Chapitre 46 : Faut qu'on parle

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Finalement, Jiu réussit à emménager dans le grenier pour la fin du séjour, prétextant qu'elle ne voulait pas déranger les couples, ce qui était partiellement vrai. Deux jours s'étaient écoulés depuis. Les filles les avaient passés à l'intérieur, alternant entre piscine, chambre et télévision. Elles n'étaient pas revenues parler à Jiu, et tant mieux. Il ne restait maintenant que six jours.

Handong n'était pas non plus retournée vers Jiu, et cette dernière ne savait pas si elle devait commencer à désespérer ou lui laisser encore du temps. Mais elle voyait souvent la chinoise seule un peu partout dans la maison, avec une drôle expression sur le visage. D'un côté, ça la rassurait, car elle savait qu'elle avait réussit à la torturer un minimum, mais d'un autre, elle se demandait si Handong n'allait pas finir par la détester pour ça.

D'ailleurs, à propos de détester, Jiu était sûre de distinguer des tensions dans le groupe. Ou plutôt dans les couples. Ils avaient l'air moins... peut-être complice qu'avant. Depuis qu'elles avaient voulu l'aider, en fait. Pourvu qu'elle n'y soit pour rien. Elle s'en voulait déjà pour beaucoup de choses, pas besoin d'en rajouter une couche.

Ce matin-là, Jiu s'était une nouvelle fois réveillée la première. Généralement, pendant leurs jours de vacances, les filles du groupe dormaient jusqu'à parfois 10h passé. Sauf Dami qui ne dort pas beaucoup. Mais elle reste au lit jusqu'à ce que Handong se réveille. Elle avait donc encore 2h et 10 minutes de tranquillité. Elle quitta sa chambre et descendit avec ses affaires dans la salle de bain du rez-de-chaussée. Elle profita de ce calme pour prendre son temps sous l'eau, et sortit de la pièce quarante minutes après ça.

Elle alla ensuite à la cuisine se préparer un bol de Kellogg's au chocolat et s'installa à la table de la cuisine après avoir pris une cuillère, toujours sans faire le moindre bruit. Pas de problème pour les parents de Handong qui avaient des bouchons d'oreilles, mais elle ne voulait vraiment pas réveiller les autres filles. Elle alluma son téléphone et commença à jouer dessus avant d'entendre le bruit d'une porte qui s'ouvre et des paroles à l'étage. Elle s'immobilisa par réflexe et tendit l'oreille, reconnaissant les voix de Handong et Dami.

- Tu vas me dire ce qu'il t'arrive, oui ou non ? demanda la rappeuse, la voix trop haute pour que ça soit une simple conversation normale.

- Mais je vais très bien ! répondit la chanteuse sur le même ton en marchant dans le couloir.

- Tu plaisantes, j'espère ? Depuis deux jours t'es bizarre ! Tu ne me parles presque pas, et les rares moments où on parvient à être seulement toutes les deux, t'es distante et tu ne me laisses même pas t'embrasser une fois ! J'ai fait quelque chose de mal ?

- Pour la cinquième fois : non, tu n'as rien fait ! Maintenant laisse-moi passer !

- Tu vas où ?

- À ton avis, dans cette direction ? Prendre une douche ! Pourquoi, je n'ai pas le droit d'y aller seule ?

- Si... grommela Dami en se mettant sur le côté pour qu'elle puisse passer. Et après ?

- Mais fous-moi la paix ! s'écria Handong avant de claquer la porte de la salle de bain et de la fermer à clé.

- Merde !

Dami continua de marcher dans le couloir avant de descendre l'escalier presqu'en courant. Elle arriva dans la cuisine et pointa Jiu du doigt.

- Toi, faut qu'on parle, lui dit-elle, un air sévère sur le visage.

- Comment tu as su que j'étais ici ? demanda la leader en faisant discrètement reculer sa chaise de quelques centimètres, un autre réflexe.

- Tu fermes toujours ta porte, mais là elle est grande ouverte.

Bordel. Jiu était tellement concentrée sur le fait d'être silencieuse qu'elle avait oublié de la refermer.

- Qu'est-ce que tu veux ? finit-elle par dire.

- Tu sais pourquoi Handong est bizarre comme ça ?

- Pourquoi je saurais ? C'est ta copine, pas la mienne.

- Comme une intuition... elle est comme ça depuis que vous avez passé la journée seules dans cette maison. Qu'est-ce que tu lui as dit ? Tu lui as parlé de... de ce qu'on a fait pendant qu'elle était dans le coma ? s'inquiéta-t-elle, soudain effrayée.

Jiu en resta sans voix. Quel culot. La situation lui parut alors tellement irréelle qu'elle éclata de rire, sous le regard étonné de Dami.

- J'ai dit quelque chose de drôle ?

- Mais tout est drôle, tu ne trouves pas ? rigola l'ainée en se levant, la regardant droit dans les yeux. C'est toi qui trompe ta copine avec moi, et tu oses vraiment demander si c'est à cause de moi qu'elle te fait la gueule ? Franchement, pourquoi je lui aurais dit ? J'ai rien à y gagner. En plus c'est toi qui m'a attiré à toi, au départ, non ? C'est peut-être de ta faute, qui sait ?

- Tu as répondu à mes avances, répondit Dami, à court d'idée.

- T'avais qu'à pas me les faire ! répliqua immédiatement Jiu. Certes, je suis en tort aussi, mais je ne suis pas celle qui a commencé.

- Peut-être bien que si, lui dit Dami après quelques secondes d'hésitation.

- Vraiment ? Et j'ai fait quoi, alors ?

- Tu m'as embrassé, lui rappela la plus jeune. Dans ma chambre.

- Et alors, c'est quoi le rapport ? Tout ce que je voulais, c'était te filer un électrochoc assez puissant pour que tu me lâches et me laisse tranquille.

Dami ouvrit la bouche pour en rajouter une couche, mais elle fut interrompue par Sua qui arriva dans la pièce à son tour, encore à moitié endormie.

- Vous pourriez faire moins de bruit, s'il vous plait ? On vous entend depuis l'étage, soupira la danseuse en se frottant les yeux, avant de réaliser qui se tenait devant elle. Merde, il se passe quoi, ici ?

Dami marmonna une réponse incompréhensible avant de partir et de remonter dans sa chambre, en oubliant pas de claquer bien violement la porte, ce qui, de l'avis de Jiu, devrait suffire pour réveiller absolument toutes les dernières endormies. Le bruit acheva en tout cas de réveiller complètement Sua, qui avança vers son amie d'un pas rapide.

- C'était quoi, ça ? J'ai pas tout bien entendu mais j'ai compris l'essentiel. T'es au courant que Handong est aussi à l'étage, n'est-ce pas ?

- Elle est sous la douche, répondit simplement Jiu avant de se rasseoir à sa place. Elle pense que c'est de ma faute si sa copine lui râle dessus.

- Et c'est le cas ?

- Aucune idée, je ne suis pas dans sa tête.

- Va parler à Handong. Tu dois arranger les choses, sinon l'ambiance dans le groupe va devenir pénible.

- Non. Je vais la laisser tranquille, comme promis. Et il me semble avoir dit que je ne voulais plus de vos aides qui ne marchent pas vraiment, dit Jiu en la fixant.

- Je sais, mais tu restes ma meilleure amie, et...

- Sua, viens ici, intervint Siyeon en bas de l'escalier, les sourcils froncés.

- Attend une minute, Siyeon, je dois juste...

- Maintenant, Bora, la coupa sa femme d'un ton sec.

Sua haussa d'abord les sourcils, car c'était très rare que Siyeon l'appelle par son vrai prénom... sauf quand elle était en colère. Elle courut presque pour revenir vers elle et tenta de la prendre dans ses bras, mais elle la repoussa.

- Toi et moi, faut qu'on parle, lui dit Siyeon.

Ne sachant pas si Siyeon allait éclater ici ou dans leur chambre, Jiu préféra partir et descendit au sous-sol, au bord de la piscine. Elle s'assit sur un des transats et termina son bol de céréales décolorés en fixant l'eau. Elle n'était pas revenue ici depuis qu'elle était tombée dedans et que Handong l'avait sauvée. Heureusement, la vue du liquide ne lui causa aucun trouble, car elle n'aurait pas su remonter pour le moment. Déjà, les premiers cris de l'engueulade de Sua et Siyeon parvinrent à ses oreilles. À cause d'elle ? Sûrement, vu la tête de Siyeon. Elle fouilla dans la poche de son pantalon avant d'en sortir ses écouteurs. Elle les brancha et lança une playlist au hasard. Peu importe, tant qu'elle ne les entendait plus.

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