Toi sans moi

Seizième

-...aussi, l'Oméga, et si son Alpha le veut, seulement et seulement si, a l'obligation de séjourner où son Alpha aura choisi. Ses frais seront pris en charge uniquement par son Alpha et il devra alors s'occuper comme celui-ci l'entend.

Je repris soudainement le fil de ses paroles. Je n'avais pas l'air d'avoir manqué grand chose. Cette feuille n'était qu'un ramassis de leur immonde propagande ! Ils n'avaient donc aucune honte de nous représenter comme des êtres si soumis et sans aucune conscience, incapables de prendre soin d'eux. Je détestais ce pays, ces dirigeants mais surtout, l'esprit fermé des personnes vivant ici ! Comment pouvait-on accepter ça sans ne rien dire ?

-Concernant l'argent que pourrait posséder l'Oméga, ce sera à son Alpha et uniquement à lui seul de gérer ses comptes bancaires et de faire disposer de la somme qu'il entend à son Oméga. Dans le cas où l'Oméga posséderait déjà son propre compte bancaire, alors, il passera sous la tutelle de son Alpha.

Je hoquetai sous les inepties que débitaient cette femme. Elle releva son regard de sa feuille, s'interrompant pour m'observer.

-Avez-vous une question ?

Je serrai les dents en secouant la tête. Son regard se tourna vers la feuille et elle reprit.

-Il faudra donc montrer une autorisation signée de la part de son Alpha à l'hôte de caisse si l'Oméga souhaite faire un achat, et dans toute circonstance, même si c'est pour les courses.

Je fermai les yeux en baissant la tête, me retenant de l'interrompre encore une fois.

-Je crois que j'ai fait le tour. Je vais vous demander M.Adam Conrad de remplir quelques papiers puis de signer juste ici.

La femme lui tendit le lot de feuilles agrafées qu'il prit, il attrapa le stylo et commença à écrire dans les différentes cases vides. Je tendis la tête pour regarder ce qu'il écrivait, m'attirant les regards choqués des deux femmes. Après quelques secondes seulement, il apposa sa signature sur le document sans même hésiter, ni me consulter. Je me sentais aussi confus que blessé. Alors, il était d'accord avec tout ça ? Avec ce traitement délirant des Omégas et cette humiliation que je ressentais et qu'il ressentait à coup sûr aussi ? Je pris amèrement le document qu'il me tendait, lisant un peu le début de la première page où y figurait nos noms et prénoms tout en haut. Puis, en tournant les pages, je vis plusieurs informations personnelles, des photocopies de nos actes de naissance, mais aussi du livret de famille et pour finir, nos dossiers médicaux, elles avaient surligné le résultat de ma prise de sang: je n'étais pas enceinte. Ce n'en était que d'autant plus rabaissant qu'elles savaient que nous étions frères, et que, avec ces documents, le monde le saurait aussi. Serrant un peu les feuilles entre mes mains, je lus ce qu'Adam avait écrit. Je logerai dans son appartement, il avait noté l'adresse, mais aussi son numéro de téléphone, le mien. Il était noté en bas de page que l'accès à mon compte bancaire m'était dorénavant refusé et que ma carte serait débloquée dès que cette feuille serait signée par nous deux. J'éloignai la feuille de mes yeux, mes bras retombèrent sur mes jambes, mon regard vide se fixa sur un point n'existant que pour moi. J'avais tout perdu. Je m'étais enchaîné à mon frère sans le vouloir, ils le sauraient, tout comme ces deux femmes le savaient. J'avais l'impression que mon monde avait basculé, mais là, cela devenait qu'un peu plus véritable. J'avais été élevé dans l'illusion d'un monde presque parfait, un endroit où je serai en sécurité du moment qu'Adam était près de moi, à me protéger. Ma désillusion ne me faisait que d'autant plus mal que c'était à présent lui qui allait dicter ma vie, tout comme il l'entendait. Je n'étais plus rien sans lui, aux yeux du monde du moins. Je n'avais pas le droit d'exister sans lui. C'était aussi mortifiant que dégradant. J'avais mal.