Chapitre 12

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Il est trois heures du matin lorsque je me réveille, la gorge sèche, probablement à cause de la climatisation. Je quitte ma chambre et me dirige vers la cuisine, l'ambiance paisible de la maison m'enveloppe, le grand couloir est vide. Le salon est faiblement éclairé, mais les lumières s'allument automatiquement lorsque j'entre dans la cuisine. Je saisis rapidement une petite bouteille d'eau dans le réfrigérateur et en bois quelques gorgées, mes yeux encore aveuglés par la forte luminosité. Puis, alors que je referme la porte du réfrigérateur, le son d'une discussion parvient jusqu'à moi depuis la terrasse, malgré les doubles vitrages de la porte-fenêtre.

Curieuse, je décide d'aller voir ce qui se passe près de la piscine. Dans un coin aménagé comme un salon extérieur, Kaito se tient debout face à un homme agenouillé, les mains attachées dans le dos, pendant que cinq de ses hommes de main se tiennent derrière lui. Au moment où je fais un pas en avant, Kaito fracasse une bouteille de vin rouge sur la tête de l'homme tout en lui hurlant dessus en japonais.

Terrifiée par cette scène, un cri d'horreur m'échappe. Kaito relève la tête et me fixe droit dans les yeux, tandis que ses hommes se retournent simultanément, leur expression grave. Mes jambes se dérobent sous moi et je recule, heurtant maladroitement l'épaule contre le bord de la porte-fenêtre. Sous le choc, je laisse tomber ma bouteille d'eau. Je me précipite dans la cuisine et me hâte de retourner dans ma chambre. Une fois arrivée, je ferme la porte, mais je réalise que je ne peux pas la verrouiller, car je n'ai évidemment pas de clé.

- Putain... Où est-ce que j'ai bien pu atterrir, je devrais appeler la police.

Soudain, quelqu'un frappe à ma porte, brisant le silence oppressant de ma chambre. Mon cœur s'emballe, faisant résonner ses battements dans mes oreilles. Je reste figée sur place, incapable de bouger ou de prononcer le moindre mot.

- Désolé, je voulais juste m'assurer que tu vas bien, dit Kaito d'une voix calme et apaisante. Il tient ma bouteille d'eau dans sa main.

- Comment... Pourquoi ? J'ai du mal à respirer, je suis en train de faire une crise d'angoisse, je le sais puisque ce n'est pas la première fois que cela m'arrive. Je lui tourne le dos dans une tentative de cacher mon malaise.

- Juliette... je peux sentir qu'il est à quelques pas de moi.

- Ne t'approches... Pas... Je tente de me ressaisir en vain.

Il s'arrête, respectant ma demande, mais je peux sentir qu'il est à quelques pas de moi, sa présence est palpable dans la pièce. Je sens son regard sur moi, empreint de préoccupation et de compréhension.

- Écoute, cet homme m'a volé... Ce n'est pas de mes habitudes d'expliquer mes actes... Il a l'air navré.

Il me saisit fermement par le haut des bras, ses mains puissantes se refermant sur ma peau délicate. Une douleur vive me traverse l'épaule, mais je m'efforce de retenir un cri qui menace de s'échapper de mes lèvres. Les doigts de Kaito sont durs et serrés, leur emprise presque douloureuse, comme s'il cherchait à me retenir, à me garder près de lui.

- Mon monde est ainsi fait, désormais, tu fais partie de l'envers du décor. Tu dois comprendre que ce n'est pas toujours joli à voir.

- Je n'ai rien... Demandé... J'ai peur de le regarder, jusqu'à maintenant, je pensais qu'il était le gentil de l'histoire.

- Lâche... Moi... La douleur accentue mon malaise et je manque de plus en plus d'oxygène.

Il me fait pivoter brusquement, ses mains toujours agrippées à mes bras, m'obligeant à le regarder droit dans les yeux. Mon corps se fige, pris au piège de son regard intense et pénétrant. Sa poigne est ferme, son visage à quelques centimètres du mien, et je sens son souffle chaud caresser ma peau.

- Tu es pâle... Juliette ? Il me relâche enfin.

Je cours ouvrir la fenêtre pour respirer.

- J'appelle un médecin. Il saisit son portable, prêt à composer le numéro.

- Non... ça va passer... C'est juste une crise d'angoisse.

- Je ne suis pas un saint Juliette, j'ai déjà tué des gens dans ma vie et je recommencerai s'il le faut pour protéger ce que j'ai construit et ceux qui comptent.

"Au moins, il est honnête et n'essaie pas de se justifier." Je pense intérieurement.

- Je suis désolé pour ce que tu as pu voir. Mais, je ne peux pas te promettre que ça ne se reproduira pas.

Je le regarde, les yeux écarquillés. Il s'approche et me serre fort dans ses bras, mon cœur accélère le rythme chamboulé.

- Respire et détends-toi.

"Respirer ton parfum est apaisant, mais en même temps tous mes sens se réveillent et j'ai envie de toucher ta peau, passer mes doigts dans tes cheveux, sentir tes lèvres sur les miennes, et bien plus... Si seulement tu pouvais m'entendre." Je le repousse gentiment avant de perdre le contrôle.

- Détrempe-toi Kaito là d'où je viens, même le décore est moche.

- Je ne pense pas que tu ailles fait face au pire de l'espèce humaine.

J'ai la gorge nouée et une terrible envie de pleurer m'envahit, tout ça fait remonter trop de mauvais souvenirs, que je croyais enterrées à jamais.

"J'ai été trimbalée de foyer en foyer, j'ai vécu dans la rue... J'ai connu la faim, le froid..."

- Juliette. Il pose encore ses mains sur mes épaules. Un rictus de douleur s'affiche sur mon visage. Tu as mal ?

- Ce n'est rien.

- Montre-moi.

Je soulève la manche de mon t-shirt. Mon épaule est rouge et vire un peu au bleu.

- Viens, on va s'occuper de ça.

- Non, ce n'est rien, ça va aller.

- Ne fais pas ta gamine, ça va empirer si on ne fait rien.

Il m'attrape la main et m'entraine gentiment jusqu'à la cuisine. La porte-fenêtre est fermée et un silence règne sur l'immense terrasse comme si rien n'était. Je suis même convaincu que tout a été nettoyé pour ne laisser aucune trace.

- Tes hommes ont l'air d'être des pros.

- Oui, ils le sont. Il ouvre le congélateur et saisit un sac de petits poids.

- Tu es vraiment un yakuza ? Je prends place sur le tabouret.

- J'appartenais aux yakuza avant leur déclin. Explique-t-il en se positionnant face à moi. Puis, il pose le sac de petits pois sur mon épaule, provoquant un frisson glacial qui parcourt mon dos. Son sourire s'élargit légèrement, énigmatique.

- Homme d'affaires. Cette fois, c'est moi qui souris.

- Qu'est-ce qui me vaut ce beau sourie ? Il fronce les sourcils.

- Homme d'affaires, ça ne te va pas trop. J'ose dire.

- Qu'est-ce qui me va alors ? Il s'assit et me fixe.

- Je ne sais pas. Je suis sur le point d'enlever le sac de petits pois, mais il m'en empêche.

- Tu devrais le laisser encore. Ne tarde pas à retourner te coucher. Il repart par la porte-fenêtre.

Tandis qu'il s'éloigne, je reste perplexe, perdue dans mes pensées. "L'ai-je vexé par ma réponse ?" Je me demande, cherchant à comprendre son état d'esprit.

Un ticket gagnant (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant