𝐖𝐇𝐄𝐑𝐄 𝐖𝐄 𝐁𝐄𝐋𝐎𝐍𝐆.

𝟏𝟎.

—Combien de temps ?! s'écrie-t-il d'une voix puissante, m'arrachant de longs frissons, alors que mon regard reste bloqué sur le corps statique de Judas.

Son regard n'a jamais été aussi blanc, et sa main aussi froide.

—Je t'ai posé une question, crache-t-il avec un élan de mépris qui me frappe au visage, une veine se dessinant au milieu de son front, prête à exploser et souhaitant m'emporter sur son passage.

Je ne peux pas me dérober, alors je lui réponds à contre-coeur :

—Depuis ma vision. Je vois Judas depuis que j'ai eu cette vision dans la neige, il m'a dit que cela arrivait quand deux personnes se lient.

Un vase explose contre le sol, le parquais de son propre bureau, Judas allongée sur le sofa, et moi à genoux, à ses côtés.

—Vous n'êtes pas liés ! s'époumonne-t-il en s'avançant rapidement vers moi, le regard haineux, les flammes dansant dans ses prunelles désormais dorées.

D'une poigne féroce, il m'attrape le menton, me forçant à encrer mon regard dans le sien, alors qu'il réplique hostilement, les traits tirés par la colère :

—Parce-que si c'est le cas, je te tuerai quand il mourra.

Et sur ses dernières paroles, il part en coup-de-vent, faisant trembler les meubles de son bureau lorsque la porte se referme en claquant.

—Réveille-toi mon ange, une vision n'est pas censée durer aussi longtemps, chuchoté-je en caressant ses mèches ambrées, avant de me lever en le transportant dans mes bras, décidée à l'amener à mes appartements.

Cet endroit m'est étranger et particulièrement étouffant, et désormais, de nombreux morceaux de vase jonchent le sol.

Je tente de les éviter comme je peux, et une fois devant la porte, j'hésite.
Je pourrais me contenter de rester ici avec lui, mais ce bureau est celui du chef de l'organisation. Et en plus d'être parsemé de bouts tranchants, il n'est pas un bien à proprement parler.

Une chambre à protéger.

Un vampire n'a pas besoin d'invitation pour y pénétrer.

Car Elijah ne m'a pas invité.

Mon regard dérive vers le petit que je tiens entre les bras, et finalement, je prends ma décision.
S'il est resté caché aussi longtemps dans ce jardin secret, c'est qu'Elijah devait avoir une raison de ne pas l'exposer à une marrée de vampires affamés. Qu'ils soient sous ses ordres ou non.
Et bien qu'il ne soit pas le vampire que j'affecte le plus particulièrement en ce moment, je ne peux m'empêcher de lui donner raison.
Judas est une belle monnaie d'échange.
Et ici, il est vulnérable.
Je ne peux me permettre de l'exposer à des risques aussi élevés.

Cependant, choisissant de ne pas m'attirer d'autant plus de foudres, je dépose une petite note sur le bureau d'Elijah, mon écriture indiquant pour seul mot "chambre", avant d'enfin m'éloigner de cette pièce, tenant fermement le petit sorcier entre mes bras comme s'il était la seule chose que je devais protéger.

Discrètement, je referme la porte derrière moi.

Et pour la deuxième fois depuis ma transition, je choisis d'user de ma vitesse vampirique, sachant pertinemment qu'elle me videra de toute mon énergie une fois arrivés à destination.

Mais je n'ai pas besoin de cet énergie.
Judas, si.

Ainsi, en quelques secondes à peine, nous nous retrouvons devant le pas de ma porte, les cheveux légèrement emmêlés et les membres engourdis.
Je peux sentir son coeur battre la chamade contre ma poitrine, et le serre un peu plus fort contre moi, avant de le déposer délicatement sur mon lit, allongeant ses membres et le recouvrant d'une chaude couverture.