Ravage [Hisoka x Illumi]

Chapitre 5 - Extorsions

[ILLUMI]

Hisoka poussa la porte de son appartement. Celle-ci émit son petit grincement caractéristique que je connaissais par cœur. À seulement seize ans, il avait obtenu son propre studio. L'endroit était très médiocre, minable et étriqué, mais c'était à lui. C'était ce qui comptait ; l'indépendance, même partielle.

L'appartement se découpait en deux pièces principales, sa chambre et le reste. Il y avait aussi une minuscule salle de bain entièrement carrelée de dalles laiteuses et froides.

J'avançai vers le vieux sofa de cuir brun fatigué. C'était le tout premier meuble que l'on remarquait en entrant, le plus imposant. Devant celui-ci, pas de télévision, ni de commode, simplement une table d'appoint, effet chêne blanchi, constellée de taches de café. Et puis des livres. Partout. Hisoka n'en possédait pas tant que ça, mais il les éparpillait dans tous les coins de son studio. Des livres achetés, empruntés, troqués, volés, trouvés. Il fallait baisser la tête en avançant, regarder où l'on mettait ses pieds. Au fond de l'appartement, il avait tout juste de quoi faire chauffer de l'eau : un évier, une gazinière vieille d'au moins quarante ans, un micro-onde, et un petit réfrigérateur.

La première visite de son studio, il y a de cela deux ans, m'avait permis de saisir la disparité de nos deux vies. Pourtant jamais je n'avais ressenti la moindre pitié à l'égard d'Hisoka. Il ne s'était jamais plaint, n'avait jamais formulé la moindre remarque à propos de nos deux situations. À ses yeux, cela n'avait pas la moindre importance.

- Qui s'occupe du dîner ? demanda-t-il en jetant sa veste sur le sofa où je m'étais étendu.

- Toi, déclarai-je en fermant les yeux.

- Tu as des arguments ?

Je relevai la tête vers lui.

- Tu me dois bien ça, dis-je. Il souffla du nez et hocha la tête.

- Je m'occupe de tout. Reste là.

J'écoutai un instant le son des pas d'Hisoka sur le plancher. Mes paupières se fermèrent dans un souffle.

Mes yeux s'ouvrirent sur une pièce sombre. Je me redressai en étirant mes bras. Je m'étais assoupi. Mon regard se porta vers l'étroite baie vitrée qui se trouvait à l'exact opposé de la porte d'entrée, au fond de la cuisine. Elle s'ouvrait sur un balcon exigu qui laissait à peine assez de place pour deux personnes debout. À travers la vitre, le soleil descendait rapidement. J'avais donc dormi si longtemps. Mes yeux firent alors le tour de la pièce ; Hisoka n'y était pas.

Je me levai en soutenant le bras engourdi sur lequel j'avais posé ma tête. Peut-être s'était-il lui aussi assoupi ? D'un coup d'épaule, je poussai la porte de sa chambre. Les rideaux étaient tirés mais il y avait assez de lumière pour deviner que la pièce était vide elle aussi. Cette dernière était composé d'un lit deux places recouverts de draps blancs. Ici encore le sol était jonché de livres mais pas uniquement : la chambre, c'était également l'endroit des CD. Pas de vinyles, ni de plateformes de streaming. Juste des petits disques, alignés à même le sol contre le mur au pieds de son lit, à quelques centimètres du lecteur CD.

Hisoka mettait de la musique parfois. Mais cela n'arrivait pas souvent. Pas qu'il n'appréciait pas en écouter, c'était plutôt ma présence qui l'en dissuader je pense. Ou peut-être pas. Enfin, il y avait quelque chose. Je refermai la porte.

- Hisoka ? appelai-je, conscient que je n'avais pas parler assez fort pour que celui-ci, où qu'il soit, ne m'entende. L'idée qu'il soit finalement sorti germa dans mon esprit.