Evan - XVI -

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En dépit de la fatigue, mon horloge biologique refuse de me laisser dormir. J'émerge donc dans le confortable lit d'Enzo et vois que sa tête est sur le coussin qu'il a bien voulu me prêter. J'essaie donc de ne faire aucun geste brusque. Je croise simplement mes mains sur mon ventre.

Je suis épuisé et, pourtant, amplement satisfait. Je ne suis assurément pas l'homme le plus sage d'Aix. J'ai connu un certain nombre d'amants, plus ou moins réguliers. Jamais je n'avais été si rasséréné. Je me réveille sexuellement comblé et serein. Aucune gêne, aucun malaise. Juste Enzo qui se rapproche de plus en plus de moi.

A croire qu'il ressent mon éveil. Même si je n'enlèverai à Enzo aucune de ses qualités, j'ai conscience que mon état n'est pas seulement dû à la dévotion magnifique dont il a fait preuve à l'égard de mon plaisir. J'espère avoir été à la hauteur de la réciprocité, ce qui n'en demeure pas moins difficile quand l'individu en question ne se préoccupe quasiment que de vous.

En dépit des multiples friandises nocturnes offertes par mon hôte, je reste absorbé par mon comportement au bar à cocktails. Je n'étais pas que son fantasme. Il ne voulait pas seulement me mettre dans son lit. Au-delà du physique, une attraction. Je me souviens lui avoir parlé de sentiments, sans doute le mot était-il mal choisi. Une émotion plutôt. Une tension mentale, physique, sexuelle assurément.

Nier l'existence de tout ceci n'aurait conduit qu'à une profonde rupture, un fossé dont je n'avais pas envie. Je souris. Je me suis dévoué pour Enzo, évidemment. Quelle ironique imposture. Je désirais Enzo depuis notre baiser. C'était un fait, difficile à accepter, mais réel. Cependant, hors de question de succomber à un fantasme. Ce n'est pas le cas...

« Bonjour Evan... entends-je dans mon oreille droite.

— Je t'ai réveillé ? Pardon Enzo, je...

— Tais-toi... dit-il en m'embrassant.

— Tu as conscience que m'embrasser ne me fera pas taire ? lui souris-je.

— Si je mets ma langue là, si ! » s'amuse-t-il en pointant de son ongle mes dents.

Je me dégage de son étreinte et passe mon bras par-dessus sa tête. Sans un mot supplémentaire, il vient s'installer sur mon torse. Je sens son odeur envahir de nouveau mes narines. Sa joue frotte contre mon téton, tandis que sa main droite s'installe sur mon flanc gauche. Il reprend.

« Tu as bien dormi ?

— Ce n'est pas exactement ce que je retiens de la nuit, tu sais.

— Tu es direct... Comme à chaque fois, dit-il alors que je sens son souffle sur ma peau.

— C'est un compliment, Enzo. Même si c'est dangereux...

— Tu regrettes ?

— Comment ? Non ! Désolé, c'était au sens positif ! Je risque d'avoir envie de revenir... »

Enzo se relève et me regarde dans les yeux. Je plonge en eux sans autre forme de résistance et réitère le même mouvement qu'hier. J'ai envie de passer ma main dans ses cheveux, de voir la douceur envahir peu à peu son visage. L'apaisement qui s'en suit est bien trop plaisant pour être négligé. Il m'embrasse avant que je n'aie le temps d'y penser.

« Pardon de revenir sur le sujet mais... Que s'est-il passé en un mois ? Tu ne voulais pas même d'un nouveau baiser... Et hier soir...

— J'imagine qu'un blocage a disparu. Le devoir et le pouvoir se sont entendus pour me laisser aller. Tu n'as pas agi comme n'importe quel dragueur. Cette différence m'a touché. J'ai basculé en entendant tes remerciements. Comme si le respect que je t'avais porté était exceptionnel. C'est alors que j'ai compris que je faisais une erreur en renonçant à ce que tu m'offrais ».

Sa mine réjouie est enthousiasmante. Il s'appuie de nouveau contre moi. Je caresse ses cheveux alors que son nez ne cesse de faire des allers-retours sur mon torse.

« Evan... Tu as conscience que je ne saisis absolument rien de ce qui est en train de se dérouler ici. Cette nuit, ce matin...

— Tu te sens bien ?

— Oui, sincèrement.

— Moi aussi. Alors partons du principe que de tels moments nous sont bénéfiques. Ça suffira pour l'instant.

— Merci de ne rien rendre compliqué ».

Il se relève, s'allonge tout entier sur moi et m'embrasse. C'est très bien ainsi.

Ultime évanescence (BxB)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant