30. La Fin d'une Ère

1.6K 81 4
                                    

ALISON

Complètement essoufflée et sur le point de m'évanouir, j'arrive finalement à la réception. Dans une grande précipitation, je pose mes deux mains sur le comptoir dans un bruit un peu trop sourd afin de signaler ma présence au jeune homme qui se tient derrière un ordinateur. Ce dernier remonte son regard sur moi et j'en profite alors pour poser ma paume sur mon cœur dans l'espoir de soulager ma respiration.

Après tous les kilomètres que j'ai parcouru, je suis plutôt étonnée d'avoir tenu sans m'arrêter. Les footings m'ont bien aidé, mais disons que je ne suis pas encore au point pour le faire à pleine vitesse.

Tandis que mes poumons se soulagent de l'air qu'ils obtiennent enfin, l'homme de la réception me regarde, suspicieux et suivant chacun de mes mouvements. J'aimerais lui offrir un sourire, mais je ne peux pas me permettre de manquer une inspiration, alors j'essaie encore de calmer mes pulsations de cœur avec lui qui attend probablement que je lui explique ce que je fais dans cet hôpital.

- Excusez-moi, commencé-je en soufflant. Il y a un...

Première inspiration.

- Un homme qui...

Deuxième inspiration.

- ...a été amené ici il y a quelques heures...

Troisième respiration.

- ...et j'ai besoin de savoir s'il va bien.

Il lève un sourcil en me sondant durement.

- Je peux connaître son nom ? demande-t-il en plaçant ses doigts au-dessus de son clavier, prêt à taper.

- Il s'appelle...

Quatrième inspiration.

- Vous êtes là pour Takeshi Yasumori, c'est ça ? intervient une voix dans mon dos.

Je dévie mes yeux vers la gauche où une femme en blouse blanche se tient contre le mur, un gobelet de couleur taupe à la main.

- Vous êtes celle qui a appelé les ambulances ? Le pauvre. On l'a retrouvé complètement ensanglanté dans le salon. C'est vous qui lui avez fait ça ?

- Quoi ? Non, je...

Elle éclate de rire.

- Relaxe. Je ne fais que plaisanter.

Dans mon esprit, je repasse la difficulté que ça a été de le tirer depuis la cave jusqu'en haut, ce qui était une chose plutôt risquée concernant son état, mais j'ai trouvé une planche afin de limiter les dégâts. L'hôpital était loin ; j'ai mis près de trois heures pour m'y rendre - mon téléphone était mort, alors je n'ai pas pu appeler une voiture.

Pendant ces trois heures, je n'ai cessé de penser à son état, à s'il s'arrangeait, à si les ambulanciers ne l'avaient pas perdu sur la route. Qu'elle me dise ça, ça me rassure déjà sur un point, mais ça ne reste pas suffisant pour complètement me soulager. J'ai peur de ce qu'on peut me dire.

Sur mon chemin jusqu'ici, j'ai réfléchi à toutes les possibilités en écartant celle qui me ferait le plus de mal. Tout ce que je veux savoir, c'est qu'il va bien et qu'il va s'en sortir.

Pas de mauvaise nouvelle. Pas de répétition de ce qui est arrivé dans le passé. Je n'ai pas envie de m'énerver une nouvelle fois contre un docteur simplement parce qu'il ne m'annonçait pas la phrase que je voulais.

Elle doit me dire qu'il va bien.

- Est-ce qu'il... Est-ce qu'il va bien ?

Je déglutis, attendant sa réponse.

Sensitive Love I : ÉmergenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant