Chapitre 2

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Le matin, je suis réveillée par un boucan. J'ouvre les yeux et je trouve Jennie et Ava qui s'affairent à préparer mon sac . C'est à ce moment que je regrette de leur avoir donné un double. Elle ne devait s'en servir qu'en cas de force majeure. Ça n'a plus d'importance, je dois quitter les lieux dans une semaine. Je n'ai pas grand-chose à emporter, la douleur lancinante au cœur se réveille en même temps que mes pensées. Je me redresse, abattue par mon nouveau statut de jeune fille célibataire.

— Fini de roupiller?
— Jennie, éloigne-toi, mon envie de meutre est au summum.
Elle explose de rire.

— Allez, va te préparer! On prendra le petit déjeuner à l'aéroport. J'ai demandé à Violet de déménager tes affaires pendant ton absence.
— Merci, je ne sais pas ce que je ferais sans vous!
— Te noyer dans l'alcool?
Intervient Eva.

Je rejoins la salle de bain, je me douche et tente de me rendre présentable. Je ne m'attarde pas dans l'appartement, le quitter est une déchirure. J'ai tant de souvenirs de nous dans chaque recoin. On monte dans un taxi, je suis vide, incomplète. Ce sentiment ne me quitte plus depuis deux jours. Il faut laisser le temps faire son œuvre, je ne vois rien d'autre qui pourrait apaiser ma peine.
On descend, je récupère ma valise et on rejoint le comptoir d'enregistrement, direction Las-Vegas, pour un week-end de non-enterrement de vie de jeune fille. Elles avaient réservé pour ce jour spécial. On repère un café, on commande de quoi étancher leur faim, je ne me contente que d'un café pour avoir les idées claires. Je n'ai plus goût à rien, loin de lui. La rupture est brutale, la veille encore, il disait m'aimer et vouloir faire de moi sa femme. Et puis tout a basculé, il m'a rejetée comme si notre histoire n'était qu'une liaison insignifiante, dérangeante. Il s'est débarrassé de moi comme un parasite trop nuisible à son confort. Les seules explications qu'il a bien voulu me donner, c'est qu'il n'était pas certain de ressentir la même chose que moi et qu'il valait mieux prendre le temps de la réflexion. Il m'a parlé de break, ce mot est ridicule, comme si notre histoire était un de ses films qu'on pouvait mettre sur pause en attendant de finir une tâche.

C'est le moment d'embarquer, mes pas sont lourds, un pas après l'autre. J'ai peur de sombrer là, au milieu de cette foule si euphorique à l'idée de s'évader. Nous passons le comptoir d'embarquement. J'espère encore que chaque seconde de recevoir un message de lui ,  me révélant la supercherie. Mais il n'y a rien, mes messages restent désespérément sans réponse.

C'est le moment d'embarquer, on rejoint notre avion, nous sommes une centaine. On se bouscule pour vite s'asseoir et enfin décoller. Je ne me sens pas à ma place, j'aurais dû renoncer.

L'avion atterrit, je suis dans l'acceptation de ma situation, en deux de temps, mes pensées sont versatiles, changeantes. Je suis résignée, il ne reviendra pas. Je récupère la valise, mes amies interpellent un taxi. Nous voilà en direction du casino, je regarde par la vitre, il fait beau, les touristes sont joyeux. C'est la ville de la démesure.

On descend devant un énorme casino, l'un des plus réputés. Il avait financé le séjour, ses moyens le permettent. On rejoint le comptoir, l'hôtesse vérifie la réservation, il n'a pas annulé. Notre séjour est maintenu. Elle nous donne la clef de nos chambres, je séjourne dans une suite. Il avait prévu grand, comme s' il avait anticipé notre rupture. Les filles découvrent ma chambre euphorique, elles sautent de pièce en pièce.

— Kristen soit prête dans 30 minutes.
— Quoi? On ne se repose pas avant?
— Non tu t'es assez apitoyée sur ton sort.
— Deux jours seulement!
— C'est déjà trop. Allez zou!

Elles s'éclipsent, je fouille dans mon sac, je me saisis d'une robe. Autant se prêter au jeu, ce genre de voyage n'arrive qu'une fois dans sa vie. Je me change et me prépare. Elles sont ponctuelles, on rejoint le hall du casino. Je me laisse guider, je ne suis plus maîtresse de moi-même. Il décidait de tout pour mon bien-être, je suis déboussolée. La moindre prise de décision me provoque une crise d'angoisse.
Jennie s'occupe de la location de la voiture, Eva analyse les autres touristes, je n'écoute que d'une oreille. Jennie s'arrête devant le casino avec une voiture de luxe. Il s'était occupé de tout. Je ne comprends pas son changement de comportement. Je monte et je me perds dans mes pensées, jusqu'au moment où ma voiture s'arrête devant un club.

On descend, le vigile nous laisse passer,  le son est assourdissant, les gens alcoolisés dansent, collés-serrés. Les spots m'éblouissent, première fois que je mets les pieds dans ce genre d'endroit. Elles me traînent à une table, Jennie commande nos boissons, pendant que je parcours la salle des yeux. Je ne me sens décidément pas à ma place. Je me lève et me dirige vers les escaliers, je monte à l'étage, mais je ne trouve pas les toilettes. J'ouvre une porte au hasard, et je me fige. Un homme est passé à tabac par deux brutes. Ils tournent les yeux vers moi, et me fixent durement. Je referme la porte à la hâte et je me dirige vers les escaliers. Mon cœur  tambourine dans la poitrine, mes mains tremblent, ma respiration est lourde. Je dévale les escaliers et je rejoins les filles.

— Les filles, il faut qu'on parte tout de suite.

Elles sentent la panique dans ma voix.

— Qu'est-ce qui se passe?
— Oh mon dieu, je je je.
— Calme-toi Kristen!
— Je cherchais les toilettes, j'ai ouvert une porte et deux hommes passaient à tabac un type.
— Ils t'ont vu?
— Oui.

On se relève et on se dirige vers la sortie, quand mes yeux se posent sur un homme, qui me fixe. Il fait trop sombre pour avoir une vue nette de lui, mais ce que je ressens me fait frissonner l'échine.
Il s'approche de moi, Jennie me tire par le bras pour me faire bouger, mais impossible de bouger. Il s'approche de moi, son odeur boisée, masculine emplit mes narines. Mon corps est à sa merci. Il me saisit par le bras, et me ramène à lui. Je le détaille, il est grand, brun , les yeux d'un bleu océan qui vous font perdre la tête. Son visage est la perfection même, une belle bouche, une barbe de quelques jours, des cheveux soyeux. Et  son odeur, je n'avais jamais senti une effluve aussi entêtante.

— On tente de fuir ma beauté?

Sa voix me fait frissonner.

La veuve noireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant