème est de trouver la bonne personne. Un mariage n'est pas forcément contracté par amour, mais il faut au moins que les deux partis puissent se supporter mutuellement avec gentillesse et amour platonique à défaut d'un amour véritable.
- Alors votre but ce soir est de trouver cette fameuse personne ?
- J'essaierai.

Ils furent coupé par l'arrivée d'une servante, qui tendit une lettre à Phèdre. Celle-ci l'ouvrit, les sourcils froncés, avant de se détendre en reconnaissant l'écriture de James.

- Le bateau de Camille arrive ce soir. Je ne pourrai pas l'accueillir, mais au moins je sais qu'elle sera bientôt en sécurité.
- Pourquoi dites-vous cela ? l'interrogea Dwight, surpris. Est-ce à cause de la révolution en France ?
- Pas que, soupira Phèdre en pliant la lettre et en la glissant dans sa poche. Comment expliquer cela... Un peu après que nous soyons arrivés en France, mon père est allé à l'ile de la Réunion, et il a rencontré Camille et ses parents. Son père est un abolitionniste et sa mère était une esclave, il a réussi à la libérer et il l'a épousé. Camille est née libre, et quand mon père est revenu à Paris, ils l'ont suivi. Camille est devenue ma demoiselle de compagnie et depuis elle vit chez nous.
- Vous êtes aussi une abolitionniste ?
- Tout le monde devrait l'être. Camille est la personne la plus douce et attentionnée que je connaisse, mais les hommes sont méchants et elle peut être très facilement prise pour cible.
- J'aimerai beaucoup la rencontrer...
- Venez prendre le thé demain, proposa Phèdre. Elle a déjà entendu vos exploits et je suis sûre qu'elle serait ravie de faire votre connaissance.
- Alors je reviendrai demain, assura Dwight en se levant.
- Serez-vous au bal de ce soir ?
- Je ne suis pas vraiment intéressé par ce genre d'événement.
- Pourtant vous auriez tout à gagner, le taquina Phèdre en l'emmenant vers la sortie, vous êtes un homme charmant, intelligent, ...
- Sans argent, compléta Dwight avec un sourire.
- Croyez-moi, certaines personnes n'en ont pas après votre argent.

Ils échangèrent un regard, et Phèdre détourna la tête en rougissant. Lorsqu'ils arrivèrent dehors, un valet les attendait avec les rênes du cheval de Dwight dans les mains. Le médecin sauta sur sa monture, adressa un dernier regard à sa compagne, et s'en alla au galop. Phèdre soupira en se massant les tempes. Qu'elle pouvait être stupide parfois.

Elle retourna à l'intérieur du manoir, bien décidé à se préparer pour la soirée. Elle devait être sublime, pour impressionner les invités, et en particulier un homme du nom de Warleggan.

𝑺𝒊𝒏𝒈𝒖𝒍𝒂𝒓𝒊𝒕𝒚Où les histoires vivent. Découvrez maintenant