Chapitre 9

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Eddy claqua sa porte d'entrée en rentrant chez lui, exténué. Il retira maladroitement ses chaussures, les abandonnant négligemment sur le tapis de l'entrée, ne prenant pas le temps de les ranger. Il usa de ses jambes fatiguées pour aller à sa chambre sans passer par la salle de bain. La douche attendrait demain matin, il était bien trop épuisé pour ne serait-ce que porter le jet d'eau sur son corps. Eddy ne perdit pas temps pour retirer son pantalon, l'abandonnant sur le sol de sa chambre avant de se jeter à plat ventre sur son lit défait. Il ferma les yeux sans pour autant trouver le sommeil, savourant le fait de ne plus être contraint de porter son corps sur ses pieds.

Sa maison était un véritable foutoir depuis quelques jours, il fallait qu'il se force à faire un brin de rangement et de ménage dans les jours à venir. Mais pas ce soir. Il était déjà vingt-et-une heures et donc hors de question pour lui de s'embarrasser du bruit irritant de l'aspirateur. Peut-être demain matin s'il trouvait la motivation.

Et si une dégénérée ne s'amuse pas à m'appeler à trois heures du mat'.

Le flic soupira avant de se retourner sur le dos, fixant son plafond sans but précis. Il n'avait déjà pas besoin de faire de vaisselle puisqu'il avait commandé une pizza hier soir et que Lauren avait pris des plats chinois qu'ils avaient mangés au bureau à dix-huit heures trente. C'était déjà un bon point. De toutes les tâches ménagères, c'était de loin la vaisselle qu'Eddy détestait le plus. Alors savoir qu'il avait déjà ça de moins à faire le réconforter en quelque sorte.

Depuis qu'il avait pris en charge cette enquête qui prenait des proportions démesurées, Eddy n'avait plus de temps pour lui, et encore moins depuis qu'il avait décidé de se mêler des affaires de Lauren. Il ne voulait pas la savoir au volant d'une voiture tant qu'elle serait épuisée comme elle l'était en ce moment. S'il était rentré tard chez lui, c'était parce qu'il avait raccompagné Lauren chez elle, s'infligeant un long détour. Et il ferait de même demain matin avant de passer une journée entière en voiture pour questionner les proches des six victimes assassinées par Mirror. C'était ainsi qu'il avait baptisé le meurtrier après que Lauren leur ait partagé son ressenti dans la matinée.

Il reproduit les meurtres dans leur chronologie inverse, un peu comme le ferait un miroir.

Eddy ne faisait que répéter cette phrase dans sa tête depuis qu'elle avait été prononcée par sa collègue. Quelque chose le dérangeait mais il n'arrivait pas à savoir quoi. Il avait cette horrible impression d'être à deux doigts de la solution sans pour autant parvenir à la toucher. C'était...

Frustrant. Décourageant. Et impossible d'en parler à Lau pour avoir son avis sur la question vu je ne sais même pas ce qui me dérange.

Plus il pensait à Lauren, plus les événements de la journée lui revenaient en tête. Il ne parvenait pas à occulter de son esprit la pâleur extrême du visage de sa collègue après qu'elle ait titubé avant de se raccrocher à son bureau. Il ne parvenait pas à oublier les tremblements excessifs de sa main droite et de ses jambes devant la machine à café. Il ne parvenait pas à ignorer que, malgré lui, il s'était inquiété.

Lauren était forte, il était incapable d'en douter. Mais cette force de caractère ne cachait-elle pas finalement une certaine faiblesse ? Il était persuadé que l'allure constamment fatiguée de sa coéquipière n'était due qu'à son acharnement au travail qui la hantait également la nuit, et que tout ce dont elle avait besoin était de prendre quelques jours de vacances pour revenir plus en forme que jamais.

Et si ça ne cachait finalement pas quelque chose de plus grave ?

Prit d'un soudain élan de curiosité, Eddy s'empara de son smartphone pour effectuer quelques recherches concernant sa collègue. Maintenant qu'il y pensait, il savait qu'elle avait toujours exercé en Californie avant d'être mutée ici, mais il ignorait quel genre d'enquête elle avait eu à sa charge. Comme il vouait une confiance aveugle au commandant Johnson, il avait suffi que celui-ci lui dise que sa nouvelle collègue était des plus brillante et n'était plus à son coups d'essai malgré son âge relativement jeune pour qu'il le croit sur parole. De ce fait, il ne savait rien des enquêtes qui avaient plus que grandement convaincu Johnson de l'intégrer à sa brigade.

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