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Paris, 16e arrondissement.

Janson tournait en rond dans son appartement. Les pieds toujours nus, il n'avait cependant plus la possibilité d'enfouir ses orteils dans son joli tapis. Il avait dû le vendre pour payer quelques dettes et c'était aussi douloureux que s'être arracher le cœur. Il y était attaché à ce tapis et sa douceur sous ses pieds lui manquait atrocement. A la place, il ne sentait que le parquet sec et rêche. Il ne supportait pas le contact du bois contre sa peau. Bien qu'il soit poncé, il avait l'impression que des échardes lui écharpaient la plante des pieds et s'enfonçaient dans sa peau. Il détestait voir un sol nu, la pièce n'en paraissait que plus froide. Surtout qu'il ne possédait presque plus aucune décoration. Plus de peintures, plus de tapis, juste un canapé, quelques fauteuils et une table basse. C'était encore moins chaleureux qu'une exposition chez Ikéa. 

Et Janson fulminait. Si sa décoration avait disparu, c'était bel et bien la faute d'Edison&cie. Il ne voulait pas entendre parler du contraire. C'était leur faute, uniquement et seulement leur faute. C'est eux qui avait pompé toutes ses ressources. Il les détestait. Il n'avait qu'une hâte : pouvoir se délecter du visage défait du père Edison quand le fils aura rendu l'âme. Il était pressé de pouvoir déguster sa vengeance et il espérait que Gally ne perde pas de temps. 

Mais pour ça, il fallait déjà qu'il les localise, le gentil petit fiston et son délicieux fiancé. Heureusement, il avait tout prévu. Il se doutait que cette opération ne serait pas si simple et qu'il fallait qu'il s'entoure intelligemment. Il n'avait rien fait au hasard, il avait tout préparé. Il avait fait en sorte de mettre un peu d'argent de côté pour payer le meilleur tueur du marché, il avait acheté le silence de son assistant Gally et l'avait même enrôlé dans son projet, il avait fait en sorte de garder sa société comme couverture et il avait embauché un type capable de pirater tout et n'importe quoi et de lui donner toutes les infos qu'il voulait. Son plan était parfait. 

Jusqu'à ce qu'il découvre que son tueur n'était autre que le fiancé d'Edison.

Il ne comprenait même pas comment la chose était possible. D'après ce qu'il avait compris, ce tueur à gages avait vécu la misère alors que Thomas Edison avait toujours vécu dans le luxe. Deux êtres aussi différents ne pouvaient simplement pas se rencontrer. C'était impossible, ils ne gravitaient pas dans les mêmes cercles. Et si par hasard une telle rencontre avait tout de même lieu, un mariage entre eux était la dernière chose possible. Alors Janson avait hurlé au scandale. Ce n'était pas possible d'avoir une poisse pareille. 

Et maintenant, il tournait en rond chez lui, plus en colère que jamais. Il attendait en grinçant des dents qu'Alby retrouve la trace du couple pour pouvoir envoyer Gally faire le sale boulot. Le grand noir qui pianotait sur son ordinateur, assis sur le canapé et l'appareil sur ses genoux, avait les sourcils froncés par la concentration. Quand Janson l'avait rencontré pour la première fois, il avait haussé un sourcils, dubitatif. Il s'attendait à voir un petit homme chétif et rabougri, le teint gris car délaissé par le soleil et des cernes immenses sous des yeux rouges cachés derrière des lunettes. Mais au lieu de ça, il était tombé sur un type bien plus grand que lui, à la musculature imposante, en parfaite santé. Il avait cru à une mauvaise blague mais quand Alby avait commencé à lui montrer ses compétences, il l'avait convaincu qu'il ne trouverai pas meilleur que lui. 

Alors le grand noir tentait actuellement de craquer les téléphones des deux amants par des moyens qu'il lui était obscurs. Le silence régnait depuis déjà un long quart d'heure dans la pièce. On ne pouvait entendre que les doigts d'Alby martelant les touches et les pas de Janson faisant grincer le parquet. Ce silence était aussi studieux que celui d'une salle d'examen et Janson détestait cette ambiance. Il finit par pousser un long soupir ennuyé et s'attira un regard courroucé de la part de son employé. Il n'appréciait pas tellement être dérangé dans son travail et il lui fallait un environnement particulièrement silencieux pour mener ses travaux à bien. Alors Janson décida de calmer son impatience en se roulant un joint. Il s'appliqua pour former un cône parfait et sortit son briquet de sa poche. Il lui fallut faire rouler la pierre trois fois avant qu'une flamme en jaillisse et quand il alluma son joint, il se sentit extatique. Il tira presque aussitôt une première taffe, chacun de ses muscles se détendit et il se sentit tout de suite beaucoup mieux. Il expira avec lenteur, un sourire sur ses lèvres. 

Dernier contratOù les histoires vivent. Découvrez maintenant