Chapitre 20 - Maintenus

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[HISOKA]

« Je m'en fous, ce n'est pas moi. »

Les jours de cours suivants les derniers événements furent déroutants. Illumi ne daignait plus m'adresser ne serait-ce qu'un regard, il se contenta de hocher la tête lorsque je parlais ou emmètre des petits sons distraits. Parfois, il allait jusqu'à m'ignorer, peut-être pas délibérément mais cela suffisait à blesser mon ego. Ryo, quand à lui agissait comme si rien ne s'était passé en public et flirtait discrètement avec moi. Je ne fournissais d'ailleurs qu'une mince participation à son petit jeu. Je m'étais si vite lassé de lui, enfin ce n'est pas comme si il m'avait déjà intéressé. 

Petit à petit, les choses se remboîtaient juste comme avant ; Illumi et ses soupirs agacés accompagnés de regards glaciales et Ryo, lointain personnage qui revenait parfois hanter les esprits lorsque que son image apparaissait devant nous.  Je ne parlais pas de lui à Illumi : je n'en avais ni la force, ni l'envie à vrai dire. Nous nous satisfaisions mutuellement avec d'une part, mes plaisanteries et piques ordinaires et d'autre part, ses rares commentaires sarcastiques et ses petites soufflements de nez irrités. Je riais et il me regardait rire ; le parfait équilibre.

Cependant, j'avais l'incommensurable désir de détruire cette plénitude en y mettant le feu. J'avais goûté à Illumi, assisté à une anomalie de notre amitié, et j'en voulais plus. J'avais enfin la possibilité de  dévier de ce chemin fraternel étouffant et ennuyant à souhait. Je n'ai jamais été du genre à me contenter d'une simple camaraderie affectueuse et Illumi m'avait, malgré lui, fait remarquer que j'avais été plus que patient avec lui. 

J'étais seul chez moi. Ce qui n'était pas très courant un vendredi soir. 

Je reçus alors un message provenant d'un de mes nombreux amis  :

« Soirée chez moi ce soir, tu viens ? » 

« Je ramène à boire. »

Je m'arrêtai un instant pour réfléchir.

« Je peux amener quelqu'un?  »

« Si tu parles d'Illumi, je te souhaite bonne chance pour le convaincre. »

« Je peux être très persuasif. »

« J'en doute pas une seconde. »

Je rejetai mon téléphone sur le canapé où j'étais alors avachi et m'étirai tranquillement en réfléchissant.

Si Illumi venait, peut-être que le malaise se dissiperait.
Je lui envoyai aussitôt un message lui intimant de me rejoindre chez moi tout de suite. Naturellement, il refusa. Je fis croire à une urgence et après avoir insisté encore et encore, il finit par accepter. Je ne lui avais évidemment pas préciser la raison pour laquelle je demandais si expressément à le voir. Sinon j'aurais pu dire au revoir à mon projet de l'emmener à cette stupide fête.
Cependant, ce genre de demandes mystérieuses étaient plutôt courantes, et Illumi ne se posait visiblement plus de questions.

Et c'est ainsi que vingt minutes plus tard, je pouvais apercevoir la frêle silhouette d'Illumi au pied de mon immeuble en me penchant de la fenêtre de ma chambre.

Je ne lui laissai même pas le temps d'appuyer sur le bouton de l'interphone que je lui hurlai de ma fenêtre de m'attendre ici, car je descendais tout de suite. Je me précipitai vers la porte m'arrêtant un instant devant la glace pour vérifier mon apparence, mes cheveux étaient totalement retombés. Peu importe. J'attrapai une bouteille en passant.
Je pris tranquillement l'ascenseur, et quelques minutes plus tard, je me retrouvai face à Illumi.

Je ne le saluai pas pour accentuer le «mystère», puis je me mis à marcher tranquillement. Illumi me suivit sans dire un mot mais finit après quelques secondes, par me demander où nous allions, en jetant un regard à la bouteille que je tenais. Je lui répondis innocemment la stricte vérité : je l'emmenais à une fête. Il s'arrêta de marcher à peine eus-je fini ma phrase. 

« — Une fête ? 

— Tout juste, dis-je en me retournant pour lui faire face. 

 Non merci. 

Je m'approchai de lui plantant mes yeux dans les siens.

 Oh allez, tu es toujours tout crispé. Ça va te détendre, tentai-je.

 Non, je n'irais pas, répondit-il, indifférent. Je le détestais parfois. 

Puisque c'était comme ça, j'allais la jouer bassement. Je m'approchai lentement de son oreille.

 Mais tu me dois quelque chose, tu te rappelles Illumi ? »

Evidemment, il ne répondit rien, il se contenta de me fixer. Je savais qu'il avait compris. Ses yeux à eux-seuls me transmettaient toute la haine qu'il éprouvait pour moi à cet instant. Je continuai à lui sourire faussement. Illumi me lâcha finalement des yeux, passa à cotés de moi en accélérant le pas et se remit à avancer. Je le suivis sans un commentaire, jubilant en silence.

La maison où avait lieu la fête n'était pas si loin de mon appartement. Cependant les deux kilomètres à parcourir avec Illumi de mauvaise humeur semblait légèrement compliqués à endurer, même pour moi. J'appréciais mettre en colère Illumi, mais je n'aimais pas qu'il le reste. Contradictoire, je sais.

Enfin, faire la conversation tout seul, c'était moyen et son silence ne m'amusait plus. Ainsi, je soupirai bruyamment et accélérai le pas; au moins lorsque nous serions arrivés, on me répondrait quand je parlerais. 

Comme prévu, lorsque la porte s'ouvrit, des bruyantes exclamations commentèrent mon arrivée. J'entendis Illumi soufflait du nez sèchement. Il était agacé. J'attrapai alors un verre que l'on me tendait et l'imposa à mon petit Illumi :

« —Détends-toi, glissai-je contre son oreille.

Il baissa lentement les yeux vers le verre que je venais de lui donner si gentiment. Il releva ensuite son visage vers moi. Je ne pouvais dire ce qu'il pensait alors je me contentai de lui sourire.

  À plus ! » lui lançai-je nonchalamment, en m'éloignant, entouré d'un petit groupe de personnes. 



[ILLUMI] 

Je le suivis des yeux un instant alors qu'il s'éloignait. Son rire résonnait contre les murs, remplissant la pièce de sa présence et forçant chaque personne présente à le regarder. Il rayonnait. Je ne le quittai pas des yeux; je n'avais pas bougeai depuis mon arrivée et il était déjà assis sur un sofa le bras autour des épaules d'une fille que je connaissais vaguement, occupé à boire, à rire et à faire rire. Je regardais ce "spectacle" lassé. Ce n'était pas la première fois, ni la dernière; Hisoka agissait toujours de façon équivoque. Lorsque qu'il t'accordait un bout de son attention, tu étais le centre du monde. Cependant au moment même où il cessait de te regarder, tu te demandais ce que tu avais fait de mal, si tu avais agi d'une façon ou avais fait quoique ce soit qu'il lui avait déplu. Et puis avec le temps tu apprends que ce n'est pas toi, c'est lui. Peu importe le temps ou la personne, il finira toujours par se détourner. 

Mon cas était différent. Je ne sais comment mais il s'était attaché à moi. Je ne savais même pas s'il s'était attaché à moi à vrai dire. Je l'aie laissé faire et l'ais observé pour le comprendre. J'aie bien réussi à saisir son mode de fonctionnement oui, mais lui, jamais je n'ai réussi à vraiment le comprendre. 

Je détournai furieusement les yeux et avalai le liquide qui s'agitait au fond de mon verre. 

D'une certaine façon, je m'étais moi aussi attaché à Hisoka. 



















Ravage [Hisoka x Illumi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant