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Je fait les cent pas dans son bureau. 

Après m'être calmée toute seule, je suis partie discuter un peu avec Alberta histoire de me détendre avant de remonter au deuxième étage, et maintenant, je suis là, à attendre l'instant fatidique, les yeux rivés sur l'écran de la tablette. 

- Arrête.

L'ordre, simple, me fait m'arrêter et je reviens m'asseoir sur l'une des deux chaises devant mon bureau, la tablette à la main. Il est presque dix heures. Et si tout se passe bien, dans quelques minutes, Marco devrait bombarder les maisons à côté de celles de Corelli ; sur les caméras, les équipes, cachés dans les rues autour, se tiennent prêtes en file indienne histoire de se déployer rapidement une fois les bombes lâchées. Soudain, j'entends le talkie-walkie de Di Casiraghi grésiller et ce son m'arrache un sursaut. 

- Omega 2-4-5 au rapport. Demande l'autorisation de bombarder. 

Thaddeus arrête chacun de ses mouvements mais garde son stylo dans la main avant de de se saisir de son talkie-walkie. Comment ce truc peut émettre à tant de kilomètres de distance ? Ce sont des engins de compétition, de toute évidence - de toute façon quand on est un criminel, on a de l'argent pour s'offrir ce genre de matériel, n'est-ce pas ? L'homme devant moi se saisit alors du talkie-walkie, presse un bouton et déclare :

- Ici Alpha. Vous avez l'autorisation. 

Il fait une petite pause, puis appuie sur le bouton encore une fois, l'air grave. 

- Ne manque pas ta cible, Marco. Terminé. 

Je fixe sur l'écran les équipes. Ils se parlent à voix basse, et j'aperçois sur  un bout de l'écran Victoria : on dirait l'ange de la mort. Je la reconnais à ses cheveux blonds coupés au carré, elle est habillée tout en noir, et les armes accrochés à son corps sont si nombreuses qu'on dirait qu'elles la couvrent d'écailles. Elle porte comme d'habitude son fusil d'assaut en bandoulière, et est au téléphone avec quelqu'un que je me doute être Lorenzo ou Marco. Le stress monte doucement. Il ne faut pas qu'il se rate ; le plan repose en partie sur l'effet de surprise que l'on va imposer à Corelli, et si ça ne se passe pas comme prévu, c'est tout un pan du plan qui volera en éclats. Ne tenant plus, je me lève la tablette à la main et recommence à faire les cent pas dans la pièce puis soudain, l'écran bascule sur le plan principal, celui des snipers. Il y a deux, l'un perché sur le toit de la maison en face de celle de Corelli, l'autre sur le toit d'un petit entrepôt, à côté. On y voit parfaitement les trois maisons, et je vois un hélicoptère arriver dans le champ. Les mains tremblantes, je m'arrête dans ma course folle.

- Allez Marco, je murmure. 

L'hélicoptère passe lentement au dessus de la première maison qui explose en un milliers de débris, soufflant par ailleurs les fenêtres de celle du traître, et alors que le pilote passe au dessus de la deuxième maison, elle explose elle aussi. La maison de Corelli est touchée : les vitres volent en éclats, une partie du toit s'effondre, la porte d'entrée se décroche de ses gonds et c'est un torrent de poussière qui macule la scène. Thaddeus et moi voyons sur l'écran les équipes se mettre très vite en place autour de cette dernière et je pousse un soupir de soulagement. La partie qui me contrariait le plus, la partie qui avait le plus de chances de foirer, est enfin terminée ; la joie que je ressens est indescriptible. Un léger sourire se dessine sur le visage de Thaddeus et je reviens m'assois au bureau. Sur les caméras embarqués, nous pouvons voir les soldats qui se mettent en position, et puis tout devient noir. Il me faut quelques secondes pour réagir et je me met à taper du doigt sur la tablette, à allumer et éteindre l'écran pour tenter de rétablir le contact. 

- Pourquoi on vient de tout perdre ? 

Di Casiraghi attrape son talkie-walkie, règle la fréquence et appuie sur le bouton. 

ULTRAVIOLENCEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant