Chapitre 13

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À vingt heures précises, l'avion privé entame son ascension vers Tokyo. Kaito succombe rapidement au sommeil, tandis que Luna reste absorbée par son ordinateur portable, me laissant dans l'indifférence, une situation qui, je dois l'admettre, me convient parfaitement.

Malgré tout le confort offert, les voyages en avion ne parviennent pas à conquérir mon appréciation. De plus, ma nouvelle liseuse ne me satisfait guère. Trop moderne, trop imposante, trop onéreuse, elle semble étrangement dépourvue d'âme. Il peut sembler futile, mais il m'arrive de m'attacher aux objets, allant même jusqu'à leur attribuer des noms. La liseuse que j'ai égarée était un véritable bijou technologique, acquise avec mon tout premier salaire. Je finis par abandonner ma lecture pour me plonger dans la musique.

Quelques minutes plus tard, l'hôtesse réapparaît pour s'assurer de notre bien-être à bord. Elle me propose un verre de vin, que j'accepte volontiers pour me détendre. Cependant, je ne m'arrête pas à un simple verre et vide la bouteille. Cette décision se révèle être la première d'une série d'erreurs, car une heure plus tard, je suis complètement ivre. Une nausée désagréable m'envahit, mais la distance entre mon siège et les toilettes me parais insurmontable. Rassemblant mon courage, je me redresse, vacillant, et me frayant un chemin entre les sièges jusqu'à ma destination. Heureusement, deux mains se saisissent de mes épaules, m'empêchant de tomber tête la première.

- Kaito...

- Tu as mal supporté l'alcool.

- J'ai besoin de...

- Je sais.

Il m'assiste jusqu'aux toilettes, me tenant les cheveux pendant que je soulage mon estomac. Une fois l'épisode terminé, je me rince la bouche et me rafraîchis le visage sous son regard attentif.

- Kaito... merci, j'articule, la tête encore embrumée.

Il bloque la porte et me fixe intensément avant de saisir une petite serviette pour éponger les zones humides de mon visage.

- Je peux gérer, j'affirme, le cœur battant, en retenant sa main.

- Laisse-moi m'occuper de toi, insiste-t-il.

- Arrête... Sa proximité est telle que je sens son souffle chaud sur ma joue.

- De quoi as-tu peur ? Demande-t-il d'une voix douce.

- De rien, je veux juste sortir.

- Tu es claustrophobe ?

- Non... Mais être enfermée dans un espace si confiné ne m'enchante guère.

Un sourire séduisant étire lentement ses lèvres. Il doit être conscient de l'effet qu'il a sur moi. Soudain, quelqu'un tape à la porte.

- Tout va bien là-dedans ? S'enquiert Luna.

- Oui, on arrive, répondis-je simplement.

- On ? S'étonne-t-elle.

Kaito sort en premier, suivi de moi. Le regard perdu de Luna oscille entre son patron et moi. Elle semble se poser mille questions, et son air désorienté me procure une satisfaction discrète.

- J'avais besoin d'utiliser les toilettes, déclare-t-elle presque exaspérée.

- Oui, vas-y, rétorque Kaito, indifférent.

- Tout va bien ? Demande l'hôtesse.

- Non, elle a trop bu, répond sèchement Kaito.

- Je suis désolée, je ne savais pas que mademoiselle Juliette avait si peu de tolérance à l'alcool, s'excuse-t-elle respectueusement.

- Non, non, c'est ma faute, je réponds.

- Préparez-lui un café et quelque chose à manger, ordonne Kaito.

- Hai, s'incline-t-elle à nouveau, désolée.

- Kaito, tu n'avais pas besoin d'être aussi désagréable. Ce n'est pas de sa faute si j'ai trop bu, je le réprimande doucement.

- J'adore entendre mon prénom dans ta bouche, me chuchote-t-il à l'oreille. Le bout de son nez effleurant ma joue provoque en moi un agréable frisson.

Ma main me démange, et je ne peux m'empêcher de caresser sa joue finement ciselée. 

"Cet homme doit passer des heures à sculpter ce corps de rêve," je pense intérieurement.

- Je suis désolée, je retire ma main, mais il la retient contre sa joue. Ses lèvres sont si proches. 

"Embrasse-moi." J'ai envie de lui chuchoter, mais je reste muette.

- Le café, mademoiselle, prévient l'hôtesse.

Kaito saisit le plateau et le pose sur la petite table de mon siège.

- Merci. Ça sent divinement bon ! Je respire la délicieuse odeur avant d'en goûter une gorgée.

- Amatrice de café ? Demande-t-il.

- Amatrice, je ne sais pas, mais je suis devenue exigeante dans mes choix.

- Tu trouveras ton bonheur au Japon, ajoute-t-il.

- Certainement, répondis-je avec un sourire.

Luna passe entre nous en s'étirant, dégageant une élégance naturelle même dans ce geste. -Je l'envie. Elle est mince et élégante.

- Hmm, du café ! J'en prendrais bien un, déclare-t-elle.

Il semble que je sois invisible à ses yeux. Elle affiche un large sourire à l'intention de son patron.

L'hôtesse de l'air ne tarde pas à exaucer son vœu.

- Je crois que vous avez un point commun, s'exclame Kaito.

- Oui, il semble bien, acquiesçai-je sur le même ton.

- Maintenant, essaie de dormir un peu, déclare-t-il en réglant mon siège et en me couvrant d'un plaid.

- Merci encore, dis-je avec gratitude.

La douce caresse de la main de Kaito sur ma joue me tire de mon sommeil profond. Alors que je m'étire et réajuste ma position, je remarque que nous sommes en train de préparer l'atterrissage. Toujours prévenant, Kaito se penche vers moi pour redresser mon siège et attacher ma ceinture de sécurité avec une délicatesse touchante.

- Tu es encore plus belle quand tu ouvres les yeux, ses mots me donnent le vertige, même assise.

Luna, qui nous observe en silence, intervient soudainement d'un ton étrangement amical : Je suis très heureuse que vous appréciiez ce spectacle.

Son changement de comportement me laisse perplexe, incapable de la cerner complètement. Je fronce les sourcils, essayant de comprendre son intention cachée. 

"Elle, heureuse de me voir profiter de quelque chose ? Il y a quelque chose qui m'échappe."

- Merci, je réponds d'une voix légèrement troublée.

Elle réagit en affichant un large sourire, un sourire qui n'échappe à personne dans la cabine. Cette situation énigmatique suscite en moi une curiosité grandissante, mais je décide de garder mes pensées pour moi-même. Pour l'instant du moins.

Un ticket gagnant (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant