Chapitre 45

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J'enfilais la veste noire du costume gentiment prêté par la mère de Thomas. Michael me scrutait, assis sur le lit. Il avait peu dormi de la nuit, et l'avait presque passé à faire les cents pas. Il ne m'avait pas touché un mot de ce qu'il se pensait mais au vu de son visage, je devinais qu'il n'était pas au mieux de sa forme. La nouvelle était tombé quelques jours avant : sa mère était morte. Mon compagnon s'était renfermé sur lui-même à ce moment-là, s'enfermant dans sa bulle. Je me sentais, pour ma part, impuissant. Non seulement le brun ne m'offrait aucun indices sur ses réflexions, mais il semblait distant. Je reluquais brièvement Michael, notant ses habits tout aussi foncés que les miens. Ensuite, je jetais un œil à mon portable, notant que nous n'allions pas tarder à devoir y aller. Dans un soupir, je me plantais devant mon compagnon qui regardait le vide. Je l'interpellais donc, et il releva la tête. Je l'informais que j'étais prêt, et qu'on devait y aller. Il opina, se redressa et sans un mot, se dirigea vers la porte de la chambre.

***

Je passais le pas de la porte de la bâtisse, guère à l'aise. Thomas et sa famille vinrent très vite à notre rencontre dans l'église. Michael était tout au bout du banc aux côtés de sa tante, se cachant presque. Je me mis auprès de la femme. Je remarquais très vite quelques visages se tourner vers le brun. Certaines personnes le regardaient, curieuses alors que d'autres le fusillaient des yeux. Thomas, à mes côtés, se pencha en avant pour observer son ami. Ce dernier se contentait de fixer le vide. Il n'accorda son attention à personne or je ne pouvais que noter sa mâchoire serrée et son corps particulièrement tendu. J'aurais voulu lui apporter mon soutient par un toucher, or il semblait encore plus distant à cet instant. Cela me fit soupirer, me disant que ce genre d'acte ne ressemblait pas à l'homme que j'aimais. Ce dernier m'aurait sûrement attrapé la main, qu'importe le poids des regards. Ici, il ne semblait ni à sa place, ni à son aise. Il se retenait, tentait de se faire oublier. J'en ressentis une légère colère. Cet homme n'avait pas à être discret, il n'avait pas à se retenir d'être lui. Il n'était pas en tort. Je glissais un œil dans sa direction, espérant pouvoir lui dire mes pensées. Or, ses prunelles étaient toujours aussi centrées sur un point imaginaire. Il n'allait certainement pas se trahir, se montrer et plus encore, m'observer. Je me mordis les joues, refluant mon amertume.

***

Michael se tenait toujours à bonne distance de moi une fois l'oraison terminée. Dès que j'essayais de l'approcher, il m'évitait. Je voulais bien être compréhensif, mais mes limites commençaient à être atteintes. J'avais désormais envie de le secouer. Pourtant, je restais discret et j'observais les alentours de l'église et les individus. L'air peu sympathique des invités envers Michael m'agaçaient aussi et je désirais ardemment leur faire ravaler leurs moues. Soudain, un homme d'une cinquantaine d'années bien tassées s'approcha alors de la famille de Thomas et moi, tandis que Michael et sa tante étaient en train de discuter plus loin. Il passa une main dans ses cheveux grisonnants, légèrement ondulés. Ses yeux étaient foncés et il portait la barbe. Il nous salua, remerciant de notre présence.

« Toutes mes condoléances, assura alors Iris. »

Le choc me frappa tandis que je réalisais que j'étais face au père de Michael. Je ne pus m'empêcher de le dévisager alors qu'il parlait tranquillement avec les deux jeunes, qui ne semblaient guère à l'aise. Il prit des nouvelles de la grand-mère de l'ami d'enfance de son fils. Je n'arrivais pas à croire qui j'avais devant mes yeux et une soudaine envie de meurtre m'épris. Je serrais mes poings, chaque muscle de mon corps se tendant. Alors que mes yeux se plissèrent, ne pouvant m'empêcher de l'observer mauvaisement, le père de Michael eut alors un regard vers moi.

« Vous êtes ? S'intéressa-t-il d'une voix calme, posée et sans aucune animosité. »

Je faillis répondre de manière peu correcte, curieux sur la réaction de cet homme ayant renié son fils pour ses préférences. Or, Thomas me devança :

« Un de mes cousins, il avait déjà rencontré votre femme et voulait venir lui rendre hommage, mentit-il. »

Je fronçais alors les sourcils. Pourquoi diable inventait-il ça ? Avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, les deux jeunes prirent congés du père et me forcèrent ensuite à les suivre vers leur voiture. Ils me firent entrer, en jetant un regard vers mon copain, à quelques pas de là. Ce dernier hocha simplement la tête face au signe de main du barbu.

« Vous m'expliquez ? éclatais-je alors qu'ils étaient tous deux dans la voiture. »

Les deux m'observèrent, les lèvres pincées. Je me mis sur l'assise du milieu, et m'appuyais sur les sièges avant. Leur petite n'était pas là, ils l'avaient laissé aux grands-parents, ne voulant pas qu'elle assiste à ça. Je les fixais, un air mauvais et le cœur battant à tout rompre. Mes tempes me lançaient, ma bouche était sèche et mes mains moites. J'étais désormais particulièrement énervé.

« Michael nous a prévenu que ça te plairait pas, mais il ne veut pas que l'on te regarde comme ils le font avec lui.

-Mais, je m'en fous ! Je vais pas me cacher juste à cause de cons qui croient que la seule bonne chose c'est un putain de couple hétéro ! »

Ils s'échangèrent un regard. Iris reprit alors :

« On sait, notre cher Mikey nous a déjà prévenu de tout ça. Mais, s'il te plaît, acceptes-le pour lui.

-Tout ce qu'il veut c'est te protéger, affirma Thomas. »

Je relevais les sourcils, et eut un sourire moqueur. Me protéger ? Quelle ironie, et comme si j'en avais besoin. Ce genre de choses allait arriver toute ma vie, parce que je préférais les hommes aux femmes. Des paroles susurrées quelques mois plus tôt par Michael me revinrent.

« Se toucher en public, ce n'est pas imposer sa sexualité. C'est simplement exprimer l'attachement à l'autre. »

La situation était ironique. Comment pouvait-il ne pas suivre ses propres mantras ? En même temps, je compris qu'à cet instant je n'avais qu'une envie : m'imposer, affirmer mon amour pour cet imbécile de flic et surtout les faire tous taire et cesser d'observer mon homme ainsi. Je m'enfonçais finalement dans la banquette, et articulais très calmement, avec un air arrogant :

« Quelle ironie. En quoi c'est me protéger ? Il n'assume juste pas ce qu'il est devant ces cons. Ça ne le gêne pas de m'embrasser devant des inconnus chez nous. »

Les deux amants me zyeutèrent, alors que je tournais mon visage vers la fenêtre. Michael voulait peut-être me cacher, mais moi non. A cet instant, deux pensées me taraudaient : l'une voulait trouver un moyen de rendre sa confiance à Michael alors que l'autre souhaitait ardemment donner une leçon à ses imbéciles. La question était, comment ?

Mon policier énervant, perturbant mais particulièrement séduisant - TerminéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant