Chapitre 24 : Chris

7 1 0
                                    

            Neige fonce sur le jeune homme posté sur le trottoir en face de chez moi. Il se baisse légèrement pour le caresser. Et moi, je reste là, sur le seuil de ma maison, incapable de faire un pas, trop percutée par la situation. J'aurais pu m'attendre à tout. Tout ! Sauf à ça. Sauf à lui. Il se relève alors que je n'ai pas bougé d'un millimètre. Pétrifiée.

﹘ Bonjour partenaire, dit-il simplement de sa voix calme.

Ces deux petits mots ont au moins le mérite de me sortir de mon atonie.

﹘ Je t'interdis de m'appeler comme ça ! je hurle. Tu as perdu ce droit il y a des années !

Il baisse légèrement les yeux, signe de son malaise. Il est conscient qu'il a fait une erreur. Et clairement, il en a fait plus d'une.

﹘ Pourquoi es-tu là ?

Mon ton est vraiment piquant, cinglant. Ce n'est pas ce que je souhaite particulièrement, mais de le voir, les souvenirs remontent, la peine ressurgit et sans que je ne le contrôle, mon corps, ma voix montre mon mécontentement.

﹘ J'ai besoin de ton aide.

﹘ Oh et puis quoi encore !

Pensant à peine à ce que je viens d'entendre, je prends la laisse de Neige et commence mon chemin. Après tout, j'étais partie pour une balade.

﹘ Je t'en prie, Chris, tu es la seule qui puisse me venir en aide.

Je reste muette et continue ma route. Il me suit, me talonne.

﹘ Chris... que faut-il que je fasse pour que tu m'écoutes ?! finit-il par tonner.

﹘ T'excuser déjà pour commencer ! je m'exclame en me retournant. Tu t'es enfui du jour au lendemain ! Sans te retourner ! Sans penser à ceux qui t'entouraient ! Sans penser... (à moi) Quatre années, Athan. Sans rien !

﹘ Quatre ans, trois mois, dix-sept jours et une heure depuis mon départ. Cinq heures de moins, depuis la dernière fois, que j'ai senti ton odeur.

Il m'a dit cela avec un calme olympien, en s'approchant doucement, jusqu'à se retrouver à quelques millimètres de moi et m'attraper une mèche de cheveux qui tombait sur le côté de mon visage. Il a grandi encore un peu depuis la dernière fois que je l'ai vu. Maintenant, il fait bien cinq centimètres de plus que moi. Je l'ai laissé approcher, hypnotisée par ce qu'il me disait. Je reprends mes esprits et lui repousse la main.

﹘ Si tu crois m'avoir comme ça, tu me connais bien mal !

Je me retourne contrariée par son mouvement et surtout son culot. Il m'attrape le poignet quand j'entame un pas dans la direction opposée. Je retourne violemment lui claquant ma main libre sur sa joue droite et je libère mon poignet plus énervée que jamais.

﹘ Je t'interdis de me retenir ! Ou même de me toucher ! Comme je te l'ai dit, tu as perdu tout droit avec moi il y a bien longtemps !

Je le cingle comme jamais je n'aurais cru en être capable alors même qu'il amène sa main à sa joue devenue rouge sous le coup de ma colère. Il m'a vraiment mise hors de moi.

﹘ Je suis navré Chris, je ne voulais pas, je... je... j'ai juste besoin que tu m'écoutes.

Ses yeux verts m'hypnotisent vraiment. J'ai du mal à rester en colère quand je le regarde dans les yeux, surtout qu'il a l'air particulièrement triste. Là où devant chez moi, je ne percevais rien ou au pire un peu de contentement, là, maintenant, je perçois un profond désespoir.

﹘ Je te supplie Chris, écoute-moi et après, peu importe la décision que tu prendras, me laisser ou m'aider, j'accepterai ton choix.

﹘ Bien, dis-je sèchement, tu as cinq minutes.

           Nous sommes au milieu de la rue, mais je ne lui laisse pas le choix. C'est ici et maintenant, ou jamais. Alors, il se lance. Il m'explique que son père vient de décéder dans un accident de voiture. Seulement, Athan ne croit pas à cette hypothèse. Il est persuadé qu'il y a anguille sous roche. Sans doute un rapport avec les recherches de Ed sur la mère d'Athan qui semble-t-il ont commencé à porter leurs fruits il y a environ quatre mois. Ed serait parti vers la ville voisine où elle était apparue pour la dernière fois, dans des registres officieux d'Amentis protégés. Il aurait perdu le contrôle de son véhicule. Mais dans le rapport des autorités, certains éléments ne collent pas.

﹘ Chris tu es la seule personne que je connaisse qui s'y entende un tant soit peu dans ce genre d'histoire et en qui j'ai confiance. Je ne veux pas parler de ça à n'importe qui. Si tu ne veux pas le faire pour moi, je comprendrais. Mais je me dois de te demander de le faire pour mon père. S'il te plait Chris. Aide-moi à découvrir la vérité.

Je réfléchis un instant. C'est vrai que j'en veux à Athan mais non seulement, son père a toujours été un amour avec moi et en plus, ce serait sans doute une nouvelle piste intéressante pour mon enquête.

﹘ D'accord. Je t'aiderai. 

Obliquatur (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant