Chapitre 27 : Promesse à un loup

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Japon, Tokyo, Liones Academy, atelier de Mitsune, 23 juin 2500, 16h

« Non non non ! »

Mitsune arracha une page de son carnet à dessin et la réduisit en boule de papier avant de la jeter par-dessus son épaule. Cela faisait trois jours qu'elle avait reçu le sujet de son examen pratique, et elle n'avait toujours pas d'inspiration. Son atelier était jonché d'une multitude de feuilles réduites en boule, alors même qu'elle mettait toujours un point d'honneur à ne pas gaspiller du papier pour rien. Il lui restait encore très exactement une semaine avant l'examen pratique de ses camarades de classe, elle ne devait pas traîner. Mais, elle qui était toujours pleine d'inspiration, elle se retrouvait désormais souffrante du syndrome de la page blanche.

Tout en recommençant un croquis, elle lâcha un soupir, avant d'effacer avec sa gomme les traits qu'elle venait de tracer. Son sujet n'était pas si compliqué en apparence, mais il soulevait tellement de contradictions en elle que l'inspiration lui faisait défaut.

Illustrer ce qui est le plus important quand on est un héros.

Tel était son sujet. Mais elle ne savait pas dans quel sens elle devait prendre cet énoncé. Devait-elle prendre le mot « héros » dans le sens large, tel qu'il existait avant l'apparition des alters, ou dans le sens actuel, c'est-à-dire qu'on pourrait le remplacer par « héros pro » ? Et devait-elle illustrer ce qui était le plus important à ses yeux, ou ce qui était le plus important aux yeux de la société ?

Non, vraiment, elle n'en avait pas la moindre idée. Pour elle qui avait en horreur les pros et cette société qui faisait passer le classement avant ce que signifiait vraiment être un héros, ce sujet était cornélien, impossible à résoudre.

« Mitsune ? »

La concernée se retourna et remarqua que son camarade de classe/futur lié l'avait rejointe dans son atelier. Elle le salua et l'invita à rentrer, malgré les boules de papier qui jonchaient le sol. Le lycéen s'approcha, tandis qu'elle se reconcentrait sur son carnet à dessin.

Dire qu'elle était mal à l'aise quand il était là était un euphémisme. Dans un sens, elle était heureuse et soulagée qu'il veuille lui apporter son aide même si elle n'en voulait pas, mais dans un autre, elle se sentait coupable de l'embêter avec ses problèmes alors qu'il avait les siens et était furieuse qu'il se mêle de sa vie privée et veuille déterrer des choses qu'elle gardait soigneusement enfouies. Le fait qu'ils se lient après les examens ne lui donnait en aucun cas le droit de fouiller dans sa vie. Fenrir ne l'avait pas fait, lui. Il n'avait pas cherché à en savoir plus, même quand il avait fini par deviner la vérité. Il avait simplement mis brièvement le sujet sur le tapis, une seule fois, pour lui dire qu'il était là si elle voulait parler. Mais jamais, au grand jamais, il n'avait insisté comme Shoto l'avait fait quelques jours auparavant.

Elle-même ne lui posait jamais de question sur son passé, sur pourquoi il n'utilisait jamais ses flammes avant etc, alors même qu'elle brûlait de curiosité. Elle ne lui posait pas de questions, car c'était dans ses principes : la vie privée est privée, les gens ne doivent pas s'en mêler. On pouvait au mieux leur faire comprendre qu'on était là s'ils voulaient se confier, mais on ne devait en aucun cas fouiller dans leur passé, leur histoire, sans leur consentement. C'était un principe qui était naturel pour elle, elle qui pouvait prendre possession des gens, lire leurs pensées, et sentir, entendre et voir des choses indiscernables normalement, et ce, à tout moment. C'était un principe qui devrait être inhérent à toute personne un tant soit peu intelligente.

Machinalement, elle se massa l'épaule tout en continuant à gribouiller dans son carnet, sous l'œil vigilant de Shoto. Cependant, il ne dit rien et se contenta de ramasser les boules de papier pour les mettre à la poubelle. Il avait bien remarqué que la jeune artiste n'était pas à l'aise avec lui depuis trois jours, et il avait bien compris que c'était dû à l'insistance dont il avait fait preuve lors de leur discussion, ce jour-là. Il avait un peu peur de l'avoir trop brusqué en insistant autant, mais il ne regrettait rien de ce qu'il avait dit ou fait. Si elle avait besoin d'aide, il l'aiderait, qu'elle le veuille ou non. Sinon, quelle que soit la réelle nature de ses problèmes, elle n'avancerait jamais. Les seules personnes qui la connaissaient vraiment ne semblaient même pas prendre conscience de la réalité qui était en face d'eux, et Fenrir n'interviendrait pas car il lui était beaucoup trop loyal. En revanche, il pourrait peut-être l'aider à aider Mitsune.

Tianlong - Tome 1 : GenèseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant