36

421 31 0
                                    

Je n’aurais su dire ce que pensaient mes clients en me voyant un sourire extatique aux lèvres tout au long de la journée. Il ne me quitta pas lorsque je pris une douche et passais plus de temps que d’habitude à me préparer, et ce jusqu’à ce que je rejoigne Raphaël en utilisant les chemins de traverse.

Je n’eus pas le temps de sonner qu’il ouvrit la porte et m’attira à l’intérieur. Je devinais l’impatience de me retrouver dans sa manœuvre, et non la possibilité que l’on puisse se faire surprendre. Ce qui me ravit. Il me plaqua contre lui pour me prendre dans ses bras, et l’impatience se transforma aussitôt en un instant très tendre, très tactile. Je passai mes bras autour de sa taille et posai ma tête contre sa poitrine. Nous restions enlacés, les mots étant inutiles, nos gestes parlaient d’eux-mêmes. Sa main descendait et remontait doucement le long de ma colonne, me provoquant de merveilleux frissons. Je fermai les yeux, appréciant le plaisir simple de nos retrouvailles. Un moment de complicité, où un lien se tissait, aussi fort et puissant que ses mots étaient doux et veloutés lorsqu’il murmura à mon oreille :

— Tu m’as manqué aujourd’hui.

Je resserrai un peu plus mes bras puis relevai la tête et la sincérité que je lus sur son visage me bouleversa.

— Toi aussi, tu m’as manqué.

Je dégageai ma main pour la passer sur son visage, en dessiner les contours, m’attardant sur ses lèvres qui embrassèrent le bout de mes doigts. J’appréciai le léger picotement de sa barbe naissante. Cette même barbe qui avait tracé de délicieuses marques sur la peau fine de ma poitrine. Raphaël baissa la tête pour déposer un baiser sur mes lèvres. Chaste et délicat… un peu frustrant même, ce qui ne lui échappa pas et le fit rire.

— Madame est exigeante ?

— Monsieur est radin, bougonnai-je malgré moi.

En réponse, ses mains entourèrent mon visage et il fondit sur ma bouche, me donnant le plus renversant des baisers.

— Madame est satisfaite ?

— Monsieur est sur la retenue, me semble-t-il.

— Crois-moi, mes intentions sont très loin d’être pures et conventionnelles, murmura-t-il contre mes lèvres.

Je ne pus réprimer un frisson, qui là encore n’échappa pas à Raphaël.

— Mais pour le moment, à table ! enchaîna-t-il en m’entraînant à sa suite.

— Euh… à table ! Sur la table, ou de façon plus civilisée ?

Ce qui eut pour mérite de le faire rire. Il se tourna vers moi, retrouvant son sérieux, et la lueur de désir que je lus dans ses yeux me fit avaler ma salive de travers.

— J’ai bien l’intention de te prouver que tous les repas sont importants. Mais pour le moment, il faut que tu prennes un peu de poids. Tu es trop mince.

— Je ne suis pas mince ! Je suis menue, c’est différent. Et ne me regarde pas avec tes yeux de médecin.

— Je peux t’assurer que ce n’est pas le cas, répliqua-t-il.

Mes protestations restèrent vaines, et il me fit asseoir sur le canapé. J’observai, abasourdie, mais aussi avec envie, le plateau qu’il avait préparé et posé sur la table basse du salon. Tout un assortiment de jambons, de pains, de fruits était disposé. J’ôtai mes chaussures et descendis du sofa pour m’installer sur le tapis. Raphaël me rejoignit, une bouteille de vin et deux verres à la main. Je le regardai me servir et acceptai le verre qu’il m’offrait, mais me sentis d’un coup, empruntée. J’aurais dû refuser.

L'envol fragile du papillon  Où les histoires vivent. Découvrez maintenant