Inlassablement

20 février 1997

Quelques heures auparavant je m'étais endormi, le cœur lourd. Cette sensation que je ne connaissais que trop bien depuis que Draco était entré dans ma vie. Mais ce sentiment avait pris une autre tournure ces derniers jours, il était bien plus intense, bien plus tragique. Triste à dire et absurde à admettre mais j'avais appris à vivre avec, comme si plus les jours passaient plus je domptais cette douleur, jusqu'à parvenir à cohabiter avec. Des petits coups à la porte permettant de rejoindre notre dortoir depuis la Salle Commune se sont élevés dans le silence. J'ai ignoré mais ils ont persisté réveillant d'autres de mes camarades. J'ai entendu Gabrielle se retourner dans ses draps, puis descendre de son lit pour aller ouvrir la porte.

- Malfoy ? Elle parlait d'une voix endormie.

- Gabrielle, la Serdaigle, je te dérange dans tes révisions ?

Sa voix était lointaine au pied des escaliers, bien sûr selon les vieilles règles de l'école et avec les nombreux sortilèges scellés il ne pouvait pas aller plus loin. Elle n'a pas répondu et a même commencé à fermer la porte. Mais il a repris.

- Excuse-moi, c'était idiot... Hadès est là ?

- Il doit être trois, ou peut-être même quatre heures du matin, par Merlin où veux-tu qu'elle soit ?

- Tu pourrais l'appeler ?

- Quoi ? Non, laisse là dormir. Laisse là tout simplement.

- C'est bon Gabrielle, je m'en charge.

Je m'étais assise sur le rebord de mon lit et j'étais en train de mettre mes chaussons pour rejoindre moi aussi la porte. Elle m'a lancé un regard incitant pour être certaine de cette décision, regard auquel j'ai répondu par un sourire rassurant. Elle est repartie se coucher tandis que j'entreprenais de descendre les escaliers. Il n'était plus là et devait m'attendre dans la Salle Commune.

- Pourquoi mets-tu une aussi belle lingerie pour dormir ici ? Il me regardait de la tête au pied.

- Je n'ai pas la force pour de telles absurdités. Soufflais-je.

- Tu dormais ?

- Oui.

Nous avons tous deux marqués un silence. On entendait la braise s'élever du feu de cheminée, me ramenant tout droit à des souvenirs passés avec lui. Je l'ai regardé plus intensément, quelque chose avait changé. Il paraissait différent.

- Tu as pleuré ? Je marmonnais.

Il n'a pas répondu à ma question mais il continuait de me regarder. Oui, il avait pleuré.

- Est-ce que tu voudrais bien être là pour moi ce soir ? Une larme roulait le long d'une de ses joues. J'ai vraiment besoin de quelqu'un maintenant.

Je ne lui ai pas répondu mais je n'ai pas pu m'empêcher de me précipiter auprès de lui pour le prendre dans mes bras. Il a niché sa tête au creux de mon épaule et j'ai senti une larme rouler le long de sa joue pour atterrir sur mon omoplate.

 - On pourrait aller à la Salle sur Demande ? Il parlait doucement.

- Qu'est-ce que tu lui demanderais là maintenant ?

- Un lit et du thé chaud. Il avait plongé ses yeux dans les miens.

- Draco je ne vais pas coucher avec toi. Je parlais froidement.

- Je ne parle pas de ça. Je veux juste dormir en te sentant à mes côtés. J'ai besoin de pouvoir dormir et avoir l'impression que rien de tout ça n'existe.

Je le fixais pendant qu'il parlait, et il l'avait remarqué car il reprit.

- Tu as raison c'est bête, je n'ai pas à te demander de faire ça pour moi.

- Non, je veux bien t'aider Malfoy, juste ce soir.

Nous nous sommes ensuite dirigés hors de la Salle Commune et nous avons traversé les couloirs en direction de la Salle sur Demande. Nous avons fait tout cela en silence. Il n'y avait pas besoin de parler, il n'y avait rien à dire. Seulement deux corps qui avaient besoin l'un de l'autre. Nous sommes entrés dans la pièce ou un grand lit était présent ainsi qu'une table disposée sur le côté avec une théière et deux tasses. Je me suis assise sur le lit en tailleurs pendant qu'il me servait une tasse chaude et se versait aussi le contenu d'une. Nous avons bu notre boisson en silence et nous nous sommes glissés dans les draps. Il s'est endormi plus vite que je ne l'aurai cru, et j'ai fixé le plafond en entendant le rythme de ses inspirations et expirations. Je le regardais dormir, il semblait paisible, mais il n'en était rien. Ses cheveux indisciplinés, un de ses bras sous l'oreiller, je détestais l'aimer autant. Je me suis finalement endormi un peu plus tard et le lendemain matin lorsque je me suis réveillée, il n'était plus là. La Salle sur Demande avait exhaussé mes souhaits puisque toutes mes affaires étaient posées sur la table où plus tôt avait été présent le nécessaire pour prendre le thé. Je me suis préparée et j'ai pris mon sac de cours avant de sortir et de rejoindre les couloirs pour commencer ma journée..