Lexi retrouve sa respiration, d'un seul coup, tandis qu'elle s'extirpe du sommeil. Son cœur s'emballe dans sa poitrine, son estomac se noue. Elle combat un vertige en se redressant. Le noir dans lequel le dortoir se trouve plongé l'indispose : il estompe la barrière entre le rêve et la réalité et Lexi peine à émerger complètement. Elle attrape son téléphone portable, se raccroche à la faible lumière qu'il émet et décide précipitamment de sortir d'ici, comme si cela lui permettrait de mettre une certaine distance avec ces sensations étranges qui l'envahissent. Le fait qu'il soit trois heures du matin ne semble pas peser dans l'équation.
Depuis qu'elle est arrivée dans la Tour, ces rêves ne cessent de la poursuivre. D'abord sporadiquement, ce qui lui a permis de les ignorer jusque-là, mais c'est presque chaque nuit qu'elle y a droit, désormais. Il devient compliqué d'en faire abstraction. Ses nuits sont de plus en plus courtes et le repos de plus en plus bref.
La jeune femme se chausse, ouvre sa malle à tâtons et attrape le premier vêtement un peu épais sur lequel elle met la main. Les nuits sont froides, dans la Tour, et elle ignore encore combien de temps il lui faudra errer pour retrouver un semblant de calme et d'envie de dormir. Les filles ont l'air d'avoir une nuit autrement plus paisible, le ronflement de certaines en atteste. C'est donc le plus discrètement possible que Lexi quitte le dortoir, une habitude qui commence à prendre forme, il faut croire.
Avec toute idée de revenir sur ses pas un peu plus tard, Lexi note sur son portable les tournants qu'elle prend. Gauche, droite, droite, gauche. Saura-t-elle lire ses notes à l'envers, ensuite ? Elle n'a pas un sens de l'orientation exceptionnel, retrouver son chemin, dans le noir qui plus est, risque d'être compliqué. Le froid s'immisce sous le tee-shirt de son pyjama, lui rappelant le vêtement qu'elle a pris avec elle et qu'elle tient encore sous son bras. Elle s'enveloppe dedans et, constant qu'il est trois fois trop grand pour elle, laisse s'échapper un petit « oh » de surprise. Son parfum d'origine, si singulier, a été effacé par l'odeur de lessive, quand il a bien fallu laver la veste pour la retourner à son propriétaire. Elle ne se souvient même pas l'avoir prise dans son bagage. D'ailleurs, la veste aurait pu rester là un moment, cachée dans la valise, puisque la Garde leur fournit des vêtements, même pour les entraînements, à l'instar d'uniformes que tous portent, ici. Eh bien, c'est l'occasion de la rendre, puisqu'elle doit justement retrouver Coma dans deux heures.
Le silence l'apaise autant que le froid l'engourdit. Quand Lexi a la chance de passer devant l'une des petites fenêtres rondes qui brisent, en de rares occasions, la monotonie des couloirs blancs, elle se laisse happer par la sombre clarté du ciel. De longues minutes passent, pendant lesquelles elle colle sa joue contre le hublot, s'imaginant dans un vaisseau, hors du temps, au milieu de l'espace. Elle parvient même à en oublier ses rêves dérangeants et les émotions qu'ils font ressurgir, sur lesquelles elle n'a aucune prise.
Hayden pose le mention sur le crâne minuscule de sa petite sœur. Immobile devant la fenêtre, les yeux rivés sur les étoiles, l'enfant semble ailleurs. Elle se laisse aller contre son aîné quand ses bras se referment sur elle, qu'il l'enlace tout en douceur, sans un mot. Parce que les mots ne sortent plus, pour Lexi, depuis des mois. Alors Hayden s'est mis en tête de faire pareil, de ne plus communiquer qu'avec des gestes, des sourires, des regards. En soutien indéfectible, Zeck a pris la même décision, quand il passe les voir, au moins une fois par jour. Ils ne lui parlent que lorsque c'est vraiment indispensable, veillant à ne pas brusquer la petite. Si elle refuse de répondre, ils savent qu'elle communiquera autrement. Par le biais d'un petit mot criblé de fautes d'orthographe, déposé sur la table de la cuisine ou, plus fréquemment, glissé sous la porte de la chambre.
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Lexi et Coma
RomanceDe prime abord, l'ordre règne sur Hynis. Depuis la création de la colonie, il y a 255 années terriennes, les êtres humains sont maintenus dans cette paix qu'ils chérissent tant. Les informations diffusées aux travers des médias ne sont que messages...