48| Seul au monde.

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Arrivé en plein milieu de la rue où il avait quitté Yros, Thomas avançait avec la désagréable impression que tous ses membres pesaient dix fois plus que ce qu'il pouvait supporter. Comme s'il devait les traîner derrière lui pour avancer. Chaque pas était lent et épuisant, chaque mouvement lui demandait un effort insupportable. Lui qui était un IGA, ne se sentait pas capable d'effectuer une autre téléportation. Son regard était passé d'un vert lumineux à un vert sombre, opaque. Les larmes qui s'y tapissaient, ajoutaient un effet vitreux à ce sombre regard. Et sur cette vitre de chagrin, se reflétait un sentiment de trahison. La trahison commise par un être cher, extrêmement cher...

Il faisait vraiment froid, et les températures ne cessaient de chuter. Thomas ressentait les rafales de vent glacées s'abattre sur son visage comme d'énormes gifles. Mais il ne rabattit pas sa capuche sur sa tête pour s'en protéger et continua d'avancer. La rue était presque vide car le froid avait renvoyé tous les passants chez eux. Les commerçants, au chaud à l'intérieur de leurs magasins, se demandaient qui pouvait bien être ce courageux jeune homme qui marchait dehors avec seulement un pull, une écharpe et une petite veste sur lui. Pourtant, aucun d'entre eux ne vint lui proposer de s'asseoir quelque minute à l'abri du froid.

Epuisé, Thomas se demandait si il pourrait parvenir à atteindre le château avec ses pieds pour seul moyen de locomotion. Il avait un peu d'argent sur lui pour rentrer en voiture, mais c'était celui d'Yros. Et utiliser son argent était bien la dernière chose que Thomas avait envie de faire. Il se sentait vulnérable. Comme si un mur venait de tomber, lui laissant admirer une facette du monde qu'il n'aurait jusqu'ici jamais pu envisager : qu'Yros lui mente droit dans les yeux sur quelque chose de si important lui brisait le cœur. Thomas lui avait tout dit. Il lui faisait encore plus confiance qu'à sa meilleure amie Clara ou encore à son frère.

Il... Comment Yros avait-il pu ? Thomas avait beau tourner ce problème dans tous les sens, il ne comprenait pas. Peut-être qu'Yros se sentait effrayé à l'idée que Thomas s'en aille, mais ce n'était pas pour autant qu'il serait parti sans ne jamais revenir. Il avait découvert un nouveau monde merveilleux, habité par la première personne à être tombé amoureuse de lui. Bien évidemment que Thomas serait revenu ! Mais même malgré le temps qu'ils avaient passé ensemble, son âme-sœur s'était bien gardé de lui dire la vérité. Il l'avait réconforté dans les moments où sa famille lui manquait au point d'en pleurer. Il l'avait réconforté et rassuré sans jamais rien lui dire. Et malgré tous les efforts que Thomas faisait pour se persuader du contraire, son esprit ne clamait qu'un seul mot : trahison.

Plus tard, alors que l'après midi touchait à sa fin, Thomas arriva enfin au château. Il était gelé à l'intérieur comme à l'extérieur. Les employés du château le regardèrent entrer avec peine. Pourtant, aucun d'eux ne s'avança pour lui demander s'il allait bien. Car au fond d'eux, la jalousie qu'ils nourrissaient à son égard ne s'était pas estompée.

Le châtain monta sur une plate-forme et la programma pour son couloir. Sur place, il se dépêcha d'arriver à sa chambre et ouvrit brusquement la porte. Yros était entrain de lire des documents importants concernant l'entreprise familiale. En entendant la porte s'ouvrir, il sourit et redressa la tête.

-T'en a mis du temps dis donc. T'es rentré à pieds ?

Ce n'est qu'ensuite qu'il constata l'état dans lequel se trouvait Thomas. Tout de suite, Yros se leva et se précipita à sa rencontre.

-Thomas ! T'es gelé ! Qu'est ce qu'il s'est passé ?

Le concerné ne répondit rien et se laissa entraîner jusqu'au lit, où il s'assit. En posant mille et une questions qui n'obtinrent aucune réponse, Yros lui retira ses chaussures, son manteau, son écharpe et son pull. Puis il choisit un gros sweatshirt lui appartenant et l'enfila à son petit-ami, avant de l'entourer d'un épais plaid bleu. Thomas le regarda faire toujours sans un mot. Comment un être si gentil, si merveilleux, si attentionné, pouvait faire une telle chose ?

Liés à jamais. [bxb]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant