54. Lettre

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Mes paupières s'ouvrent d'un seul coup, mon corps semblant étrangement alarmé. J'attrape avec difficulté mon téléphone. 10H07. Et, brusquement, la réalité s'impose à moi. Hier soir, hôpital, Nathaniel. Je suis aussitôt prise d'un haut-le-cœur. Souhaitant infiniment ne jamais m'être réveillée, j'enfonce ma tête dans mon oreiller, avec l'envie de hurler. Voilà ce que l'on appelle un cauchemar éveillé, alors. J'entends, chez moi, dans le salon, mes parents aussi bien que mon oncle, ma tante, mon cousin. Me sentant incapable d'afficher le moindre sourire, je décide de rester ici, dans le plus grand des dénis. Le noir m'accueille à bras ouverts ; j'ai même l'impression de trouver du réconfort en lui. Personne n'ose venir me voir jusqu'aux alentours d'11 heures et demi. De légers coups résonnent à ma porte. Sans attendre de réponse, celle-ci s'ouvre peu à peu, dans un grincement sourd. Je reconnais alors la silhouette de ma mère.

- Ma chérie ? dit-elle doucement.

Le ton affectueux avec lequel elle parle me donne aussitôt les larmes aux yeux, et un « oui ? » étranglé sort de ma gorge. Elle s'approche de mon lit, ma chambre plongée dans le noir, toutefois bercée dans un halo de lumière provenant de la cage escalier. Ma mère s'assoit sur mon lit et me prend dans ses bras. Les larmes roulent alors le long de mon visage. Elle caresse mes cheveux silencieusement, tandis que je tente de contrôler mes sanglots. Cela dure de longues minutes. Une fois calmée, elle me demande si je veux dire au revoir à nos invités. J'accepte, et descends les escaliers en pyjama XXL, les yeux gonflés, les cheveux emmêlés.

- Désolée, m'excusais-je auprès de tous.

Mes yeux se posent sur des cadeaux disposés au pied du sapin. Ma tante semble suivre mon regard.

- Tu les ouvriras sans nous, me rassure-t-elle, ce n'est rien.

J'acquiesce.

- Merci beaucoup.

Je baisse la tête vers mes pieds.

- Bon, on va y aller, lance mon oncle à mes parents, face à mon désarroi. On a beaucoup de route à faire.

Mon cousin et moi nous lançons un regard, et son air espiègle parvient à me tirer un sourire. Nous nous checkons.

- On se voit cet été, lance-t-il.

- Toujours.

Une fois nos invités disparus du pas de la porte, je m'isole dans ma chambre, sous ma couette, intégralement figée. Le cœur meurtri, il m'arrive de lancer l'application SMS sur mon téléphone, dans l'espoir de recevoir un message de sa part, dans l'espoir que tout cela ne soit pas réel. Rien de cela ne se passe, et les heures filent, défilent sans que je ne m'en aperçoive. Ni Marie, ni Ethan, ni Samuel ne savent. Je ne veux pas le leur dire, parce que tant que je n'aurai pas prononcé ces mots à voix haute, ce sera comme si c'était moins réel. Le visage étrangement neutre, je laisse mes pensées m'envahir à leur guise, me contrôler. Je sombre peu à peu dans un état léthargique, touchant presque à l'apathie, et ne sors de ma torpeur que lorsque mon père m'appelle d'en bas. Mon corps se réveille, je jette un coup d'oeil à mon téléphone. 14H04. Mes yeux s'écarquillent. Cela fait 2 heures et demi que j'ai sombré. Le silence sourd qui m'avait jusque-là envahie se dissipe, pour laisser place au bruit d'une maison habitée. Tout à coup, mes poumons semblent manquer d'air, comme si j'avais retenu ma respiration durant tout ce temps. Je me mets alors à suffoquer, une main autour de la gorge. Des larmes roulent le long de mes joues, sans que je ne sache pourquoi. Je mets plusieurs minutes à me calmer. Ma chambre est plongée dans un bain de soleil. Je me mets alors à observer réellement ce que je fixe sans regarder depuis un moment déjà. L'appareil photo posé négligemment sur mon bureau, faisant échos à la photo de Nathaniel et moi prise quelques jours auparavant. Ma copie d'anglais, à laquelle j'ai obtenu un 16/20. Son pronostic pour ma note était de 17/20. Le tube de fond de teint que je comptais lui offrir, avant d'apprendre que...

For Two MonthsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant