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Margot m’assaillit de questions tandis que Jo et Mado souriaient à s’en décrocher la mâchoire. Et moi, j’angoissais à l’idée de rencontrer la fille de Raphaël le lendemain même. J’avais prévu de lui offrir un livre en rapport avec ses études de commerce qu’elle débuterait à la rentrée scolaire, mais je ne pouvais pas ignorer le stress que je ressentais.

Raphaël vint me chercher le samedi à 18 h 30. Nous avions tous les deux fermé plus tôt et je me retrouvais accrochée à Raphaël, la tête entre ses épaules à rouler en direction d’Avignon. Heureusement, le déplacement en moto était une nouveauté pour moi, et passés les premiers kilomètres, même un peu tendue, j’appréciais maintenant pleinement le trajet. On traversa la ville sans trop de difficulté. Seule la chaleur épouvantable du moteur qui nous remontait le long des jambes lorsque l’on s’arrêtait à un feu ou un croisement était un supplice. Mais en moins de dix minutes, nous étions devant l’immeuble de Caroline.

Je descendis de moto, un sourire barrant mon visage. J’avais adoré les sensations. Au-delà de la vitesse, c’était cette ivresse d’être libre. Et aussi, je devais faire entièrement confiance en Raphaël. Et celle-ci, je m’aperçus que je la lui avais accordée il y avait déjà bien longtemps.

Je me tournai vers lui alors qu’il ôtait son casque et me jetai à son cou.

— Oh, là, là ! C’était génial ! m’exclamai-je avec enthousiasme.

Il répondit à mon euphorie en m’attrapant par la taille et me serrant contre lui.

— On remet ça bientôt alors ?

— Oui. J’en veux encore !

Ses yeux prirent une teinte plus sombre et je réalisai le double sens de ma phrase.

— Tu sais que ce sont des mots qu’il ne faut jamais prononcer devant un homme, jolie blonde.

— Je tâcherai de ne pas l’oublier.

— Oui, surtout quand cet homme est fou amoureux.

Je lui rendis son sourire et déposai un baiser rapide sur ses lèvres avant de reprendre plus sérieusement, sentant mon ventre se contracter.

— Tu crois que je lui plairais… ?

— Je lui ai déjà tellement parlé de toi. Et puis, c’est Caroline qui est à l’initiative de ce repas. J’ai simplement joué les intermédiaires.

Sa réponse me souffla. Mais il n’avait probablement pas dû être objectif en parlant de moi et mes craintes s’intensifièrent.

— Rassure-toi, ma belle. Je n’ai pas forcé le trait. Je lui ai aussi parlé de ton côté buté, s’amusa-t-il à ajouter.

— Mon Dieu ! Tu étais dans ma tête à l’instant ?

— Presque. Je te connais, c’est tout. Arrête de te tracasser.

Il ponctua le tout d’un baiser sur le bout de mon nez avant de m’entraîner dans l’immeuble.

— Que j’arrête, marmonnai-je. Facile à dire.

Mes doutes et mes craintes s’envolèrent à peine la porte franchie. Une jeune femme magnifique nous ouvrit. Elle se jeta dans les bras de son père, et l’image de purs tendresse et bonheur qu’ils dégageaient s’imprima au plus profond de ma mémoire.

Grande, comme Raphaël, les mêmes cheveux. Mais ce qui me troubla le plus fut cette ressemblance. Au-delà des traits, c’était toute une attitude que je retrouvais chez Caroline. Des expressions que je connaissais de Raphaël et qui se retrouvaient chez sa fille. Les deux étaient indéniablement proches et complices. Et je craignais que ma présence modifie cette relation.

L'envol fragile du papillon  Où les histoires vivent. Découvrez maintenant