Chapitre 37

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Mes paupières sont lourdes, et je peine à les ouvrir complètement. Ma vision passe graduellement du flou au net. Peu à peu, je reconnais la chambre dans laquelle je me trouve. Ce bureau en face de moi, ce petit placard en bois, cette décoration épurée... Tout me paraît familier. Je suis connectée à diverses machines, et quand j'essaie de me redresser, mon corps semble peser une tonne. Je suis clouée au lit. Et soudain, je me rappelle. Je sais où je suis. C'est la chambre de Kaito, autrefois celle de sa mère.

La soudaine prise de conscience fait battre mon cœur plus rapidement, et la machine à côté de moi se met à émettre des sons stridents.

Une infirmière arrive en urgence, son regard passant de la machine à moi. Elle me parle en japonais, les yeux écarquillés. Elle paraît aussi choquée que moi. Après avoir arrêté la machine, pris ma tension et écouté les battements de mon cœur, elle quitte la chambre.

Je reste silencieuse, attendant son retour avec impatience. Et comme je l'espérais, elle revient, accompagnée de Kaito.

- Juliette, dit-il en souriant.

Dieu, qu'il m'a manqué. Mon cœur bat la chamade, et une intense vague de soulagement m'envahit. J'ai une envie irrépressible de crier de joie.

- Tu es enfin réveillée.

- Kai... to, dis-je dans un murmure, ma mâchoire lourde, chaque syllabe est une torture.

- Ça va aller, maintenant que tu es réveillée, tu ne peux que t'améliorer, ajoute-t-il, ses yeux brillants de douceur.

Une immense émotion s'empare de moi et les larmes coulent instantanément. Le fait d'être ici signifie énormément pour moi ; j'ai soudain le sentiment de compter vraiment pour lui. Une avalanche de questions me submerge. Combien de temps suis-je restée endormie ? Quand suis-je arrivée au Japon ? Comment a-t-il réussi à me déplacer d'un pays à l'autre ? Quoi que, je pense connaître la réponse à cette dernière question. Kaito a tellement de ressources et de pouvoir que rien ne peut l'arrêter.

- Tu es restée deux mois dans le coma, dit-il, comme s'il venait de lire dans mes pensées.

Deux mois, mon Dieu ! Je me souviens d'avoir prié, espéré de tout cœur un sommeil profond pour échapper à mon chagrin, mais jamais, je n'aurais cru que mon souhait serait exaucé de cette manière. Je dois avoir des séquelles.

- Tu dois te remettre sur pied, ma belle.

Si seulement je pouvais bouger, je me jetterais immédiatement dans ses bras. J'ai tant besoin de sentir sa chaleur, de l'embrasser.

L'infirmière se tourne vers lui et engage la conversation en japonais, esquissant un léger sourire tout en jetant un regard dans ma direction, probablement un signe encourageant. Un homme entre ensuite, assurément le médecin, et commence à m'examiner avec minutie. La frustration m'envahit alors qu'ils continuent à discuter en japonais, ignorant que je suis là et capable de les entendre.

- Kaito... ? Je tente de l'appeler.

Il me regarde et comprend immédiatement ce que je veux dire.

- Tout va bien, Juliette, répond-il. Le médecin indique que tu as besoin de quelques jours pour retrouver toutes tes sensations, mais cela nécessitera une rééducation stricte. Tu devras également passer des examens pour évaluer l'état de tes organes internes.

Je sens un mélange de soulagement et d'inquiétude. Deux mois de ma vie se sont envolés dans ce coma. La réalité de la rééducation me paraît écrasante, mais la présence de Kaito me donne la force d'affronter ce défi.

Je hoche légèrement la tête, signe que j'ai compris. Ses lèvres s'étirent alors dans un doux sourire, ravivant en moi l'espoir et l'envie intense de me rétablir.

À cet instant, je ressens une profonde gratitude envers l'univers, ou envers Dieu s'il existe, pour me permettre de le voir, de sentir sa caresse sur ma joue et de contempler son sourire. C'est étrange, mais contrairement à ce que l'on pourrait considérer comme raisonnable, je ne regrette pas ma tentative de suicide. Si cette sombre expérience m'a ramenée vers lui, alors je ne peux qu'être reconnaissante. Est-ce de la folie ? Je ne sais pas, et je ne veux pas le savoir.

L'infirmière ajuste le lit en position assise. Puisant une force colossale au plus profond de moi-même, je parviens à tourner lentement la tête vers la droite, là où se tiennent Kaito et le médecin. Une fois de plus, il a l'air de comprendre mon regard et m'offre un sourire réconfortant.

Il revient vers moi pour déposer un baiser sur mon front.

- Je pars pour un bref moment, je te le promets. Sa main serre la mienne. L'infirmière prendra soin de toi.

- Non...

- Juliette... Tu es forte, nous surmonterons cette épreuve ensemble.

En guise de réponse, mes larmes, sur lesquelles je n'ai plus aucun contrôle, se mettent à couler. Kaito s'empresse de les essuyer du bout des doigts.

- Ne pleure pas, Juliette, tout cela sera bientôt derrière nous, je te le promets.

"Je sais, Kaito, je te fais confiance." Si seulement tu pouvais m'entendre.

C'est comme si mes pensées se bousculaient dans le silence de la chambre, cherchant désespérément à atteindre Kaito, à lui transmettre cette confiance qui brûlait en moi. Mon esprit tourbillonne, plein d'une affection que je n'arrive pas à exprimer avec des mots. Je voudrais lui dire à quel point sa présence est un baume apaisant pour mon âme meurtrie, à quel point sa promesse de rester à mes côtés me donne la force de continuer.

Mais hélas, mes paroles restent prisonnières de mon esprit, murées derrière des murs invisibles. Si seulement je pouvais les libérer, les laisser danser dans l'air entre nous, elles porteraient avec elles tout l'amour et la gratitude que je ressens à cet instant. Je voudrais que Kaito puisse les entendre, les sentir résonner dans son cœur comme une douce mélodie.

Une nouvelle vague de fatigue s'abat sur moi, et une appréhension soudaine m'envahit. Je ne veux plus retomber dans ce long sommeil. Mes paupières se ferment malgré tous mes efforts pour les garder ouvertes.

Un ticket gagnant (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant