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Assise sur mon lit, je regarde la pièce autour de moi. 

C'est probablement la dernière fois que je vois cette pièce blanche et qui sent le désinfectant, pièce dans laquelle je me suis réveillée plus d'une fois après avoir été blessée. J'espère sincèrement ne jamais revoir cet endroit, cette infirmerie, ce domaine tout entier pour être franche. Je prends toutes mes affaires et ouvre la porte avant de la refermer bien vite derrière moi car je dois partir. Ce n'est pas seulement une histoire d'horaires, de timing, d'avion à prendre, c'est un absolue nécessité : je dois partir. Il faut que je dégage d'ici au plus vite parce que j'étouffe dans cet environnement. J'étouffe de la chaleur de la Sicile, j'étouffe de l'ultraviolence qui émane de chaque personne ici, j'étouffe des réponses que j'ai eu, j'étouffe de sa présence à lui. Je marche dans le couloir, remonte les marches et pousse la porte pour déboucher dehors sous le soleil qui se couche avant de prendre la direction de la maison, parce que je dois dire au revoir. Après être entrée, j'aperçois Alberta et je crois qu'elle comprend directement la raison de ma présence ici puisqu'elle me prend dans ses bras et me frotte le dos en murmurant des choses incompréhensibles. 

- Merci pour votre accueil, pour votre gentillesse, pour tout ce que vous avez fait pour moi, Alberta. Vous avez été un ange. 

- Toi aussi ma grande, ça m'a fait du bien d'avoir une présence féminine ici. Tu est adorable. 

Nous nous serrons fort dans les bras en nous faisant nos derniers adieux, puis elle m'indique que tout le monde est dans la salle du fond ; je m'y rend en lui adressant un sourire d'adieu. Je traverse le premier salon, le deuxième, et frappe avant d'entrer dans la dernière pièce où se trouvent bien Marco, Victoria, Lorenzo et Thaddeus. Ils se retournent tous, en train de faire un billard, et me dévisagent alors je me sens obligée de leur dire la raison de ma présence. 

- Je suis venue dire au revoir. Je m'en vais. 

Je vois dans les yeux de Victoria que quelque chose se brise, mais je suis pas assez disponible emotionellement pour y prêter attention : sa trahison a laissé une vive marque dans mon esprit, encore plus vive que celle du psychiatre. Marco s'avance, me tend une nouvelle fois sa main que je sers à nouveau puis il me dit : 

- Tu as manqué les lasagnes. Et les gangsters.

Sans y penser, naturellement, je souris à sa remarque et il me fait un clin d'oeil avant de se reculer. Je tends la main à Lorenzo, plus mature que lui qui me fusillait encore du regard il y a quelques secondes, et il me la serre sans rien dire. Viens le tour de Victoria, qui me tend elle aussi sa paume. Avec un goût amer collé sur le palais, je lui rend le geste. 

- Je suis désolée. 

- Je sais, je dis. C'est pas grave. On aura eu de bons moments. 

Elle sourit tristement. 

- J'espère que l'on se reverra un jour, souffle t-elle.

- Dans une autre vie peut-être...

Je n'ai pas envie de m'attarder sur des adieux larmoyants, car je n'ai plus de larmes à leur donner. J'ai trop pleuré à cause de chacun d'entre eux, et il faut que ça se termine. Il faut que je parte. Je n'ai jamais fait d'adieux, je n'ai jamais eu la chance d'en faire, mais je ne m'attarde pas sur ces au revoirs : c'est de la simple politesse envers eux, car ils m'ont aidé à atteindre mon but, rien de plus. Je n'ai plus rien à leur donner. Mais quand je me tourne vers Thaddeus, je sais que je ne suis pas encore tirée d'affaire puisqu'il pose la queue de billard contre un mur avant de s'adresser à moi : 

- Suis-moi, il nous reste quelques détails à régler. 

En adressant un dernier signe de tête à Victoria, un dernier regard à Lorenzo et un dernier sourire à Marco, je quitte la pièce sur les talons de Di Casiraghi. J'ai le coeur battant ; est-ce que c'est le moment du film où il me prend à part pour me tuer sans faire de vagues ? Je monte les escaliers derrière lui jusqu'au deuxième étage, où nous n'allons pas dans son bureau mais dans la bibliothèque. Je remarque une troisième porte au deuxième étage, et je me demande bien ce qui peut se cacher derrière. Un autre bureau ? Une salle de bain ? Sa chambre, peut-être ? 

ULTRAVIOLENCEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant