38. Belles Cicatrices

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AARON

Dans ma tête, tout est confus. Toutes mes pensées se percutent et se bousculent entre elles : c'est le désordre complet.

Depuis hier, je n'arrive plus à penser correctement. Comme si une partie de mon cerveau s'était déconnectée après avoir vu la vidéo, tout n'est que confusion. Ça ne fait que tourner en boucle dans mon cerveau. Encore et toujours, je la vois. Dans cette piscine. En train de se noyer. En train de perdre peu à peu sa respiration avec personne aux alentours capable de l'aider.

Était-elle sous drogue ? Non, impossible.

Sous alcool ? Je veux dire non, mais c'est l'idée la plus probable.

Il est clair qu'elle avait trop bu et que son corps n'a simplement pas eu le réflexe de se débattre avec l'eau. Putain.

Je n'en peux plus ; je suis à bout. Je ne suis pas en colère, mais enragé. Contre moi. Contre Wesley. Contre mon père. Je suis énervé contre le monde entier qu'elle ait dû subir ça.

Au fond de cette piscine, qu'a-t-elle ressenti ?

À quel point s'est-elle sentie impuissante ?

Ce que j'éprouve actuellement est bien au-dessus de ce que je peux contenir.

Tout ça est-il réel ? Non, je dois être en plein rêve – cauchemar. Ou peut-être que c'est le coup de l'alcool ? C'est la seule explication plausible à tout ça, la seule à me dire qu'elle n'a pas vraiment vécu ça.

Elle se noyait, putain.

Ce n'était pas un simple jeu entre ados, elle se putain de noyait. Et personne autour n'en avait quelque chose à foutre. Tout le monde s'en tapait, tout le monde faisait comme si elle n'était pas présente. Elle était là, à supplier qu'on l'aide et personne ne l'a fait.

C'est quoi ce putain de bordel ?

Je ne peux pas faire face à ça. Je ne peux pas affronter quelque chose comme ça. Toutes ces trouvailles, ça ne me fait pas la détester ; ça me donne juste envie de me rapprocher d'elle pour que rien de tel ne lui arrive jamais plus.

Un instant, j'avais l'impression de voir sa vie défiler sous mes yeux. Je pouvais voir à quel point elle avait peur. Elle était terrifiée. Et la façon dont elle cherchait désespérément quelqu'un pour la sortir de là... C'était trop douloureux.

Trop douloureux, putain.

Me redressant, je pose mes mains sur mon visage en grognant ma frustration. Par réflexe, je récupère mon téléphone où j'aperçois un appel manqué de ma mère qui date d'il y a quelques heures.

Je fronce les sourcils et m'apprête à la rappeler lorsqu'une boule de poil noire arrive sur mes genoux. Je souris en voyant le museau de Fletcher, le petit chien de Karen. Je le caresse doucement et appuie sur le numéro de ma mère pour la rappeler, mais je tombe directement sur son répondeur.

J'imagine qu'elle est en réunion alors je n'y pense pas plus et décide de patienter son rappel devant une bonne petite série – c'est-à-dire Brooklyn Nine-Nine.

Tandis qu'Andy Samberg apparaît à la télévision dans son rôle de lieutenant, j'attrape la télécommande et augmente le volume. En ayant été incapable de fermer les yeux de la nuit, cette série est bien la seule à me faire tenir le coup.

Le générique arrive et j'en profite donc pour aller me chercher quelque chose à manger dans les placards de Karen, sous les grognements de son chien. Rapidement, je trouve un trésor et retourne devant l'épisode avec un paquet de chips dans les mains.

Sensitive Love I : ÉmergenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant