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Tout était calme. Seule ma respiration bruyante et saccadée pour avoir couru rompait le silence. Sa moto était devant sa maison. J’ignorai si elle était à l’extérieur, car il souhaitait ressortir. Peu importe. Il était là. Et si je ne lui parlais pas maintenant, je ne le ferais jamais. Mais surtout, il serait trop tard. À moins que ce fût déjà le cas…

Je restai plusieurs minutes sans bouger, d’une, à reprendre mon souffle, de deux, à hésiter, essentiellement. Mes mains se tendirent plusieurs fois vers la sonnette, mais au dernier moment se baissèrent précipitamment. Je devais cesser de réfléchir, laisser libre cours à mon impulsivité. Celle-là même qui venait de me conduire devant la porte de Raphaël. J’avais les paumes moites et mon cœur tambourinait dangereusement dans ma poitrine quand mes doigts s’approchèrent et enfoncèrent enfin la sonnette. Je respirais de plus en plus mal. Les secondes me parurent longues tandis que mes yeux fixaient la porte qui restait hermétiquement close.

Et s’il n’ouvrait pas ? Si j’avais fait une erreur ? Si je m’apprêtais à tomber de haut une fois de plus ? Je reculai d’un pas, lorsque mes doutes prirent le dessus, prête à fuir tout cela, jusqu’à ce que je m’immobilise. Sans l’entendre, je le sentis s’approcher dans mon dos jusqu’à me toucher. Une douce chaleur se propagea dans mon corps, rassurante, tendre et forte à la fois. Je m’imprégnais de ce moment, laissais le temps au temps pour faire ce premier pas et profitais pleinement de ce premier contact. Doux et subtil. Nous restions ainsi sans bouger et l’atmosphère sembla se modifier, nous isolant de tout. Ses doigts vinrent caresser mes épaules nues, alors que son souffle m’effleura la nuque quand il prit la parole d’une voix légèrement éraillée, tout en sensualité. Aussi caressante que ses mains.

— J’ai cru que tu n’appuierais jamais.

— Je l’ai cru aussi.

— Pourquoi l’avoir fait dans ce cas ?

Sa voix était chaude, douce. Sa question m’obligeait à me dévoiler, mais sans me forcer. J’étais libre de répondre ou non. Libre de continuer ou non. J’avais le choix. Il le déposait entre mes mains, et j’étais la seule à détenir la clé des prochaines minutes. Son souffle se perdait dans mes cheveux tandis que ses mains remontaient le long de mes bras, centimètre par centimètre. Je rejetai lentement la tête vers l’arrière, l’appuyant contre son torse, puis l’inclinai, lui offrant ainsi mon cou. En réponse à mon geste, ses lèvres s’y posèrent, frôlant ma peau en une douce torture, et je fermai les yeux sous la volupté de ses caresses. Il déposa une pluie de baisers légers, les espaçant de plusieurs secondes. Et chaque seconde était un supplice. Je voulais ses lèvres contre moi, sur mon cou, sur mon corps. Ce n’était pas qu’un simple désir physique. J’avais besoin de Raphaël, de tout ce qu’il était.

Je redressai la tête à contrecœur pour mieux apprécier la suite. Je me tournai et me mis face à Raphaël. Ses bras s’enroulèrent autour de moi, m’attirant doucement contre lui, tandis que je posai mes mains sur son torse, et je frissonnai devant le regard qu’il m’envoya.

— Parce que je veux vivre. Je ne me suis jamais sentie aussi vivante que lorsque je suis avec toi…

— Et… ?

Nouvelle question, nouveau choix. Le mien.

Poursuivre ?

S’arrêter maintenant ?

Je passai une main derrière sa nuque jouant avec ses cheveux encore humides de la douche, pour l’attirer à moi tout en me hissant sur la pointe des pieds. Ses lèvres s’étirèrent en un discret sourire auquel je répondis. Tout me semblait si facile à cet instant, si évident. Des mots remontèrent dans ma mémoire et prirent tout leur sens.

L'envol fragile du papillon  Où les histoires vivent. Découvrez maintenant