57/ L'inespéré

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Fortier introduit la clé de l'appartement dans la serrure et pousse le battant qui s'ouvre brusquement sur une haute silhouette.

— Louisa ? Et vous devez être Éric ?

— Giovanni ? Giovanni ! Giovanni sauve moi ! crie soudain Louisa en se détachant de Fortier qui ne la retient pas.

La jeune femme s'affale dans les bras de son frère qui l'attrape de justesse. Il la prend dans ses bras. Jette un œil noir au type qui l'a ramenée. Il se demande pourquoi sa sœur a réagi comme ça ! Il a vu la peur dans ses yeux. Qui est cet Éric Fortier ? Il croyait que c'était le petit ami d'Irène. Du moins, c'est ce qu'il a compris lorsqu'elle a appelé un quart d'heure plus tôt. Heureusement qu'il a répondu. Il avait failli laisser courir.

— Bon, ben j'y vais. Elle est entre de bonnes mains, dit Fortier sans savoir qui est le grand gaillard qui tient maintenant Louisa.

Il croyait qu'elle vivait seule. Il aurait dû agir dans l'ascenseur. Personne n'aurait remarqué s'il l'avait mis en panne. À cette heure-là, les habitants de ce genre de palace dorment à poings fermés. Mais pas ce type...

Éric Fortier fait demi-tour. Il ne s'inquiète pas. Louisa se rappellera très bien leur conversation. Elle ne dira rien à personne. Pas si elle veut conserver son job et son amie, Irène Manoukian.


— Comment... pourquoi tu es là ?

— Irène m'a appelée. Elle ne voulait pas te laisser seule. Elle s'inquiétait.

Louisa en aurait pleuré. Sa Irène ! Elle avait paré au plus urgent en ignorant contrecarrer les plans de celui qui partageait ses nuits.

— Louisa ? Qu'est-ce que je peux faire ? Dis-moi ?

— Purge. Brochicolo.

— T'es sûr ! Parce que t'as pas vraiment l'air de pouvoir supporter...

— Brochicolo ! Et ouvre les fenêtres en grand !

Giovanni s'exécute. Il la laisse sur le canapé et va préparer l'infâme mixture. Il voit sa sœur prendre de longues inspirations. L'air est si froid que sa respiration forme de petits nuages au-dessus d'elle. Puis, elle attrape son téléphone. Elle tente d'envoyer un message, ni parvient pas. Alors elle compose un numéro.

— Salvatore ? Vous êtes chez vous ? Alors allez-y fissa ! Et si vous avez les moyens d'arrêter Fortier ! Faites en sorte d'activer le processus maintenant !

Louisa écoute un bref instant puis reprend.

— Il m'a droguée, et comptait me violer chez moi. Il a des images de moi en train de voler le téléphone. Il comptait dessus pour me faire taire.

— Comment. Non. Il ne sait pas que vous avez réussi... Non ! Je ne suis pas seule. Giovanni est là. Vous, occupez-vous de cet enfoiré ! Il faut sortir Irène de là !

Louisa raccroche. Elle voit son frère qui la fixe, stupéfait.

— Questo stronzo voulait te violer ? Je vais m'occuper de lui !

— Non, Giovanni ! J'ai besoin de toi. Je ne me sens vraiment pas bien. Je ne sais pas ce qu'il a mis dans mon verre...

— Ok. Je m'occupe de toi. Et après, je m'occupe de lui.


Conti n'a jamais effectué aussi rapidement le trajet jusqu'à son appart. Il a quitté Moreau avec laquelle il a prévu la meilleure contre-attaque à Éric Fortier. L'espion. Car Fortier est un espion. Il n'aurait jamais imaginé que leur concurrent aille si loin. Mais il comprend mieux pourquoi il a perdu dernièrement ces deux gros contrats. Et sachant qui les a gagnés, il n'est pas difficile de savoir pour qui travaille Fortier en réalité.

Conti a dû passer la fin de journée avec deux informaticiens – les meilleurs de la boite – pour détecter les mouchards installés par Fortier. Ils ont découvert qu'il avait réussi à se connecter aux postes de tous les collaborateurs de la boite. Caméra et micros compris. C'est un bon. Il est même probable que ça n'est pas la première fois qu'il fait ça.

Conti comprend mieux pourquoi il campe chez Irène et pas le contraire. D'abord, il avait une vue directe sur son travail à lui. Ensuite, son propre appart doit être une succursale de son vrai travail. Conti a déjà mis la police sur le coup. Dès qu'il a eu assez d'éléments de preuve. Maintenant, il faut s'assurer que Fortier n'approche pas de son appart d'ici à la fouille prévue demain matin.

Fenêtre avec vueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant