Obliquatur (en réécriture)

Epilogue

﹘ Allez le nouveau, ça passera mieux la prochaine fois.

Mon apprenti est plein de contrariété. Comme tous les jeunes qui arrivent dans le programme d'initiation, il ne maîtrise pas un pourcent de ses capacités et se fruste quand il échoue à un simple exercice.

Il va rejoindre les rangs des novices, plantés devant moi, les yeux pleins d'espoir et de volonté.

﹘ Sachez que rien n'est jamais acquis. Vous êtes ici pour apprendre, pour grandir, pour vous endurcir. Vous prendrez le temps nécessaire pour maîtriser vos dons. Pour certains, ce sera presque inné. Pour d'autres, il vous faudra de la patience. Mais vous aurez tous quelque chose en commun : il vous faudra travailler dur, pour atteindre vos objectifs. Rien ne vient avec l'oisiveté. Filez maintenant.

Je ne me retrouve pas longtemps seul avant de voir un émissaire me convier au prochain Conseil.

﹘ Quand ?

﹘ Dans cinq minutes Monsieur.

Je prends le temps de parcourir le chemin qui sépare la salle d'entraînement des Obliquatur du nouveau siège du Cénacle. Il était nécessaire de créer un nouveau bâtiment pour le nouveau système. Une remise à neuf comme a dit Caleb à l'époque.

La population avait fait des ravages à la structure principale, la Tour Ambre était à peine encore utilisable, et par ailleurs, ils voulaient complètement repartir de zéro. Une nouvelle image pour calmer la population. Quatre ans ont passé, il reste encore beaucoup de choses à construire, mais de nombreuses choses ont déjà été mises en place par le nouveau Conseil, et aujourd'hui, les esprits se sont calmés.

J'ai passé près d'un an auprès des Amentis après la bataille Dimittis. Ce sont eux qui ont le plus souffert dans l'histoire. Je m'étais fait un devoir de les aider de mon mieux, de les accompagner pour se reconstruire. Je me suis relevé avec eux.

Après des mois à me morfondre, j'ai agi et j'ai sorti la tête de l'eau. Il le fallait. Comment aurais-je pu leur venir en aide si j'étais resté prostré dans mon deuil ? Impossible. Et au final, ils m'ont autant secouru que moi avec eux. Tendre la main. C'était aussi facile que cela.

J'ai vingt-six ans maintenant et j'ai pourtant l'impression d'en avoir cinquante. La vie a meurtri mon corps et mon esprit et à ce jour, plus de retour en arrière. Cela fait un peu plus de deux ans que je forme les nouveaux Obliquatur. "Qui de mieux que toi pour former la nouvelle génération à comprendre l'improbable, à y faire face, tout en respectant les individus" m'avait-dit Caleb.

Moi, je voulais une vie paisible, loin de ce genre de fardeau. Je voulais aller me perdre en Ecosse, ou en Norvège, là où personne ne se serait soucié de moi, là où j'aurais pu rester des heures à me prélasser dans la nature. Mais la vie n'est pas ainsi faite. Et je me retrouve à la Tour Opale, ancien quartier général de la Garde et aujourd'hui, centre d'entraînement pour Obliquatur et Amentis.

L'on me décrit souvent comme instructeur idéal pour ces jeunes. Réfléchi, avec une forte volonté de protéger les autres, comprenant le poids que peut représenter un don. Mais je sais au fond de moi, que ce qui intéressait le nouveau Cénacle, c'était ma capacité à capter les dons des autres, ainsi, je peux facilement stopper les événements si un étudiant dérape avec son don. Et je sais aussi qu'ils voulaient m'avoir à l'œil.

Je fais de mon mieux pour apprendre à ces jeunes à ne pas commettre les mêmes erreurs que moi ou que ceux que j'ai rencontrés dans ma vie, car ils sont notre avenir. Un nouvel avenir.

Je m'approche du nouveau Conseil, le nouveau Cénacle. Seul Caleb et Emilia sont de l'ancien régime, tous les autres ont été recrutés. Je n'ai pas fait partie du remaniement de notre gouvernement malgré les demandes insistantes de Caleb, je ne suis absolument pas fait pour gouverner. Je leur ai néanmoins fourni certaines clés pour réussir dans leur tâche de reconstruction.