𝟐𝟓.

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La chaleur envahit la pièce, presque entièrement, m'étouffant presque. Le vent glacial bat pourtant son souffle contre les vitres qui nous entourent, glaçant la paroi translucide, mais j'ai cette étrange impression que l'air se raréfie.

—Arrête de bouger ou je termine son boulot et je t'arrache les jambes, me sermonne sèchement mon compagnon de route, mon bourreau et mon sauveur à la fois, alors que je ne peux m'empêcher de taper du pied contre le parquet, mouvant mes jambes qu'il tente vainement de désinfecter.

Consternée, je suis tentée de lui balancer son eau oxygénée au visage, ainsi que la chaise sur laquelle je demeure sagement assise, mais je me retiens, attendant qu'il soigne et panse inutilement mes blessures.

Nous avons dû nous battre, au sens littéral, pour déterminer qui aurait le fin mot de cette histoire.
S'il gagnait, je devais me laisser faire en me taisant, et si c'était mon cas, il me servirait un verre de son sang pour guérir plus rapidement. Bien qu'il n'ait jamais approuvé cette partie.
Il ne m'a jamais lancé un regard aussi noir qu'au moment où cette idée a eu l'audace de franchir mes lèvres.

T'a-t-on déjà traité d'enfoiré méprisant ? fulminé-je en me questionnant sincèrement sur l'issue de sa réponse.

La pression sur mes cuisses se fait plus forte, comme s'il réagissait à ma question quelque peu insolente, et je ne peux empêcher un mince geignement s'échapper d'entre mes lèvres. Mes plaies sont encore très fraîches, l'acide continue d'agir et il semble en profiter.

Je lui adresse un regard haineux.

Pas en face à face, non. Et toi, t'a-t-on déjà traité de petite garce arrogante ? rétorque-t-il en jetant le coton qu'il utilisait pour nettoyer mes plaies, désormais imbibé de sang.

Mon visage s'approche lentement du sien, les prunelles toujours vibrantes de cette colère sourde que je ressens en sa présence.
Mais le mépris que j'éprouve à son égard ne semble pas l'intimider. Il ne sourcille pas. Au contraire, ses lèvres se relèvent en un mince rictus amusé.

Tu as épié le moindre de mes mouvements durant des années, tu devrais le savoir, répliqué-je finalement avant de baisser les yeux vers ses doigts qui frôlent à nouveau ma peau, pansant mes cuisses à l'aide de bandages qui s'avèreraient inutiles si j'avais du sang à ma disposition.

C'est vrai. Et j'ai moi-même la réponse à cette question, relève-t-il avant de reculer doucement, ses iris vibrant de leur couleur naturellement ambrée, toujours rivées sur mon visage, comme s'il découvrait mes traits pour la première fois.

Curieuse, j'hausse un sourcil inquisiteur, à la fois amusée et anxieuse à l'idée d'entendre sa réponse.

Jusqu'où t'es-tu aventuré ?

Je suis nerveuse.
Les bandages me grattent, oppressent mes muscles et me donnent l'impression de réduire ma puissance, mais je ne les touche pas. J'ignore la faim qui tiraille à nouveau mon ventre, l'air qui se raréfie de plus en plus et les battements de mon coeur qui alourdissent mes sens. J'ignore tout, sauf sa présence.

Mon attention est entièrement rivée sur lui, qui se redresse finalement, les épaules crispées et tendues, contrastant avec son allure confiante et son air moqueur dont il ne se départit pas.

C'était un jour d'été. La chaleur était écrasante, mais tu devais remplacer ta tante au marché, et vendre les oeufs que vous aviez récolté, commence-t-il gravement, imbibant le nouveau coton d'alcool, avant de le presser contre les brûlures qui parcourent impunément mes jambes.

Manquant brusquement de m'étouffer, je me mords la langue, et me retiens de défaire ces maudits bandages qui me crispent d'autant plus.
Ces détails sont si enfouis dans ma mémoire que je ne suis même pas sûre de m'en souvenir correctement. Alors comment le peut-il ?

𝐖𝐇𝐄𝐑𝐄 𝐖𝐄 𝐁𝐄𝐋𝐎𝐍𝐆.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant