03. Mise au Point

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Lorsque j'arrive à l'étage, je m'aventure dans les couloirs à la recherche de ma chambre – honnêtement, il n'est pas si simple de s'y retrouver ici. Avec le nombre de pièces que cette maison contient, on pourrait presque se croire dans un labyrinthe insolvable. Ce n'est qu'après ce qui est proche de l'éternité que je parviens finalement à la retrouver.

Restée dans le même état que je l'ai laissée précédemment, j'observe ma valise et mes vêtements retrouvés par terre d'un air désespéré, prête à me jeter sur mon lit telle une adolescente qui vient de se faire disputer par ses parents, sauf que c'est le fils de mes patrons qui vient de me rembarrer.

Pour un premier jour de travail ce n'est pas vraiment ce à quoi je m'attendais ; je n'ai pas envie de me prendre la tête dès mon arrivée, alors je décide de ne pas m'attarder sur lui – très franchement, il n'en vaut pas la peine.

Ainsi, je décale la tenue de travail toujours posée sur mon lit et la pose à l'autre bout du matelas tandis que je m'étale sur ce dernier. Relâchant tout mon épuisement, j'admire le plafond impeccablement blanc en fredonnant l'une des chansons préférées de ma mère qui a bien dû l'aider à charmer mon père, Bohemian Rhapsody de Queen.

Je souris en me remémorant le spectacle qu'elle nous offrait chaque fois qu'elle entendait cette chanson passer. Plus rien ne pouvait l'arrêter, exactement comme mon père pour la plupart des chansons sortant des années soixante-dix – je crois qu'il voulait simplement laisser celle-ci à ma mère.

Souvent munie de la télécommande ou d'une brosse à cheveux, elle chantait le plus fort possible, se laissant emporter par la musique. Tous les deux, nous l'écoutions. Nous la suivions même, parfois. La plupart du temps, mon père ne pouvait s'empêcher de rire face à ce soi-disant concert.

De mon côté, j'admirais ma mère.

Elle chantait sans penser à rien, sans penser au monde extérieur. Moi aussi, je voulais me retrouver dans ce monde magique dans lequel elle voyageait. À seulement sept ans, j'avais trouvé ma plus grande inspiration : la passion de ma mère dans tout ce qu'elle entreprenait.

Mon cœur se serre brusquement lorsqu'il se rend compte que jamais plus je ne pourrai assister à cette scène.

À cette pensée, je me secoue la tête et me relève vers ma valise, ayant récupéré mes forces. Dès lors, retour au point de départ : je continue mon rangement. Me changer les idées et égarer les mauvais souvenirs qui me viennent en tête à travers le nettoyage, c'est bien ce dont j'ai besoin. Et la dernière chose que je souhaite, c'est de repenser au brun un peu trop attirant du salon.

C'est pourquoi je ne perds pas de temps pour tout installer dans les différents rangements. Je suis un peu troublée par tous ces vêtements qui m'ont été donnés, mais je me dis que ça doit seulement être ce que les riches font.

Je ne compte pas les utiliser tout simplement parce que je n'ai rien à faire avec des vêtements qui ont l'air aussi chers – si je venais à en tâcher un, devrais-je le repayer ?

Un seul de ces vêtements fait probablement le montant de cinq mois de loyer à Los Angeles, c'est pour dire.

À peine vingt minutes après ma nouvelle résolution, j'ai ainsi fini de ranger toutes mes affaires. Dans le même élan, je saisis ma robe de travail et remplace mes pauvres vêtements avec celle-ci pour enfin effectuer mon travail – je hais me dire que je fais exactement ce que cet abruti attend de moi.

Dans le couloir, je croise Amala qui me dit au revoir, prête à s'envoler elle aussi. Elle m'apprend qu'elle prend un avion différent que le couple Davis, c'est pour cela qu'elle peut partir un peu plus tard.

Sensitive Love I : ÉmergenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant