1. Chance

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PDV Gabriella

Essoufflée, j'arrive devant la façade de l'hôpital. Je m'arrête alors dans ma course effrénée. C'est un bâtiment très imposant, et ma mère y travaille.

La nuit est tombée depuis un bon moment déjà ; il est aux alentours de 20 heures. La température est basse. Tout en resserrant mon écharpe autour de mon cou, je frissonne. Ma musique aux oreilles, je souffle un bon coup. Puis franchis les portes de l'hôpital.

Ne connaissant que vaguement les lieux, je me dirige vers l'accueil avec difficulté. Une fois arrivée là-bas, je m'adresse à la femme qui est derrière le comptoir.

- Bonsoir, dis-je, hésitante, j'aimerais voir ma mère, c'est...

- Les heures de visites sont terminées, déclare-t-elle calmement.

- D'accord, mais, c'est la directri..., tentais-je.

- Navrée, c'est impossible. Repassez demain, me conseille-t-elle.

- Je suis Gabriella Johnson, la fille de la directrice de cet hôpital, insistais-je. Et j'ai besoin de la voir.

Mon interlocutrice lève les yeux.

- Oh, déclare-t-elle. Je vois.

Elle m'annonce par la suite qu'elle va essayer de trouver ma mère. J'acquiesce donc. Et patiente ensuite.

- Mademoiselle abuse de son pouvoir, surgit une voix.

Je fais volte face, et jette un coup d'oeil à celui qui vient de parler. Je lui lance un regard interrogateur et me pointe moi-même de l'index.

- Moi ? dis-je, hésitante.

- Toi, affirme-t-il. Nous sommes les seuls ici, à ce que je sache.

J'ignore sa pique, et m'appuie contre le comptoir. Examine attentivement la personne en face de moi.

C'est un jeune homme, qui doit avoir la vingtaine environ. Il est en fauteuil roulant. Ses cheveux, légèrement ondulés, sont d'un noir de jais. Le vert émeraude de ses yeux lui confère un regard perçant, qui me scrute lui aussi.

Je me racle la gorge. Détourne le regard. Joue nerveusement avec ma boucle d'oreille, qui n'est autre qu'une créole en argent. Comme pour briser le blanc qui s'est installé, je déclare :

- On n'utilise plus l'appellation mademoiselle, ça a été banni.

- Les beaufs qui interpellent les femmes dans la rue ne sont donc pas un exemple à suivre ? s'enquit-il, un faux air surpris sur le visage. Comme c'est dommage.

- Très dommage, oui, cinglais-je.

Un nouveau silence s'installe alors. Une question me brûle les lèvres, cependant j'hésite à la formuler à voix haute.

- Si je peux me permettre, pourquoi est-ce que..., débutais-je.

Il lève une main, et ferme les yeux.

- Dis-moi une chose, déclare-t-il. Pourquoi les humains s'entêtent à parler, toujours à parler ? Pourquoi un silence est une source de gêne, de malaise ?

Je le dévisage de longues secondes durant, et me contente de laisser le silence lui répondre. Un demi-sourire se dessine sur les lèvres de cet inconnu.

- Perspicace, commente-t-il.

Les secondes défilent.

- Depuis quand es-tu ici ? m'enquis-je.

For Two MonthsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant