Le soleil transperce mes paupières et oblige mes yeux à s'adapter à la lumière. J'ai oublié de descendre les volets électriques hier soir, et je m'en veux à présent. La journée promet d'être longue, j'aurais apprécié quelques minutes de plus pour dormir. Si je n'avais pas eu la bêtise de sortir hier soir.
Axel ignore tout de l'évènement de la semaine dernière. Je l'ai même évité pour qu'il ne constate pas, au détour d'une discussion, la gêne que je pourrais avoir. L'image d'Enzo m'embrassant dans mon bureau est toujours présente dans mon esprit. Mon incapacité à réagir aussi.
Au fond, j'ignore ce qui me rend le plus aigri. En réalité, non, je sais quel est l'enjeu majeur : le risque d'avoir fait du mal à mon étudiant. Mais est-ce parce que je m'en veux de ne pas avoir dit non avant ? Ou bien d'avoir apprécié cet instant ? De ne pas avoir été plus clair, plus honnête ? Comment l'être davantage quand votre propre corps est tiraillé.
Je jouis d'un avantage ultime, qui est la source même du problème d'ailleurs : ma profession. Grâce à mes cours, mes réunions et les quelques clients que j'ai conseillés, ma conscience s'est trouvée de nouveaux jouets pour éviter le cas Enzo. Mes journées étaient bien trop chargées pour qu'il puisse se glisser dans mes pensées.
Jusqu'à aujourd'hui. Deuxième réunion du tournoi. Je ne peux pas me dérober, je lui en ai fait la promesse. Alors, hier soir, je suis allé prendre un verre avec un inconnu rencontré sur une application. Une jolie discussion qui, couplée à une dose modérée d'alcool placée en contexte de grande fatigue, a donné lieu à une série de décisions assez discutables.
Premièrement, était-il nécessaire de débuter les préliminaires dans les minuscules sanitaires du superbe bar auquel nous étions ? Non. Deuxièmement, ai-je failli oublier de mettre un préservatif une fois rentrés chez moi et que nous venions à peine de passer ma porte ? Oui. Fort heureusement, nous nous sommes tous deux rappelés à notre devoir.
Troisièmement, fallait-il vraiment que je trouve un homme aux talents multiples pour cette nuit précisément ? Autrement dit, moi qui n'ai pas été versatile depuis de nombreux mois, je me suis laissé conquérir par les charmes de mon invité du soir qui a ainsi pu découvrir mon appartement sous tous ses angles.
Vers deux heures du matin, l'inconnu, qui ne l'était plus, n'a pas voulu abuser de ma gentillesse en apprenant que je devais être à l'université vers huit heures. Après m'avoir une dernière fois rappelé combien il était un amant dévoué, il est rentré chez lui. En dépit de la sûreté de notre ville, j'ai tenu à attendre son message pour m'assurer qu'il était en sécurité à son domicile.
Il est donc sept heures du matin, je n'ai dormi que quatre heures et demi, et je dois affronter une série de cours et, ultimement, Enzo et son groupe. Je ne regrette pas ma nuit, mais je déplore les conséquences qu'elle peut avoir. Enzo n'a pas disparu de mon esprit, pas du tout. Je ne veux pas que la fatigue me conduise à un comportement inadéquat.
Je crains simplement que la gêne que nous ressentirons évidemment en nous revoyant ne soit exacerbée ou au contraire annihilée par des mots ou des gestes qui ne reflètent pas ma pensée. Un mal de tête commence aussi à apparaître. En somme, l'étau se resserre et je commence à ne plus supporter la pression.
Je m'habille donc, et je prendrai mon petit-déjeuner ici, pour une fois. Devant mon armoire, je suis pris d'un doute. Comment m'habiller. Je n'ai pas oublié les mots d'Enzo. Regardez-vous. Je me regarde en ce moment-même, en boxer. Je suis à deux doigts de commencer à réfléchir par rapport à lui.
Il faut me comprendre : je ne veux pas réveiller en lui des envies que j'ai balayées. Donc, je ne peux pas m'habiller avec un costume cintré ou une chemise à la taille serrée. Dans le même temps, si je change mes habitudes, ce serait la preuve pour lui que j'ai tenu compte de ses propos. Ce serait alors un mauvais signal sur mes intentions.
J'opte pour l'absence de changement. Une chemise unie viendra souligner un costume bleu marine. Pour l'instant, toujours muni du seul boxer rouge, je me sers un café et mange quelques céréales. L'image de mes activités nocturnes me revient à l'esprit. Il y a quelques heures, j'étais aussi assis sur ce sofa, mais pour des raisons différentes.
Alors que je craignais sa langue et sa bouche quand elles ont pris possession de la mienne, tout s'est déroulé sans accroc. Je reconnais à mon amant de la nuit de grandes qualités physiques. Nous avons passé une nuit exquise et son message final m'a montré sa satisfaction. Nous avons tous deux souligné la rare adéquation entre mental et physique. Lui, au moins, a été complimenté sur ses atouts charnels.
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Ultime évanescence (BxB)
RomanceA Aix-en-Provence, la justice et le droit règnent en maîtres. Travailler ou étudier dans cette ville est un privilège que de rares chanceux connaissent. Que se passe-t-il quand, à cet honneur, s'ajoutent des rencontres imprévues et faisant vaciller...