Chapitre 19

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Point de vue: Alaric.

Une journée s'est écoulée, Nakoa n'a pas daigné sortir de sa chambre même pour dîner. Je ne me souviens même plus de la dernière fois où nous avons partagé le repas ensemble.

Dans l'espoir de retrouver les lucioles, je me rends encore une fois tôt le matin dans le jardin. Assis en silence en admirant la forêt. Je me tourne en sentant quelqu'un s'asseoir à mes côtés et je souris en reconnaissant Agnar.

- Tu te lèves tôt.
- Dis celui qui était là avant moi.
- Comment vont les soldats ?
- Ils sont épuisés, leurs blessures n'arrangent rien.
- Et les tiennes ?
- Je guéris doucement.

Je me tourne ensuite vers les bois en restant silencieux, les lucioles commencent à apparaître lentement. Agnar semble surpris et je lui fais signe de ne pas faire de bruit. Nous restons un long moment ainsi, contemplant les petites lumières sans parler. Je ne sais pourquoi mais cela m'apaise.

- Je suis venu hier également, quand je ne trouvais pas le sommeil. C'est là que je les ai vus.
Dis-je en murmurant.
- C'est magnifique.

Il me répond en parlant doucement lui aussi. Je reste souriant et me tourne vers mon ami. La lumière des insectes fait briller ses yeux noisettes, que je trouve encore plus beaux ainsi. Son visage se tourne ensuite vers moi et nous nous regardons un moment. Pourquoi cet instant me paraît si long et si court à la fois? Je sens mon cœur palpiter sans raison et il s'intensifie lorsque sa main se rapproche de moi. Son sourire fait apparaître son unique fossette et je sens une douce chaleur envahir mes joues, me faisant tourner la tête pour éviter son regard. Il saisit mon menton pour la remettre dans sa position d'avant, me forçant à le regarder.

- Ne détourne pas tes yeux de moi.

Sa voix murmurante accompagnée de ses doigts sur mon visage procurent une sensation étrange en moi. Comme un long frisson parcourant mon corps. Je finis par me rapprocher, voulant briser cette distance entre nous mais un bruit de feuillage vient gâcher ce moment. Nous nous tournons vers celui-ci avant que mon ami ne se lève pour s'approcher, me laissant derrière sûrement pour me protéger. Rapidement, il se stoppe.

- Agnar...?

Sa main se pose sur son épée attachée à sa ceinture, me faisant comprendre subitement. Il la brandit et s'attaque à moi mais je me roule sur le côté pour esquiver. Une enchanteresse en profite pour sortir de sa cachette et tenter d'approcher le château. Je ne peux l'empêcher, trop occupé à esquiver les attaques du brun sur moi.

- Agnar je t'en prie c'est moi !

Il ne m'écoute pas malgré mes cris, j'arrive à me redresser lorsque son arme se retrouve enfoncée dans la terre sans que je ne sache comment. J'en profite pour fuir et me dirige vers l'étalage d'armes d'entraînement, saisissant une épée pour me défendre. Il arrive à libérer sa lame et se rue vers moi mais je pare son attaque avec ce que je venais de prendre. Je tente de me défendre malgré mon envie de ne pas le blesser, je réalise que lui ainsi que Nakoa ne faisaient que se retenir avec moi lorsqu'on s'entraînait ensemble car je me retrouve rapidement à terre et désarmé.

C'est donc ainsi que ma vie s'arrête ? Tué par l'homme que j'aime sans avoir pu me défendre correctement.

Il brandit sa lame, l'espace d'un instant je me retrouve paralysé. Impossible d'envisager d'esquiver cette fois. Son visage est si enragé qu'il me glace le sang, je ne l'avais jamais vu comme tel. Son arme vient s'abattre vers moi ce qui me fait fermer les yeux par réflexe mais un bruit métallique me les fait ouvrir à nouveau. Une autre épée venait d'être mise au-dessus de moi, empêchant celle d'Agnar de me toucher. Nakoa est celle qui la tient et use de sa force pour faire reculer le soldat de plusieurs mètres. Au vu de sa tenue, elle a sûrement bondit de son lit en entendant mes cris. Elle se poste devant moi, gardant son arme fermement dans sa main. Le brun l'attaque avec fureur mais elle riposte, me laissant le temps de me redresser pour alerter les soldats pour l'envahisseuse. Le combat continu, devant mes yeux. Je suis complètement inutile et je mets en danger les deux personnes que j'aime le plus au monde à cause de mon incompétence.

Après un moment, ma sœur arrive à le mettre à terre en faisant valser son épée à mes pieds, quand elle brandit la sienne mon cœur semble s'arrêter. Mais il reprend son rythme en la voyant seulement l'assommer avec le manche. Je m'en veux d'avoir cru l'espace d'un instant qu'elle lui ôterait la vie. Elle se tourne ensuite vers moi, l'air énervé.

- Vous êtes complètement inconscient ?! Qu'est ce qui vous prend de rester aussi proche de la forêt tout seuls ?! De plus sans bouchons !
- Je...
- Tu te rends compte de ce qui aurait pu t'arriver ?! À toi et à tous les autres de ce château ?! Tu sais ou pas ?!

Jamais elle ne m'avait autant crié dessus, même pendant nos disputes. J'ai l'impression d'entendre notre mère lorsque je faisais une bêtise. Mais là c'est beaucoup plus intense. Elle s'approche de moi, tirant brusquement mon bras vers le château.

- Tu reste avec les gardes t'as compris ?! Je m'occupe de l'enchanteresse.
- Je...je suis désolé Nakoa...
- Je ne veux pas de tes excuses ! Je veux que tu sois en vie alors merci d'avoir la sagesse de rester avec les soldats, compris ?!

Je ne fais qu'acquiescer d'un mouvement de tête honteux, je n'ose même pas répliquer. Elle saisit son arme et se dirige vers l'extérieur, l'ennemi tentait d'escalader le mur menant à la cellule de la prisonnière. À cause de moi, elle avait réussi à avoir une certaine hauteur mais Nakoa saisit un arc et une flèche posés sur l'étalage. Elle se met à viser pendant un moment avant de tirer, touchant directement l'inconnue qui lâche sa prise et tombe brutalement sur le sol. Le choc est tellement violent que je pose ma main sur ma bouche pour ne pas crier. Sans l'ombre d'une empathie la reine se dirige vers elle, encore en vie malgré la chute et sa blessure à l'épaule. Elles se regardent l'espace d'un instant mais la blessée n'a pas le temps de dire un mot que la lame de la rousse se plante dans sa tête. Je détourne les yeux à ce geste, mais il était trop tard. J'aurais à jamais cette scène gravée dans ma mémoire. Elle retire ensuite son arme et saisit le sac que portait le cadavre à sa taille avant de se diriger vers le soldat à mes côtés.

- A partir de maintenant je ne veux plus aucune arme qui traine dans le jardin, je veux des soldats constamment entrain de monter la garde autour du château.
- Mais avec ceux blessés nous ne sommes pas assez nombreux ma reine...
- Je me fiche de ça, faites nuit blanche s'il le faut mais je ne veux plus jamais que ce genre de scène se reproduise.
- Bien majesté.

Elle se tourne ensuite vers moi mais je n'ose pas lever les yeux vers elle.

- Quant à toi, faut-il que je t'enchaîne à ton lit pour que tu arrêtes de te mettre en danger ?

Je reste silencieux à ses mots.

- Je ne veux plus te voir dans le jardin, dorénavant tu restera à l'intérieur. Et tu vas me faire le plaisir d'apprendre à te battre réellement.

Encore une fois je ne dis rien, je ne sais si c'est dû à ma culpabilité, ou le fait que je sois terrorisé après le geste violent qu'elle vient de commettre.

Eaduria TOME 1 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant