𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏 | Odeur de caféine

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Il y avait des mots exprimés et des mots non exprimés. Parfois même des maux transformés en mots où les peines se glissaient.

Et il y avait lui : ce garçon à l'allure du vent.  Un vent violent, brutalisant l'océan jusqu'à ce que les vagues grossissent et s'éclatent sur le rivage. La tempête qui déchire le silence.

Il allait tout bouleverser, je le sentais.

Il avait des cheveux noirs de jais. Son corps était doucement caressé par le soleil en été et lentement embrassé par la pluie en hiver.

Il n'y avait que lui, ma passion pour l'écriture et ce café dont il avait décidé de passer la porte. C'était un jour ordinaire, suivant sa routine et sa monotonie. Les minutes s'écoulaient sans passion sur l'horloge murale en face de moi, par habitude d'émettre des Tic et des Tac à chaque seconde. Je ne l'avais jamais vu avant. Je passais pourtant mon temps ici, à m'asseoir à la même table, consommant la même boisson caféinée à trois reprises... On pourrait penser que c'est ennuyant ; moi ça me convenait. Rien ne me plaisait davantage qu'écrire des romans.

Si lui était le vent, moi j'étais les vagues. Je me laissais bercer sans lutter. Il n'y avait pas de raison de lutter, de toute façon. La marée était calme. Il ne fallait pas l'agiter.

Ce garçon était là, et moi je l'observais. Deux ans que je résidais dans la capitale française après avoir fui mon pays natal, et le voilà, apparu un matin où la rosée ne s'était pas encore dissipée. Presque deux ans donc, que je n'avais pas changé d'endroit, si bien que les employés me connaissaient suffisamment pour servir ma boisson sans que je ne passe commande.

Un café noir. Sans lait. Sans sucre.

J'aimais sentir l'amertume sur ma langue, la chaleur du liquide qui coule dans l'œsophage. Mes nuits étant éternellement blanches, j'avais besoin de ce plaisir addictif pour écrire. Écrire sans devenir fou. Mes pensées étaient noires, je les noyais dans le café. Et c'était agréable de taire les voix dans ma tête.

Sûrement aussi agréable que d'apercevoir plusieurs fois par semaine ce garçon s'installer à une table différente et tester tous les produits de la carte, du verre de sirop de menthe au gâteau le plus sucré.

Il n'était pas plus âgé que moi, peut-être plus jeune d'un an ou deux. Ses cheveux étaient courts, sombres. Trop sombres. Et ses lèvres, décorées d'un piercing juste en bas à droite. Souvent mes pupilles tombaient sur ses dents en train de s'amuser avec l'anneau. Il possédait des yeux ronds et noirs que des cernes ternissaient.

Jamais je n'avais osé l'approcher.

Ma position d'observateur m'allait et je m'inspirais de son comportement pour continuer à écrire mon nouveau roman.

Mais un jour, alors qu'il faisait orageux et que la chaleur écrasait Paris, il ne vint pas. Au début, je pensais à un contretemps, qu'un empêchement de dernière minute l'avait retenu et qu'il viendrait avant que la semaine ne se termine. Je l'imaginais déjà sourire à la serveuse, ravie de s'installer à ses côtés pour discuter, comme à son habitude. J'étais étonné de ne pas le voir craquer pour son corps élancé dans l'idée de la faire sienne. Puisque les signes étaient évidents : elle était intéressée.

Évanescence | TkOù les histoires vivent. Découvrez maintenant