72 | Mission infiltration.

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Le voyage fut très inconfortable ; une dizaine de minutes après qu'Ofos ait refermé la caisse, celle-ci avait été transportée dans le camion qui allait livrer au château.

Plié en quatre à l'intérieur, Thomas s'efforçait de penser à autre chose qu'à ses membres engourdis, à la température glaçante du métal froid qui composait la caisse contre sa peau, et à la constante frayeur qu'à tout moment, il soit découvert. Il ne pouvait rien voir autour de lui et s'appliquait donc à percevoir le moindre son qui puisse lui donner une quelconque information sur sa position.

Il n'avait aucune nouvelle d'Ofos non plus. Tout était silencieux - si ce n'était le bruit des roues de la voiture filant à toute vitesse - et une seule forme de vie lui parvenait : le rire bruyant des deux livreurs qui conduisaient le véhicule.

-J'en ai une bonne, j'en ai une bonne ! S'exclama l'un d'entre eux. Comment appelle-t-on un IGA qui ne sait pas courir vite ?

Thomas supposa que son collègue réfléchissait puisqu'il y eut un long moment de silence, avant que celui-ci ne réponde :

-Euh, je sais pas... Un ischirien normal ?

-Mais non idiot ! Un IPA¹ ! Ischirien aux Petites Aptitudes !

Le collègue éclata d'un rire bruyant tandis que Thomas qui n'avait pas compris la blague, entreprit de bouger ses orteils engourdis au fond de la caisse. Mais quand allaient ils enfin arriver ? Il avait tellement froid. Après tout la boîte de métal dans lequel il se trouvait avait été conçue spécialement pour garder les fruits bien frais, aussi longtemps que possible. C'était d'ailleurs la raison pour laquelle Ofos avait choisi de cacher Thomas à l'intérieur. La matière épaisse renforcée par les couches de glace artificielles disposées entre les parois, empêchait les détecteurs du palais d'identifier toute forme de vie possiblement présente à l'intérieur. Par conséquent, chaque caisse de ce type était ouverte et inspectée par des soldats. Bien sûr, grâce à la potion, ils ne devraient pas pouvoir trouver Thomas, à moins de plonger la main dans la caisse.

Restait à espérer que cela n'arrive pas.

Le véhicule continua de rouler pendant quinze bonnes minutes supplémentaires, avant de s'arrêter lentement.

-Halte ! Fit une voix sévère.

Thomas comprit alors qu'ils étaient arrivés au château. Pourtant, toujours aucune nouvelle d'Ofos. Où était-il passé ? Comment Thomas allait-il pouvoir entrer sans son aide ? Il se sentait soudainement tout paniqué.

Des bruits de pas se firent alors entendre tout autour du camion ; sûrement les soldats qui examinaient son aspect extérieur. Ce qui ne pouvait signifier qu'une chose, ils n'allaient donc pas tarder à entamer l'inspection de l'intérieur du camion.

Comme pour confirmer sa supposition, les portes arrières du camion s'ouvrirent brusquement, faisant sursauter le châtain caché dans l'une des caisses. Les soldats baignèrent d'abord l'espace du faisceau lumineux infra-rouge de leur lampe, avant de commencer à ouvrir les caisses en métal isotherme, une par une. Thomas ne savait pas du tout quand est-ce que son tour allait arriver. Il ne savait pas non plus s'il devait se téléporter hors du véhicule le temps de l'inspection et revenir après, ou s'il devait rester dans la caisse. La seule instruction qu'Ofos lui avait donnée était de se taire. Rempli d'appréhension, Thomas se recroquevilla autant que possible. Puis enfin, un soldat ouvrit la caisse dans laquelle il se trouvait et l'aveugla avec sa lampe. Thomas baissa la tête. Son cœur avait arrêté de battre. Il ne fallait pas qu'il soit découvert, il ne fallait surtout pas qu'il soit découvert...

Le soldat éteignit sa lampe, prêt à fermer la caisse, et Thomas soupira de soulagement. Chose qu'il n'aurait jamais dû faire. Bien qu'imperceptible, son souffle avait réveillé les sens d'un soldat d'élite surentraîné, qui avait eut le malheur d'être affecté à la vérification des marchandises à l'entrée du château, alors qu'il aspirait à bien mieux. Chaque jour, alors qu'il ouvrait caisse après caisse, il avait toujours espéré trouver des armes, des fugitifs, des assassins ou d'autres intrus quelconques susceptibles de pimenter son quotidien monotone. Ainsi, il se tenait toujours aux aguets, prêt à bondir sur un ennemi. Le souffle de Thomas ne lui avait donc pas échappé et avec une dextérité impressionnante, il avait plongé sa main dans la caisse, désireux d'attraper un intrus qu'il savait invisible.

Liés à jamais. [bxb]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant