Chapitre 37 - Niais

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Peu importe. Ma langue glissa dans sa bouche. Peu importe. Je resserrai ma prise autour de sa taille. Peu importe. Nos nez se frôlaient férocement. Mais peu importe. Ce n'est que du sexe.

[ILLUMI]

C'était plus que du sexe.

C'est ce que j'avais essayé de lui prouver en faisant ce que j'avais fait. Ces gestes, ce que je lui avais offert, tout cela avait tellement de signification. J'avais toujours peur qu'il parte et pourtant, je commençais à croire qu'il ne le ferait pas.

Peut-être que j'étais réellement spécial comme il me l'avait répété. En un mois, Hisoka m'avait fait vivre les moments les plus intenses de mon existence. Jamais je ne le lui avouerai en face. Mais rien n'était plus vrai.

La façon qu'il avait de me prendre la main, de m'écouter en souriant lorsque je parlais, de dégager ma vue en coinçant des mèches de mes cheveux derrière mes oreilles... Toutes ces choses qu'il faisait et qui me donnaient malgré moi, l'envie de me lever le matin. Hisoka avait ce pouvoir.

La fin de l'année approchait et notre séparation avec. Je savais bien qu'Hisoka restait ici pourtant je préférais ne pas y penser. Je ne pouvais m'empêcher de penser au temps que lui et moi avions perdu. Où peut-être avions nous besoin de ce temps justement.
Qu'allait-il se passer quand je partirai ? Je n'en savais rien, et préférais ne pas y penser en fait. Je ne m'autorisais pas même à compter les jours qui nous séparaient d'août, mois au cours duquel je quitterai définitivement cette ville au profit de York Shin, la capitale.

« — Joyeux anniversaire, dis-je pour la seconde fois, en m'asseyant à ses côtés. Hisoka passa le bras autour de ma taille et murmura un simple mais significatif merci au creux de mon oreille. Ses lèvres se mouvaient si près de cette dernière que ses cheveux chatouillaient ma tempe. Je souris alors qu'il tourna la tête, pensif.

Hisoka demeurait silencieux. Le doute commença à m'assaillir ; avais-je été si mauvais que ça ? Peut-être que j'avais été trop brusque ou pas assez ? Comment savoir ? Il avait dit avoir aimé. Beaucoup. Alors pourquoi diable ne disait-il rien ?

Tu comptes dormir ici ? lui demandai-je un peu sèchement. Mes yeux le fixaient avec un peu trop d'insistance. Je me sentais trahi, pourtant il n'avait rien dit ou fait de mal.
Quelque chose clochait définitivement. Ma question ne provoqua aucune réaction de son côté. À ce moment-là je fus affreusement vexé. Si nous avions été chez lui, je serais parti en claquant la porte. J'aurais aussi pu le laisser là, assis sur mon lit, seul, absurde et ridicule. Mais non. Je ne souhaitais plus m'enfuir à présent. Si bien que ma main se posa sur la sienne.

Tu restes dormir ? répétai-je. Son attention, je l'avais maintenant.

Les yeux se rencontrèrent et le monde changea.  Et son regard m'inquiétait.

Oui, je reste. »



Allongé sur le dos, le noir complet de la nuit m'encerclait. Hisoka dormait, tourné vers moi. Son visage m'était invisible mais il était gravé sur ma rétine, comme un avertissement, ou une envoûtante menace. Je n'avais qu'à fermer les yeux pour le voir. Et pourtant je ne le fis pas. Je gardais mes yeux grands ouverts, dirigés vers la plafond, faisant de mon mieux pour rester parfaitement immobile. Car un seul battement de cils et la larme s'échapperait. Et dès lors que cette eau salée glisserait sur ma joue, je me noierai. Parce que je savais. Ce sentiment, c'était ce que décrivaient les livres, les poèmes et les films.

C'était constamment, systématiquement, continuellement lui.

J'avais conscience l'affection nouvelle que je portais à Hisoka pourrait nuire à mon futur. Mes parents me l'avaient répété bien assez de fois : les relations aussi bien amoureuses qu'amicales n'étaient rien d'autre que des pertes de temps. Elles ne serviraient qu'à me déconcentrer et à porter atteinte à mes résultats. Autrement dit, elles pourraient compromettre mon avenir.

Mon père ainsi que ma mère toléraient Hisoka. Peut-être car ils avaient su voir à quel point ce garçon était intelligent. Lui-même ne semblait pas s'en rendre compte. Et puis c'était seulement une amitié, quelque chose de superficiel et passager, enfin c'est ce que mes parents devaient penser.

Pourtant, à mes yeux, c'était maintenant bien plus. Et c'est cela qui m'inquiétait.

Je finis par cligner des yeux. Retenir ses larmes était en fait une tâche bien complexe. Je manquais très clairement d'entraînement.

Et c'est ainsi que mon oreiller fut mouillé, je pleurais, mais dans le plus grand des silences. Mes larmes insonores et la respiration régulière d'Hisoka. Un tableau des plus romantiques, pensai-je en me rappelant de poèmes français du dix-neuvième qu'Hisoka m'avait fait lire. Funeste passion.

Lorsque je fus calmé, je m'approchai le plus possible de mon ami. Collant mon visage contre son cou, cherchant à effacer mes larmes sur sa peau.

Mes joues encore humides ne le réveillèrent pas, ni les tracés invisibles que je dessinais de mon index sur son torse. Ce dernier se soulevait et s'abaissait au rythme calme et régulier de son souffle et ma main suivait religieusement ce mouvement avec la même plénitude.
Bientôt le soleil se lèverait, Hisoka ouvrirait les yeux et nous irions  en cours.

Je crois que je vais dormir un peu.



Lorsque j'ouvris les yeux, il faisait jour. Mais la lumière qui envahissait la pièce était celle du jour qui venait à peine de s'élever. Il devait être tôt. Trop tôt pour se lever, et pourtant Hisoka n'était plus allongé près de moi. Je me redressai, traînant mon regard dans la pièce déserte.
Avec empressement, je balayai d'un geste les draps qui m'enveloppaient pour me lever au plus vite. J'ouvris en fracas la porte de la salle de bain, vide aussi. Un soupir nerveux m'échappa. Mais où était-il parti ? Et surtout pourquoi ?

Mes pieds nus arpentaient les couloirs silencieux du manoir à la recherche de mon ami. À pas rapides, je regardais de tous les côtés et derrière toutes les portes que je pouvais ouvrir. Mais Hisoka n'apparaissait pas. Peut-être était-il rentré chez lui... Mais pourquoi ne pas m'avoir prévenu ?

Après avoir patrouiller pendant une trentaine de minutes dans la maison, je me décidai à retourner vers ma chambre. Bon nombre de pensées se bousculaient si bien que je ne pus me rendormir. Ainsi je restai allongé de mon côté du lit, parfaitement droit, à écouter attentivement à l'affût du moindre grincement de latte et ce jusqu'à ce que mon réveil sonne.

Pendant deux heures, j'avais eu largement le temps de réfléchir. En me levant, je vérifiai si Hisoka avait pris ses affaires. Oui, toutes à l'exception de sa cravate d'uniforme qui gisait là, presque sous mon lit. Il l'avait oublier, sans aucun doute.

Peut-être avait-il du partir dans l'urgence ? Cela expliquerait son départ au beau milieu de la nuit. Pourtant une question demeurait sans réponse : pourquoi Hisoka était-il parti sans me prévenir ? Même pas une note, ou un message. Rien. Juste sa cravate que je serrais entre mes doigts, le tissu satiné contre la paume de ma main. Pas même quelques mots.

Ravage [Hisoka x Illumi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant