[ILLUMI]
Hisoka et moi, regardant droit devant nous, main dans la main.
Depuis cet instant, cette matinée où ses doigts avaient accrochés les miens avec autant d'adresse que d'affection, tout avait changé. Je l'avais déjà dit ça, que tout avait changé. Mais maintenant, maintenant...
Hisoka et moi. Moi et Hisoka.
Plus personne, seulement nous. L'autre n'existait plus.
Nous allions en cours, nous touchions en soupirant cachés derrière des portes, passions le plus clair de notre temps libre ensemble. C'était Hisoka qui insistait pour que l'on se voit, et je souriais comme un imbécile derrière mon écran quand il me prévenait de son arrivée chez moi ou me demandait de le rejoindre. Notre amitié évoluait à une vitesse folle, très vite, lui autant que moi semblions ne plus pouvoir nous passer l'un de l'autre.
Et puis il y avait le sexe évidemment.
Nous n'allions que rarement jusqu'au bout mais chacune des fois que nos peaux rentraient en contact, c'était si fabuleusement prenant que je ne voulais plus que cela s'arrête. Je vivais finalement.Un après-midi durant lequel ni lui ni moi n'avions cours, Hisoka m'envoya un message. Nous nous appelions jamais. Je détestais les coups de téléphones, je le lui avais dit; il ne m'envoyait plus que des textos.
« Viens. »
En fixant l'écran de mon téléphone, je fronçai les sourcils.
« Où est-ce que tu es ? »
« Devine. »Je soupirai.
« Six pieds sous terre. »
« Je suis devant chez toi, Illumi. »
« Devant le portail ? »
« Devant la porte. »Aussitôt que j'eus lu ces mots, je me redressai en bondissant presque du lit dans lequel j'étais allongé. Naturellement j'étais chez moi, naturellement il le savait.
Sans rien lui répondre de plus, je me précipitai hors de ma chambre. Je m'arrêtai cependant dans ma course devant un grand miroir qui se trouvait dans le couloir depuis plus longtemps que j'existais. De mes doigts, je voulus arranger mes cheveux en replaçant quelques mèches. Finalement, après réflexion, je me rendis compte à quel point ce que j'étais en train de faire était ridicule. Je continuai alors mon chemin jusqu'à la porte d'entrée, en m'efforçant d'avancer tranquillement.
Ma mère me lança un regard interrogateur lorsque je passai devant elle, d'un pas saccadé et tout sauf naturel. Je ne lui adressai pas la parole et sortit de la pièce le plus rapidement possible avant qu'elle ne m'interroge sur mon comportement étrange.
Mes parents connaissaient Hisoka. Ma mère l'aimait beaucoup mais avait pourtant tendance à ne pas le reconnaître tout de suite quand elle le voyait. Peut-être à cause des cheveux d'Hisoka qui changeaient, soyons honnête, très souvent de couleur. Ma mère était, tout comme mon ami, du genre extravagant. Qui se rassemblent s'assemblent, que voulez-vous ?
Pour ce qui est de mon père, je ne savais pas ce qu'il pensait d'Hisoka. Il n'exprimait ses opinions que très rarement à vrai dire. Mais s'il avait épousé quelqu'un comme ma mère, le fait que je sois ami avec quelqu'un comme Hisoka ne devait pas le déranger.Enfin, ils ne savaient pas que notre relation, à Hisoka et moi, avait évolué. Et je ne comptais pas leur en parler.
Devant la porte d'entrée, je pris une grande inspiration pour faire disparaître ce sang qui battait bruyamment à mes tempes. Enfin, ce n'est qu'Hisoka, me répétai-je machinalement en silence. D'un geste, je poussai la poignée vers le bas avec un calme tel que je mettais au défi n'importe qui de se rendre compte de la vitesse à laquelle mon pouls pulser.
Comme il l'avait écrit, je trouvai Hisoka tout souriant derrière ma porte d'entrée, en haut des marches de pierre, se balançant alternativement sur ses deux jambes. À peine eus-je ouvert la porte, mon ami se pencha dans ma direction, renversant le haut de son corps en avant. Je me retins d'effectuer un pas vers l'arrière.
« — Je t'ai manqué ? lança Hisoka d'emblée, sans même une salutation.
Je soufflai du nez et le dépassai avec dédain pour sortir de chez moi, fermant la porte de ma maison.
— L'espoir fait vivre, » déclarai-je, avec un sourire ironique, en laissant glisser ma main sur son épaule.
« — Pourquoi es-tu ici, au fait ? lui demandai-je. Nous marchions maintenant côte à côte le long d'un des nombreux sentiers tracés sur toute la surface de mon jardin. À part la large allée principal très bien entretenue, le reste de la propriété était recouverte d'une dense forêt d'arbres de taille moyenne au feuillage clair, entrecoupée de ces étroits chemins de terre pâle sur lesquels Hisoka et moi vagabondions.
Une moue revêche aux lèvres, il soupira.
— J'avais envie de te voir. Ce n'était visiblement pas réciproque...
Bien que je sus qu'Hisoka faisait clairement exprès de se la jouer tragique. Dramatiser et exagérer étaient, pour ainsi dire, sa spécialité. Je levai les yeux au ciel, pourtant je ne réussis pas à réprimer ce sourire qui fleurissait déjà sur mes lèvres. Le fait qu'il ait souhaité me voir, qu'il soit venu jusque chez moi remplissaient mon âme d'une étrange légèreté.
— Arrête avec ton mélo-dramatisme à deux balles, ricanai-je.
Hisoka me traita de sans-cœur d'une fausse voix fluette, comme s'il était au bord des larmes. Nous rîmes ensemble. Hisoka se rappela quelques minutes après de l'étang qui s'étendait dans un coin de la forêt, au milieu d'une petite clairière.
— Tu veux y aller ?
— S'il-te-plaît !
— D'accord. »Assis dans l'herbe verte, je fixais les reflets aveuglants du soleil qui se réfléchissait sur le minuscule plan d'eau au bord duquel nous nous trouvions. De ridicules moucherons voletaient au dessus du liquide aux teintes verdâtres.
Mon ami lui demeurait allongé, près de moi. Depuis quelques minutes, je l'entendais chantonner doucement un air familier. Je soupirai par le nez, parfaitement calme et m'étendis contre lui, de sorte à ce que son épaule nue se retrouve accolée à la mienne, couverte. Hisoka portait un genre de débardeur d'un blanc immaculé; rien que le regardant, on pouvait deviner sa peau blême en dessous de ce haut. Le large pantalon de toile, d'un blanc cassé cette fois, qu'il portait accentuait la forme de sa taille marquée.
« — Qu'est-ce que tu chantes ? l'interrogeai-je après m'être allongé près de lui dans cette herbe mi-haute. Je l'observai sourire.
— Le Mal du Pays, Liszt.
Surpris qu'il apprécie ce genre de musiques, je me tus un instant, dubitatif. Un petit rire m'échappa pour je-ne-sais quelle raison. Peut-être je me moquais de lui ou peut-être étais-je simplement heureux.
— Quoi ? m'interrogea-t-il en souriant. Mais quoi ? répéta-t-il avec plus d'insistance voyant que je ne me calmais pas, au contraire. Son sourire s'élargissait à mesure que mon rire devenait bruyant. Finalement nous rîmes ensemble jusqu'à en avoir mal au ventre. Nous finîmes tout de même pas retrouver notre souffle.
— Je peux t'embrasser ? dit-il soudainement, un demi-rire toujours flottant sur son visage, alors qu'il s'était redressé sur son coude et se penchait déjà vers moi.
— Ne demande pas, » murmurai-je, le souffle court, tout contre sa bouche.
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Ravage [Hisoka x Illumi]
FanfictionHisoka et Illumi se fréquentent depuis les prémisses de leur adolescence. L'un est de ceux qui attirent, de ceux dont on refuse de détacher le regard, aussi fascinant que malsain. L'autre est l'ombre, il est celui qui observe et analyse; efficace, i...