Chapitre 24

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Je roule plusieurs heures, j'arrive à Reno, je stationne devant le supermarché, je guette les alentours. Je fixe l'heure affichée sur le tableau de bord, j'ai dix minutes d'avance. Je vois les minutes défiler avec une angoisse qui s'accentue de seconde en seconde. Au bout de dix minutes interminables, une voiture stationnée à côté de moi, je récupère mon sac et je descends, la vitre descend sur un homme d'une cinquantaine d'années.

— Voici donc la veuve noire?
— En chair et en os.

Il sourit.

— On y va?

Je monte du côté passager, en abandonnant ma voiture sur le parking. On roule en direction de la sortie de la ville. Il est silencieux, je ne connais rien de lui. Mon père ne m'a jamais parlé de lui. Il y a des airs de ressemblances, l'air de famille est là.

— Ton père s'est mis dans de beaux draps.
— Apparemment, c'était son gagne-pain.
— N'insulte pas ton père! Il a fait beaucoup pour notre communauté.
— Tu étais là à son enterrement?

Il ne répond pas et plonge dans un mutisme.
Je découvre une famille, dont j'ignorais tout. Un oncle sorti de nulle part, me parle d'un père qui m'a vendu un modèle de vie que je n'aurais jamais. Il m'a laissé dans l'insouciance totale, ou il espérait peut-être que j'ouvre les yeux par moi-même.

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Flashback.

Deux ans plus tard, le même cheminement, il m'appelle dans son bureau, cette fois-ci, il s'appelle Dante, un italien. Pour rapprocher leur business. Je ne me suis pas opposée encore cette fois-ci. Ma robe ensanglantée allait reprendre du service. Cette fois, il est pressé et il fait les choses en comité réduit. Seuls les plus proches membres seront réunis.
Le mariage a été célébré dans une petite église, la sécurité a été renforcée. Cette fois-ci nous avons échangé nos vœux. Il a été tué froidement seulement une semaine après notre mariage. J'ai hurlé de douleur, il ne méritait pas ça. Je revois encore mon père me dire que ce n'est pas de faute. Que c'est la faute à pas de chance.

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De nos jours.

La voiture s'arrête devant un immeuble, je descends et je le suis jusqu'à l'intérieur. Les murs sont défraîchis, les portes cassées, autrement une bonne planque pour une fuyarde. On monte au troisième étage, la porte s'ouvre sur un petit appartement. , il m'invite à entrer, je parcours des yeux ma nouvelle planque.

— Comment dois-je t'appeler?
— Tonton.
En souriant.

— Je te recontacterai dans quelques jours.

Il me jette un téléphone.

— Il est sécurisé, intraçable.
— Merci.
— Comment était ton séjour à Dublin?
— Très formateur.
— Elisabeth?

Je le regarde, troublée.

— Pourquoi a-t-elle accepté de travailler avec des Italiens? Enfin, ils sont ennemis non?
— En apparence oui, mais ton père était respecté bien au-delà de notre communauté. D'ailleurs,ton deuxième mari était italien.

Une douleur se ravive en moi. Je l'ai à peine connu, une semaine seulement, à peine le temps de savoir des banalités.
Il s'en va, me laissant avec des questions sans réponse. Je compose le numéro de Tyler, je vais en profiter pour régler des comptes.

— Tyler.
— Oh mon Dieu Kris, ça va? Je me suis fait un sang d'encre.
— Tu travaillais pour mon père?
— Chérie, enfin de quoi tu parles?
— Tu fais partie de quelle mafia hein? Italienne, irlandaise ou peut-être russe.
— Kris...
— Réponds-moi!
— Russe.

— J'ai fait le tour de tous les circuits! Bravo! ta petite sérénade à notre rencontre était calculée?
— Je suis désolé. Ton père ne voulait pas que tu te poses de questions, s'il m'arrivait quelque
chose.
— Pourquoi prendre autant de risques?
— Pour te protéger. Tu crois qu'il a fait ça pourquoi?
— Je me sens utilisée, sale. Tu ne te rends pas compte du mal que tu m'as fait en me quittant. Tu as eu peur d'être une victime de plus de la fameuse veuve noire.
— Non. Ça n'a rien à voir, je me suis attachée à toi, crois-moi.
— Pourquoi?
— Le plan a changé, viens me voir, on va discuter en face.
— Et me faire encore avoir. Tu peux crever.
— Kris.
Je raccroche.

Une chose qui me réconforte, je n'ai couché qu'avec ce lâche de Tyler. Mais ça ne m'empêche pas de me sentir utiliser. Je ressens une vive douleur dans la poitrine, je ne décolère pas.

La veuve noireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant