51. Soutien

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Elle se retourne, et s'éloigne rapidement, jusqu'à disparaître à une intersection. De mon côté, c'est avec impatience que j'attends le bus de 18h45. Au bout d'une dizaine de minutes, celui-ci arrive.

Je monte alors dedans, salue le chauffeur, m'assois, avec pour seul souhait celui de prendre une photo de Nathaniel et moi. Mes yeux se posent sur le croissant de lune. Je frissonne à l'idée que ce soir va sûrement être le dernier que je passerai en sa compagnie.

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C'est avec une appréhension immense que j'arrive face à la chambre d'hôpital de Nathaniel. Le stress me parcourt entièrement, déferle en moi et ce, jusqu'à la pointe de mes doigts. Mon cœur, lui, bat la chamade. J'en ai presque la nausée.

Je pose ma main moite sur la poignée, puis l'actionne. Ouvre la porte. Une douce lumière, tamisée, m'accueille chaleureusement. Elle m'invite à entrer, bien que mon corps me hurle de faire le contraire.

Nathaniel est là, allongé dans son lit. La couette remontée jusqu'aux épaules. Il a l'air, plus que jamais, mal en point. Je n'ose pas imaginer l'étendue de sa souffrance. Je me remémore alors les paroles de mon père, disant que Nathaniel avait fait une nouvelle infection. Infection qui lui serait fatale, cette fois. Un frisson me parcourt.

Je me sens tout à coup incroyablement stupide, debout, là, seule avec mon appareil photo à la main, dans cette chambre d'hôpital. Qu'est-ce que je croyais ? Que Nathaniel pèterait la forme et qu'on ferait une photo mémorablement joyeuse ?

D'un pas lourd, je me rapproche du lit. La respiration de Nathaniel est lente, profonde, et je me dis avec horreur que bientôt, il ne respirera plus. Plus jamais.

Je reste là, à le dévisager longuement. Pendant plusieurs secondes, plusieurs minutes, peut-être même plusieurs dizaines de minutes. Je ne sais pas.

Je songe avec effroi au fait que bientôt, Nathaniel va s'éteindre. À tout jamais. Je ne sais même pas s'il souhaite se faire enterrer, ou incinérer. A-t-il rédigé son testament ? Lorsque je réalise à quel point les questions que je me pose sont terribles, peut-être même mal placées ou irrespectueuses, je me hais instantanément.

Je sens mon ventre se retourner soudainement. Je ne supporte plus d'être ici. C'est alors avec une lâcheté extrême que je prends la fuite. Je quitte cette maudite chambre, ce maudit hôpital en trombe. Les larmes aux yeux, je franchis les portes du bâtiment.

Dans la nuit impitoyable de décembre, accompagnée de son vent glacial, je m'oblige à retrouver mes esprits. Tout en tentant de calmer ma respiration saccadée, j'appelle ma meilleure amie. Celle-ci décroche au bout de trois sonneries.

- Allô ? dit-elle. Samuel m'a dit que tu étais partie de la soirée ?

- Oui, je suis allée rendre visite à Nathaniel..

- Ça va ? s'inquiète-t-elle.

Une boule se forme dans ma gorge, et aucun son n'en sort.

- J'arrive, déclare-t-elle.

À ces mots, elle raccroche aussitôt. J'aurais ri de son autorité si je n'étais pas dans cet état. Je patiente un moment, vingt ou trente de minutes peut-être, assise, là, sur un trottoir, seule dans le froid. Je ne veux plus retourner dans cet hôpital.

Je reçois soudainement un message de Mary, me demandant où je suis. Je lui donne alors rendez-vous devant les portes de l'hôpital et m'y rends. J'aperçois ma meilleure amie. Elle me sourit.

- Allons à l'intérieur, dit-elle en claquant des dents. Il fait super froid.

Nous franchissons les portes de l'hôpital côte à côte, puis nous rendons à la chambre de Nathaniel.

For Two MonthsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant