Chapitre 42

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Une lumière dorée aveuglante me transperce la rétine, éblouie, je ferme les yeux puis les rouvre une fois le rayon passé : la cité d'or, la toute première venait de s'ouvrir devant nos yeux.
Comme l'avait dit Hernando nous avions pris la route à l'aube en direction du bouclier fumant. Le réveil n'en a pas moins été difficile : la morphine et l'alcool font vraiment des miracles. J'ai encore eu le droit à un seau d'eau sur la tête. Arrivé à destination, il m'a fallu ravaler avec courage les nombreux sanglots qui se formaient dans ma gorge, tandis qu'il a fallu un millième de seconde au Gouverneur pour repérer la machine volante des Olmèques. Celle-ci faisait d'ailleurs le tour interminable d'une montagne située au milieu d'une île. Hernando s'était bien gardé de me dévoiler l'emplacement de la cité, prétextant que ça en aurait été de trop en plus de la mort de mon géniteur ... et qu'il n'avait pas trouvé le temps adéquat pour me le dire ... J'en doute, il aurait très bien pu m'en avertir hier soir ...
J'ai été surprise de savoir qu'il le connaissait par les Atlantes mutants qui cherchaient la cité d'or maintenant depuis de nombreuses années ... mais dorénavant plus rien ne les empêchera de parvenir à leur fin : leur but étant tout proche. En effet, Zia et Estéban venaient tout juste d'insérer leurs médaillons - sous la demande du grand prêtre - dans la porte qui s'ouvrit en quelques secondes, nous laissant médusé devant un si beau spectacle. Hernando placé derrière moi, retient son souffle car je ne le sens plus dans ma nuque. C'est Calmèque qui nous sort de notre émerveillement :
_Bon, maintenant que la porte est ouverte, laissez-nous entrer.
Le fils d'Atanaos répond à brûle pourpoint autoritairement :
_Avant cela, libérez Tao. En effet, le jeune muen est toujours retenu prisonnier de ces êtres machiavéliques.
_Pas avant d'être sûr que le grand héritage sera entre nos mains !
C'est quoi son problème à celui-là ? Il ne peut pas obéir sans répliquer ? Bordel !
Alors, c'est sans réfléchir mais avec une détermination farouche que je me jette sur le cou du second de Ménator, plaçant minutieusement ma rapière sous son menton.
Je lui souffle dans la nuque avec toute la provocation dont je peux faire preuve :
_Tu le libère où je t'embroche. Je n'hésite pas à appuyer plus : déjà un léger filament de sang se met à couler le long de son cou.
Une vengeance noire prend procession de mon être. Je n'hésiterai pas à le tuer pour le punir, rectification : pour tous les punir de la mort de mon père !
A bout de souffle, il supplie :
_C'est ... c'est bon ... vous autre, libérez-le. Au même instant, Tao se retrouve dans les bras de son ami.
Tenant toujours fermement ma prise, j'essaye d'assembler mes pensées afin de récupérer avant ces enfoirés le trésor de la cité. Il faut à tout prix que je mène ma mission à bien. C'est donc avec fureur que je me mets à trancher littéralement la gorge du sous-fifre. Je suis étonnée de la cruauté dont je peux faire preuve mais incapable de m'arrêter je continue. Mes nerfs sont en feu. Plus les secondes s'écoulent et plus y a de sang. Je sens le corps de Calmèque s'affaisser petit à petit. C'est à peine si les cris d'effrois des enfants me parviennent. Je suis dans un état second, beaucoup trop loin pour que la réalité puisse m'ouvrir les yeux. C'est Hernando qui met fin à ce massacre en m'attirant à lui. Il me murmure à l'oreille dans le but d'apaiser ma colère :
_Isabella reprends-toi ... je comprends ta fureur mais ce n'est pas une raison ... il ne mérites de mourir sous le coup de ta lame.
Si tu me comprends alors pourquoi me laisses-tu pas finir le crime que j'étais entrain de commettre ? Laisse-moi tout de même venger la mort de mon père bordel !
Hors de moi, je sens chacun de mes membres se mettre à trembler. Mes jambes flageolent tellement qu'elles ne me retiennent plus pour bien longtemps : je m'écroule à genoux versant toutes les larmes de mon corps. Hernando continue de me supplier de sa douce voix de me calmer mais j'en suis incapable. Je suis à bout, si près du but pourtant je suis à bout. J'en ai marre ! Marre de cette foutue mission qui fait de moi celle que je ne suis pas. Marre d'Hernando qui s'oblige à vouloir guider ma vie. Marre de perdre le contrôle de mes émotions. Marre de me sentir d'un coup si faible ... mais j'ai tellement besoin d'évacuer. Marre de devenir une étrangère à mes propres yeux. Marre d'être un pion passant de mains en mains pour parfaire les besoins d'un homme qui n'a même pas le courage de me faire savoir pourquoi je compte tant à ces yeux. Marre d'avoir pour seule cause un amour impossible pour m'attacher à la vie ... alors que je sais que c'est perdu d'avance.
Oh Juan. Pardonne-moi. C'est fini. J'ai échoué. Je m'en veux tellement de ne pas avoir été à la hauteur mais il est trop tard. Je ne viendrai pas te sauver, tout comme moi, je ne me sauverai pas, Juan. Je vais finir cette mission pour rendre hommage à mon père puis je viendrai mourir avec toi.
S'il y a une dernière chose que je dois faire c'est bien celle-ci : mourir aux côtés de celui que j'aime.

Reprenant mes esprits, je me lève aidée d'Hernando. Je scrute alors la pièce des yeux et remarque avec épouvante que les enfants, les Olmèques dont Calmèque et le grand prête ne sont plus là.
Bordel ! ça fait combien temps que je pleure comme ça ?
Ni une, ni deux, je ramasse mon épée et m'élance dans la ville d'or. Focalisée sur le fait de mettre la main sur le grand héritage, je ne prends pas le temps de contempler les lieux pourtant si émerveillant.
Oubliant mes peines, la cicatrice à jamais ouverte de mon cœur, mes muscles encore tremblant de ma crise de nerfs, mes angoisses, mes craintes, la boule qui se forme au creux de mon ventre à l'idée que ces crapules puissent s'emparer d'un si grand héritage mais surtout de me présenter les mains vides face à Sa Majesté, je cours. Je cours à me brûler les poumons jusqu'à en perdre haleine. Et alors à quelques mètres des marches permettant de monter à la plus haute tour de la cité, la scène se présente devant-moi : le grand prêtre se tient là, dans l'escalier, une main posée sur l'épaule d'Estéban.
C'est fou comment ces deux-là, ont créé un lien si fort en si peu de temps !
Tous deux accompagnés de la jeune Inca. Et Calmèque arrivant à toute allure avec sa troupe, armée jusqu'aux dents. Et alors que cet amas de créature atteint le niveau du grand prête toujours occupé à parler avec Estéban en faisant preuve d'une douceur paternelle. Je comprends.
Alors que mon esprit se met en pause le temps que mon cœur que je sens fortement cogné dans mes tempes et que mon corps se meurent dans cette course insensée, je parcours les derniers mètres à bout de souffle. Et au moment où Calmèque s'apprête à enfoncer la lame dans l'abdomen du gardien de la cité d'or, je crie :
_Atanaos attention !
Il ne peut réprimer un hochet de surprise à l'entente de son nom. Je n'ai pas le temps de me focaliser sur la réaction de son fils que déjà je bouscule violemment l'Olmèque d'un coup d'épaule pour me placer face à lui afin de faire obstacle de mon corps mais alors que je m'apprête à lui saisir le poignet pour dévier la trajectoire de sa lame, celle-ci vient très brusquement se loger dans mon bas ventre à quelques millimètres de l'os de ma côte. Submergée par la douleur, j'émets un cri de terreur alors que la lame froide quitte mon épiderme brutalement. Mes yeux se révulsent, je me plie en deux, mon corps pris d'interminables, déchirantes et cruelles convulsions. Les larmes me montent très vite aux yeux : ma vue se fait floue. Naturellement je porte mes mains à ma blessure dont je sens le sang affluer abondamment recouvrant mes doigts en très peu de temps. Mon cœur cogne dans chaque parcelle de mon être, mes oreilles se mettent à siffler couvrant les appels d'Atanaos qui me font sursauter à chaque fois que je l'entends prononcer mon prénom. Le sang continue de couler à torrents malgré la pression que j'exerce. Dès lors, je me laisse gésir lorsqu'une une vague me submerge : l'inconscient à gagner la partie.


Fanfiction Les Mystérieuses cités d'or.Saison 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant