Ultime évanescence (BxB)

Enzo - 22 -

J'attends patiemment à la gare routière dans l'attente de mon frère. Nous avons appris il y a une semaine que mon équipe avait remporté le tournoi. Les différents suffragants ont voté à l'unanimité moins une voix en faveur de notre équipe. Le discours que j'ai proposé a marqué tous les participants, mais c'est surtout le dossier écrit qui a convaincu nos enseignants.

Il faut dire que nous avons consacré bien trop de temps à ce dossier. Une centaine de pages de propositions d'initiatives, d'idées de communications, de pièces rassemblées. Je me demande même si le jury a réellement lu le pavé que nous avons remis, mais toujours est-il que nous avons gagné le prix.

Evan nous l'a appris il y a quelques jours et nous avons décidé de l'inviter à boire un verre pour le remercier. De leur côté, ma famille a envoyé son ambassadeur pour me féliciter. Je suis heureux de le revoir alors que je n'ai pas encore eu l'occasion de rentrer chez moi. Il est dans un des bus qui effectue la navette entre l'aéroport et la ville.

Au loin, j'entends quelques cris. Je comprends assez vite que mon frère est arrivé.

« Enzo !!! C'est trop joli ! J'adore !

— Content de te voir, grand frère, tout s'est bien déroulé ? Le voyage n'a pas été trop long ?

— J'ai joué et j'ai lu, ne t'inquiète vraiment pas pour moi... Alors, comme ça, tu vas devenir une star de ta fac ?

— Comme toujours, tu exagères tout... Ce n'est qu'un tournoi au sein de l'université... C'est bon signe pour mon dossier et mes candidatures à l'avenir, mais rien de plus...

— Menteur ! Regarde, j'ai trouvé ça dans l'avion ».

Son portable entre les mains, je découvre en effet une photo de moi durant mon discours, le reste des étudiants confortablement installés. Le blog de la faculté fait état de notre prouesse et fait la liste des membres du groupe. Sur la photo comme en légende, est faite mention d'un certain Evan Markarian.

« Tu vois ! Une star ! s'amuse mon frère.

— Tu surestimes toujours tout ce que je fais, mais c'est gentil, le remerciai-je.

— C'est le rôle d'un grand frère de surveiller tout ce que fait le plus petit ! »

Heureusement n'as-tu pas les moyens de me surveiller, sinon tu verrais des gestes et tu entendrais des mots que tu aurais sans doute aimé ne jamais voir ou entendre. Étant donné que tu es suffisamment intelligent pour comprendre toutes mes allusions, je ne ferai donc pas référence à Evan.

« Les parents voulaient t'offrir un bijou pour te féliciter, étant donné que tu en portes de plus en plus, mais j'ai fait bloc : t'acheter quelque chose sans avoir ton avis serait ridicule. Il vaut mieux qu'on se mette d'accord et nous assurer que tu seras réellement heureux du cadeau.

— L'intention elle-même me ravit... Mais je te remercie encore une fois d'être lucide, c'est toujours compliqué d'offrir de tels cadeaux...

— Sans oublier qu'il faut éviter les doublons...

— Je n'ai que cette bague, tu sais, ce n'est ...

— Et le tigre en pendentif ? »

Je me raidis. Il va être difficile de lui montrer si jamais il voulait le revoir... Et, surtout, je réalise que...

« D'ailleurs, ça ne ressemble pas à un... »

Mon frère ne termine pas sa phrase et enfonce sa main entre deux des boutons de ma chemise pour faire sortir l'épée d'Evan. J'avais négligé cette possibilité. J'aurais dû la laisser à l'appartement, dans un coffret ou ailleurs. Je la porte tous les jours, oubliant parfois de l'enlever la nuit. Je retarde l'instant du retour, le tournoi est fini...

« Tu te l'es achetée quand ? Elle est superbe ! »

Je commence à paniquer et, pourtant, je dois à tout prix éviter de laisser paraître une telle émotion. Je n'ai d'autre choix que de nier...

« C'est un prêt, en réalité. Un ami savait que j'hésitais à acheter une nouvelle pièce, notamment dans ces formes-ci, un peu baroques. Il m'a proposé de l'essayer, pour vérifier si je m'y habituerais ou non... »

Voici une explication peu convaincante. Ai-je seulement d'autres choix...

« Et bien, tu as de la chance... Un bijou, c'est très personnel... Il doit t'apprécier pour avoir accepté de s'en séparer quelques jours ! ».

En effet...