Vingt-neuvième

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Je déglutis difficilement en la voyant traverser la salle avec empressement, tout sourire, un regard joyeux porté sur moi. Je sentis un mauvais pressentiment me prendre aux tripes quand elle arriva à ma hauteur. Ça sentait le roussi pour moi... Étonnamment, et sans que je ne le veuille, elle me tendit son gamin qui me regardait curieusement. De son regard, elle m'obligea à l'attraper. Mes mains passèrent alors sous les aisselles du petit qui rigola. Sans changer de position, je levai mon regard vers elle, essayant de comprendre ce qu'elle faisait. Elle ramassa ses affaires et me tendit un sac consacré à l'enfant.

-Gardez-le, je reviens vite.

Les yeux grands ouverts, je la regardai se retourner pour partir loin de moi.

-Attendez ! Quand est-ce que vous reviendrez ? Vous ne pouvez pas me laisser votre enfant ! Vous ne me connaissez même pas !

Elle se retourna en me faisant un clin d'œil.

-C'est à mon tour maintenant.

Sa remarque suffit à me faire pâlir. Son tour de quoi ? Elle ne pouvait pas laisser son enfant à un inconnu.

-Revenez ! Est-ce que j'ai l'air d'avoir un passif avec les enfants ? demandai-je d'une voix peu assurée.

Elle ne m'écoutait pourtant déjà plus et s'éloignait de plus en plus de moi. Dans un soupir de désespoir, mon regard tomba sur l'enfant qui gigotait joyeusement. Je le ramenai sur mes genoux, peu enclin à le porter à bout de bras pendant plusieurs minutes. C'est qu'il était lourd le petit garnement ! Il essaya d'attraper mes cheveux en mordillant son pouce.

-Je crois qu'on va être coincés ensemble pour un petit moment, soufflai-je.

Il se contenta de rire aux éclats en enlevant son pouce de sa bouche. Je m'empressai alors de l'essuyer avec une serviette de papier, retenant une grimace de dégoût. C'était pas super hygiénique les enfants en fait !

-Elle n'a même pas prit le temps de manger, lâchai-je dans un énième soupire.

L'enfant émit quelques sons.

-Tu parles toi ou tu babilles juste ? lui demandai-je.
-Parle, se contenta-t-il de me répondre en mordillant une nouvelle fois son pouce.
-Tu parles pas beaucoup pourtant.
-Pas envie !
s'exclama-t-il en se frottant les yeux.

Il me fit pouffer.

-Petit fainéant va.

Il me regarda de ses petits yeux interrogateurs, je me contentai de lui caresser les cheveux tendrement en voyant sa petite bouille toute choupie.

-Tu es redoutable toi, le combat est inégal.
-Dodo,
souffla-t-il de ses petits yeux se fermant.
-Tu peux dormir contre moi, je te réveillerai dès que le repas sera servi.

Le petit se serra contre moi, entourant ses petits bras autour de moi avant de poser sa tête près de mon cœur qui tressauta. Une étrange impression me prit, elle me fit presque sursauter. Mon corps n'était plus aussi froid et s'était soudainement réchauffé. L'enfant s'endormit si vite que j'eus du mal à y croire. Je me statufiai, ne voulant pas le réveiller. Seule ma tête bougea dans tous les sens, mes parents et l'assistante me regardaient. Malaisé, je me raclai la gorge.

-Ouh, le repas commence à se faire long. Vous n'avez pas faim ?

Le silence plana à nouveau sur la table, mon père se contenta d'hocher la tête alors que ma mère me regardait avec un mélange de mélancolie et d'espoir. L'assistante ne prit même pas la peine de me répondre, son regard féroce me frappant. Mon regard chercha le soutien de mon ami qui, trop occupé, parlait avec son Alpha, je le voyais rougir sous les mots doux que Liam devait lui adresser. Pff, lâcheur ! Pile quand j'avais besoin de lui. Mon regard coula jusqu'à Adam qui, lui aussi trop occupé, parlait avec quelques uns de ses collègues. A bien y regarder, la place à ses côtés était aussi vide, c'était celle de M.Montgomery. Et ça fit tilt dans ma tête. C'était à son tour, à son tour de faire des choses avec son Alpha ! Mon regard tomba sur l'enfant. Pauvre gosse, il se faisait abandonner par ses parents pour du sexe. Il valait mieux garder sa langue bien au chaud dans sa bouche et ne pas faire de commentaire. Son clin d'œil voulait tout dire: Tu parles, je parle. Miss bébé n'était pas aussi conservatrice que je le pensais. Mes propres réflexions me firent sourire, je n'étais peut-être pas en territoire ennemi.
Du coin de l'œil, je vis les serveurs s'activer en salle. Nous allions pouvoir commencer à manger ! Chacun regagna sa place, et le repas put commencer. Ce qu'on pouvait en dire, c'est qu'il ne lésinaient pas sur les moyens ! En entrée, accompagnées par une petite salade, nous avions une tranche de saumon ainsi qu'un morceau de foie gras avec une belle tranche de pain. Je réveillai doucement l'enfant avec de petites secousses. Il se frotta les yeux en se tournant vers mon assiette. Le petit filou !

Toi sans moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant