Chapitre 47

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Point de vue: Alaric.

Mes yeux restent figés pendant un moment sur l'épée mortelle, emprisonnée sous un bloc de verre solide dont moi seul ai la clé. Soudainement un bruit de raclure de gorge me fait revenir à la réalité et je me tourne vers le soldat s'approchant de moi.

- Nous avons distribué tous les bouchons à tous les villages comme vous l'avez ordonné majesté.
- Très bien je te remercie.

Il me salue brièvement avant que je reprenne mes pensées sur la lame. Cette fois-ci c'est Agnar qui prend place à mes côtés en m'observant longuement.

- A quoi tu penses ?
- Oh, un peu à tout.
- Tu hésites à la tuer c'est ça ?

Je reste silencieux avant de baisser mon regard. Je me tourne ensuite vers lui comme réponse, il semble toujours deviner ce à quoi je pense.

- Je ne sais pas si j'en ai le courage. J'ai grandi avec elle. Quoi qu'on en dise c'est ma sœur et elle le restera à jamais. Je ne me vois pas mettre fin à ses jours...

Un long silence s'interpose dans lequel mes yeux divaguent sur le sol. Il me regarde avant de reprendre la parole.

- Mais...?
- Mais je sais qu'elle a perdu l'esprit. Elle veut ma mort et n'hésite pas à mettre en danger nos villageois. Ce n'est plus celle que j'ai connu alors je ne sais pas ce que je vais faire...

Il m'offre un visage compatissant face au dilemme qui se présente à l'intérieur de moi. Lorsque je relève la tête, je remarque le regard du brun dirigé vers Nathaniel qui semble nous surveiller.

- Tu veux t'entraîner ? Si tu n'as pas d'autres révisions.

Je comprends qu'il propose ça pour qu'on soit seuls et je hoche la tête.

- Pour l'instant j'ai du temps libre alors allons-y.

Il me guide ensuite, sous le regard du conseiller, jusqu'au jardin. Il commence à me vêtir d'une armure avant de me tendre une épée que je saisis. J'attends patiemment qu'il soit prêt avant qu'on ne commence le combat. Rapidement mes pensées cessent pour que ma concentration ne se dirige uniquement que sur l'action. Ma posture est meilleure depuis quelques temps, grâce aux entraînements avec Mira qui accepte de me donner des conseils de temps en temps. Comparé à mon adversaire, elle au moins ne me ménage pas ce qui me force à faire plus d'efforts. Au bout d'un moment, Agnar finit par me toucher ce qui met fin au combat.

- Tu t'es beaucoup amélioré ! C'est très bien !
- Mais c'est toujours pas suffisant pour battre Nakoa... On en revient toujours au même point. Si je me retrouve seul face à elle, je vais forcément perdre.
- Tu ne seras pas seul, et rien ne nous dit que tu perdras.
- Sois réaliste Agnar, ce n'est pas méchant mais logique. Elle a plus d'avance sur moi. De plus, elle apprécie se battre, comparé à moi...

Aucun mot ne sort, laissant le bruit des autres soldats s'entraînant et les cris des oiseaux environnant prendre le dessus.

- Écoute...nous travaillons avec Reiner pour un moyen plus facile de réveiller les humains de l'hypnose. Peut être que ça te sera utile pour la battre aussi.

Il semble fouiller dans ses poches avant de me tendre un petit sac en tissu, fermé d'une ficelle bien serrée. Je le prends dans ma main avant de redresser mon regard vers lui.

- Je ne comprends pas, qu'est ce que c'est ?
- De la poudre de Metalicastus, Mira en avait de trop et nous en avons fait de la poudre. Nous l'avons testé et ça peut nous réveiller de l'emprise sans avoir besoin de nous rendre inconscient. Rien qu'en poussière cela semblait l'affecter alors je pense que si tu te retrouves en mauvaise posture, tu pourras l'utiliser.
- J'espère qu'on a pas détruit toutes les fleurs...
- Non ne t'en fait pas on a veillé à garder certaines graines pour les planter, on pourrait en mettre ici aussi pour nous protéger.
- Nakoa n'attendra pas qu'elles poussent pour attaquer et à part Mira et elle, il n'y a plus aucune enchanteresse alors...
- Oui tu as raison.

Je regarde le petit sac en passant mon pouce dessus avec lenteur. J'espère ne pas avoir à l'utiliser.

- Merci...
- Ce n'est rien, on reprend ?

J'acquiesce d'un signe de tête avant de ranger la poudre pour reprendre l'entraînement. Nous continuons jusqu'à ce que le soleil finisse par se coucher.

- On devrait arrêter là, tu vas devoir dîner.
- J'en ai pas trop envie...
- Tu ne manges plus beaucoup ces temps-ci.
- Bah la table est bien trop grande pour moi tout seul, ça me paraît si...vide.
- Je comprends...mais il faut que tu manges.

Je soupire en hochant lentement la tête. Je sais qu'il a raison, c'est ce qui me pousse à ne pas insister. Je me dévêtis donc de l'armure avant de rejoindre la table déjà garnie qui m'attendait. Je m'installe en essayant de ne pas me concentrer sur le silence pesant de la pièce. Après quelques bouchées, mon compagnon entre dans la pièce en se plaçant de l'autre côté de la table.

- Qu'est ce que tu fais ?
- Tu as dit que tu ne voulais pas manger seul, je peux te tenir compagnie.
- Si Nathaniel te voit ici...
- Je m'en fiche, c'est toi mon roi, c'est toi qui décide.

Je souris doucement tout comme lui avant de lui tendre un plat.

- Mange avec moi alors.

Il ne refuse pas et nous partageons le repas ensemble comme la première fois. Après avoir terminé, il me guide jusqu'à ma chambre.

- Maintenant que tu as bien mangé, j'espère que tu vas bien te reposer.
- Ça va je ne suis plus un enfant tu sais.
- Mmh...techniquement tu l'es pour moi, tu n'as que dix-huit ans.
- Eh ! T'en a à peine vingt !
- C'est ce que je dis, tu es plus jeune.

Je m'arrête une fois devant ma porte et viens pointer son torse en le poussant faiblement avec mon doigt.

- Je te trouve bien insolent face à ton roi.
- Je suis désolé majesté, comment puis-je me faire pardonner ?
- Mmh..ça risque d'être difficile.

Nous sourions tous les deux et il agrippe mon poignet pour me tirer contre son torse. Nous nous retrouvons collé et il m'emprisonne avec ses bras.

- Et là ?
- Toujours pas gracié.

Il sourit d'autant plus, mon souffle se fait plus rapide en voyant ses yeux se perdrent sur mes lèvres. Les siennes finissent par se pencher pour m'offrir un tendre baiser. Mes paupières se ferment automatiquement avant que je réponde avec plus de passion, tirant son haut pour nous coller davantage. Sa main se glisse dans le creux de mon dos pour amplifier notre étreinte et avec nos mouvements nous nous retrouvons contre ma porte. Il finit par séparer nos lèvres pour reprendre son souffle, visiblement tout aussi désireux que moi.

- Tu...tu devrais aller dormir.
Dit-il entre deux souffles.
- J'ai tout sauf envie de dormir là maintenant.
- Moi non plus, mais ce n'est pas le bon moment.

Ma main se glisse sur sa nuque tandis que nos fronts se touchent. J'ai envie de lui répondre que nous avons assez perdu de temps par le passé mais je me résigne en le relâchant lentement.

- Tu as raison, je vais y aller.

Il garde ma main dans la sienne pour y déposer un baiser sur le dessus, me faisant légèrement rougir avant que je rentre à l'intérieur de ma chambre.

Eaduria TOME 1 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant